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La coupe du monde de rugby féminin débute le 22 août en Angleterre ; à cette occasion, des témoignages illustrent comment les sports genrés restent ancrés dans les pratiques et les représentations en France. Yvette, Germain et Gabrielle racontent les obstacles, les moqueries et les efforts pour gagner en visibilité dans des disciplines perçues comme masculines ou féminines.
Témoignages sur les sports genrés en France
Yvette Palatino : boxe féminine et résistances
Yvette Palatino est responsable des actions de l’association « Allez les filles » qui propose des cours de boxe féminine. Ancienne championne de kickboxing en 1992 et première entraîneuse de boxe en France, elle anime chaque mercredi soir des séances où les participantes apprennent à exécuter des uppercuts et autres crochets du droit.
Elle relate les réactions hostiles auxquelles elle a dû faire face pour permettre aux femmes de pratiquer la boxe anglaise en compétition :
“On me disait que je n’avais rien à faire là, que la boxe ce n’était pas pour les femmes. Je dois être derrière les fourneaux, m’occuper des enfants… J’ai même reçu une serpillère avec des gants de ménage”
Yvette explique aussi le contexte des années 1990 : en 1997, elle s’est mobilisée pour que « les femmes aient l’autorisation de pratiquer la boxe anglaise en compétition », évoquant des salles de boxe et des assemblées générales de clubs peu ouvertes aux femmes. Elle conclut l’échange ainsi :
“Il faut encore que les femmes s’imposent, il faut de la détermination. Ça, c’est la force des femmes”
Germain Louvet : la danse et les stéréotypes
Germain Louvet, 32 ans, a été nommé danseur étoile au ballet de l’Opéra de Paris en 2016. Originaire d’un village de 50 habitants en Saône-et-Loire, il raconte une pratique venue « par hyperactivité », mais aussi un parcours marqué par les insultes et l’incompréhension.
Il évoque l’une des pires moqueries subies :
“La pire insulte qu’on pouvait me faire, c’était de m’appeler Germaine et ça me rendait fou”
Germain ajoute :
“Ce qui me mettait en colère, c’est l’incompréhension parce que je me disais moi je suis un garçon, je fais de la danse donc les garçons peuvent faire de la danse”
Il précise ensuite :
“À l’inverse, je ne comprenais pas pourquoi c’était réservé aux filles puisque moi j’aimais ça et que ça me venait naturellement et que ça marchait. Donc c’était plus de l’incompréhension”
Pour lui, la pratique permet d’exprimer différentes facettes de l’identité :
“La virilité n’est pas une notion qui existe pour moi car chacun exprime sa masculinité ou sa féminité telle qu’elle est, tel qu’il l’entend”
Gabrielle Vernier : rugby féminin, visibilité et reconnaissance
Gabrielle Vernier, 28 ans, évolue au centre et vient de remporter avec Blagnac un derby contre le Stade Toulousain. Petit gabarit et chignon impeccablement vissé, elle a été reconnue comme meilleure internationale française et meilleure joueuse du tournoi des Six Nations en 2023.
Malgré ce palmarès, elle pointe un déséquilibre de reconnaissance :
“Le rugby féminin manque de visibilité et malgré ce titre que j’ai eu, qui est l’équivalent de ceux que les joueurs masculins ont reçu, on a pas du tout la même reconnaissance en tant que femmes”
Gabrielle dénonce aussi les clichés sur la condition physique nécessaire au rugby :
“On pense souvent qu’il faut être costaud pour jouer au rugby, mais au final, on tire des qualités de plein de choses et ma petite taille me permet d’atteindre des zones de plaquages plus facilement que les grands”
Sur la suite, elle appelle à davantage de médiatisation et d’ouverture d’esprit :
“Il est temps d’ouvrir les yeux à beaucoup de personnes parce que le rugby, que ce soit masculin ou féminin, est ouvert à tous”
Enjeux et évolution à l’approche du 22 août
La tenue de la coupe du monde de rugby féminin, qui débute le 22 août en Angleterre, est présentée par certains intervenants comme une opportunité pour accroître la visibilité du rugby féminin et questionner les représentations liées au genre dans le sport. Les témoignages ci‑dessus montrent des aspects concrets : moqueries et discriminations, luttes pour l’accès aux compétitions, et recherche d’un traitement médiatique équivalent.
Yvette, Germain et Gabrielle véhiculent une même volonté de changement : être plus visibles, moins jugés et permettre à chacun·e de pratiquer sans être enfermé·e dans des stéréotypes. Leurs récits illustrent que, malgré des avancées, les sports genrés continuent d’influencer les choix des familles et la manière dont les athlètes sont perçu·e·s.
Ces témoignages rappellent enfin que l’ouverture et la médiatisation restent des leviers essentiels pour réduire les inégalités de reconnaissance entre disciplines et entre pratiquants, quel que soit leur genre.