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Depuis le retour au pouvoir des Taliban en 2021, la question des relations entre voisinage et Kaboul est devenue centrale ; en 2025, le Tajikistan, Taliban, relations diplomatiques, Asie centrale reflète un virage prudent : Douchanbé abandonne progressivement une posture d’isolement au profit d’une posture plus pragmatique, sans pour autant établir de reconnaissance diplomatique formelle.
Tajikistan, Taliban, relations diplomatiques, Asie centrale : cap pragmatique en 2025
Au lendemain de la prise de contrôle des Taliban en août 2021, les républiques d’Asie centrale ont dû composer avec une équation complexe mêlant frontières longues et vulnérables, intérêts économiques croissants et pressions sécuritaires. Le Tadjikistan a d’abord adopté l’attitude la plus ferme de la région, mais son discours et sa pratique diplomatique ont évolué ces dernières années vers une approche plus pragmatique, tout en restant fondamentalement prudente.
Le Tadjikistan reste la seule république d’Asie centrale à n’avoir pas établi de relations diplomatiques formelles avec le gouvernement des Taliban depuis 2021. Néanmoins, des changements concrets sont apparus début 2025 : Douchanbé a accepté la réalité d’un pouvoir taliban sur le terrain et a repris certaines interactions pratiques, y compris la réouverture de marchés transfrontaliers.
Du refus à des actes de coopération limités
Wahidullah Mahmoudi, ancien ambassadeur afghan au Tadjikistan, rappelle que « طاجيكستان كانت الدولة الوحيدة التي اتبعت نهج التسعينيات من القرن الماضي، باستضافة معارضي الحكومة الأفغانية الحالية، وظلّت العاصمة دوشنبه ثابتة على هذا النهج السياسي قرابة ثلاث سنوات حتى عام 2024 ». Il ajoute toutefois : « لكن طاجيكستان غيّرت من نهجها في بداية عام 2025 بقبول طالبان سلطة الأمر الواقع، ويضيف لوحظت تغييرات في سياسة طاجيكستان الخارجية بشأن أفغانستان وتتجلى هذه التغييرات خاصة في توجهات الرئيس الطاجيكي إمام علي رحمان، كما استأنفت السلطات الطاجيكية العمل في خمس أسواق حدودية مع أفغانستان ».
Sur le plan humanitaire, Douchanbé s’est distinguée après le violent séisme qui a frappé la province de Kunar, dans l’est de l’Afghanistan, en envoyant 3 000 tonnes de denrées et d’aide : un geste interprété comme une diplomatie humanitaire visant à témoigner d’une certaine bonne volonté envers Kaboul.
Le représentant diplomatique tadjik à Kaboul, Jafar Sidi, souligne la volonté d’éviter que l’Afghanistan ne devienne une menace régionale : « المجتمع الدولي، وطاجيكستان يريدان أن تكون أفغانستان آمنة، لا تشكل تهديدا لجيرانها، وتقوم حركة طالبان بتشكيل حكومة تمثل كافة الشعب الأفغاني ». Il ajoute : « نحاول مساعدة الشعب الأفغاني بكل ما نملك، ونريد أن نساهم في بناء هذا البلد، وتلوح في الأفق تطورات إيجابية ونحن نرحب بها، واستقرار أفغانستان من استقرار طاجيكستان والمنطقة ».
Frontières, sécurité et pressions régionales
La longue frontière terrestre, de plus de 1 300 kilomètres, reste au cœur des préoccupations tadjikes. Abdul Karim Khalili, chercheur en sécurité, rappelle que « تشكّل الحدود الممتدة لأكثر من 1300 كيلومتر بين أفغانستان وطاجيكستان أبرز مصدر قلق للأخيرة، والتهديدات على الحدود حقيقة، وطاجيكستان لا تستطيع مواجهتها وحدها، فطالبان أصبحت سلطة الأمر الواقع، والتعاون معها في ضبط الحدود ضرورة أمنية وليست خيارا سياسيا فقط ». Ce constat a favorisé un travail de coordination opérationnelle qui a, selon les autorités et certains observateurs, contribué à réduire le trafic illicite et les infiltrations armées, sans pour autant dissiper toutes les inquiétudes tadjikes.
Le rapprochement régional de pays comme l’Ouzbékistan, le Kazakhstan et le Turkménistan avec Kaboul a également isolé Douchanbé sur le plan diplomatique, poussant le Tadjikistan à réviser sa ligne initiale. Vahid al-Din Amrouf, chercheur tadjik, note : « الخطاب الرسمي تغيّر فعلا، في السنوات الأولى بعد وصول طالبان إلى السلطة، كانت طاجيكستان تتعامل مع حركة طالبان كتهديد مباشر، لكنها اليوم تتحدث عن ضرورة التعاون معها لأسباب أمنية ».
Des voix afghanes estiment que le changement de cap tient aussi à l’effritement du soutien aux groupes d’opposition : « التقارب بين كابل وواشنطن سيؤدي إلى خسارة المعارضة المسلحة الحضانة ومراكز إيواء » a observé Shah Mahmoud, ancien vice‑ministre de la Défense afghan, soulignant le coût et l’inefficacité du maintien de refuges pour l’opposition sur le sol tadjik.
Dialogue limité mais contrôlé avec Kaboul
Du côté des autorités talibanes, le porte‑parole Zabihullah Mujahid a affirmé : « طاجيكستان هي جارتنا، ونريد بناء علاقات متقدمة معها، وسياستنا هي تصفير المشاكل مع الجيران، وقدمنا للمجتمع الدولي ضمن اتفاق الدوحة بأننا لن نسمح لأحد باستخدام الأراضي الأفغانية ضد الآخرين، ومنذ فترة قام المسؤولون الأفغان والطاجيك بزيارات متبادلة، لمناقشة تعزيز العلاقات الثنائية، ويمكن حل القضايا العالقة بالحوار فقط ».
Les responsables tadjiks, ainsi que des analystes comme Mohammad Said, estiment que l’ouverture reste circonscrite : « طاجيكستان لا تستطيع عزل نفسها عن أفغانستان، فالجغرافيا أقوى من السياسة ». Le Tadjikistan cherche donc un équilibre entre gestion de la menace sécuritaire, intérêts économiques transfrontaliers et pressions régionales, sans pour autant franchir le pas d’une reconnaissance diplomatique pleine et entière.
À court terme, Douchanbé devrait privilégier une diplomatie pragmatique et graduelle : maintien d’échanges pratiques et humanitaires, coordination sécuritaire sur les frontières et dialogues bilatéraux limités, tout en gardant une marge de manœuvre politique face à Kaboul.