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La dynastie politique au pouvoir en Thaïlande traverse une crise juridique majeure, alors que la Cour constitutionnelle examine une requête visant à destituer la Première ministre Paetongtarn Shinawatra. Parallèlement, une autre juridiction traite une affaire de diffamation royale impliquant son père, l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra.
La pétition, déposée par 36 sénateurs et examinée ce mardi, accuse Paetongtarn d’avoir manqué à son honnêteté et enfreint les normes éthiques, en violation de la constitution, à la suite d’une conversation téléphonique divulguée avec Hun Sen, l’ancien dirigeant influent du Cambodge. Si la Cour accepte d’entendre cette affaire, elle pourrait suspendre la Première ministre de ses fonctions immédiatement.
Contexte politique et judiciaire
Thaksin Shinawatra doit également comparaître ce mardi devant le tribunal pénal de Bangkok pour une accusation d’insulte envers la monarchie thaïlandaise. Cette infraction est passible d’une peine pouvant atteindre 15 ans de prison. Le milliardaire de 75 ans nie les accusations et affirme régulièrement sa loyauté envers la couronne.
Depuis des années, la politique thaïlandaise est marquée par un affrontement entre l’élite conservatrice, pro-militaire et pro-royaliste, et la famille Shinawatra, perçue par cette élite comme une menace pour l’ordre social traditionnel du pays.
La procédure contre Paetongtarn Shinawatra
Ce mardi, la Cour constitutionnelle doit se réunir pour la première fois depuis le dépôt de la plainte. Les sénateurs conservateurs reprochent à Paetongtarn d’avoir enfreint les règles d’éthique ministérielle lors d’un différend diplomatique avec le Cambodge.
Si la Cour décide de traiter le dossier, la Première ministre pourrait être suspendue durant plusieurs mois, plongeant la Thaïlande dans une instabilité politique, alors que le pays fait face à une économie fragile et à la menace de sanctions tarifaires américaines.
La controverse est née d’un appel téléphonique du 15 juin visant à apaiser les tensions frontalières avec le Cambodge. Pendant cet échange, Paetongtarn, 38 ans, a qualifié Hun Sen d’« oncle » et critiqué un commandant de l’armée thaïlandaise, une ligne rouge dans un pays où l’armée joue un rôle majeur. Elle a présenté ses excuses en expliquant que ses propos étaient une tactique de négociation.
Conséquences politiques et manifestations
La fuite de cette conversation a suscité une vague d’indignation. La coalition de Paetongtarn conserve une majorité très fragile, certains partis clés ayant quitté l’alliance et envisagent un vote de défiance au parlement, tandis que des milliers de manifestants réclament la démission de la Première ministre.
« Je vais laisser la procédure suivre son cours », a déclaré Paetongtarn, visiblement affectée, lundi à la presse. « Si vous me demandez si je suis inquiète, je le suis. »
En cas de suspension, le pouvoir reviendrait à son adjoint, Phumtham Wechayachai.
Moins d’un an après sa prise de fonction, Paetongtarn est affaiblie par cette polémique. Le roi de Thaïlande a approuvé mardi un remaniement ministériel suite au départ de ses alliés, Paetongtarn s’étant attribué elle-même le portefeuille de la culture.
Procès de Thaksin Shinawatra pour lèse-majesté
Par ailleurs, Thaksin Shinawatra, patriarche de la famille et ancien leader deux fois élu au début des années 2000, a comparu devant un tribunal pénal de Bangkok pour des accusations de lèse-majesté, une loi stricte protégeant la monarchie thaïlandaise des critiques.
Les faits reprochés remontent à une interview donnée en 2015 à un média sud-coréen. Si le procès, qui devrait durer plusieurs semaines, aboutit à une condamnation, Thaksin risque jusqu’à 15 ans de prison. Le verdict ne devrait cependant pas être rendu avant au moins un mois après la fin des audiences.
Un responsable du tribunal a confirmé à l’AFP que le procès avait débuté, mais les médias n’ont pas été autorisés à assister aux audiences.
Thaksin nie les charges et a à plusieurs reprises juré fidélité à la couronne. Il avait évité la prison en séjournant pendant six mois en détention hospitalière pour raisons médicales avant d’être libéré sous condition en février dernier. La Cour suprême doit examiner ce mois-ci la légitimité de ce séjour hospitalier, qui pourrait potentiellement entraîner son retour en prison.