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Les cent premiers jours de Donald Trump à la présidence des États-Unis ont suscité une multitude de réactions et d’analyses. Pourtant, au-delà du tumulte médiatique quotidien, il demeure difficile de saisir pleinement les transformations profondes qui s’opèrent dans le pays.
Une remise en cause de l’équilibre des pouvoirs
Les spécialistes de science politique s’interrogent sur la volonté du président Trump de recentrer les pouvoirs exécutifs. Cherche-t-il à incarner un rôle semblable à celui d’un président sous la Cinquième République française, s’engageant vers un césarisme impérial ? Ou vise-t-il un régime autoritaire qui bafouerait la Constitution américaine ?
Par ailleurs, la collaboration d’Elon Musk dans la mise en place d’un dispositif technologique de surveillance de la population, notamment des opposants politiques, alarme. Ce système croise plusieurs bases de données, y compris celles du fisc, soulevant un sérieux enjeu de protection des libertés individuelles.
Un positionnement militaire et environnemental inquiétant
Sur le plan international, les États-Unis apparaissent désormais comme une menace militaire pour certains voisins et alliés. Des tensions sont palpables avec le Groenland, Panama ou le Canada, tandis que le message adressé aux membres de l’OTAN semble être un appel à l’autonomie face aux États-Unis.
Les interrogations demeurent quant à la possibilité d’une intervention militaire américaine au Groenland ou à la réaction américaine si la Russie attaquait un membre de l’OTAN tel que la Pologne. Enfin, la politique pro-énergies fossiles et le rejet des conclusions scientifiques par l’administration accroissent les risques liés au changement climatique et aux pandémies à l’échelle mondiale.
Les travailleurs américains sous pression
Au niveau domestique, les mesures prises par le gouvernement Trump frappent durement les salariés, notamment les travailleurs migrants et les fonctionnaires. Les politiques antidiscriminations sont remises en cause, marquant un net recul des protections sociales.
Selon l’Economic Policy Institute, l’administration s’attaque aux syndicats, aux négociations collectives, ainsi qu’aux agences étatiques chargées de la médiation et de la sécurité au travail. Des réductions budgétaires concernent également les actions contre le travail forcé et le travail des enfants, ce qui contraste avec la promesse initiale de soutenir l’emploi et les travailleurs.
Les enjeux des droits de douane et des investissements
Sur la scène internationale, Donald Trump utilise les droits de douane comme levier pour remodeler la mondialisation. Cependant, l’objectif stratégique reste flou : s’agit-il d’une politique protectionniste temporaire visant à renforcer la compétitivité industrielle, ou bien d’une politique prohibitionniste fermant le marché intérieur aux produits étrangers ?
Début mai, de véritables négociations ont entamé avec le Japon, l’Inde, la Chine et l’Union européenne pour réviser ces tarifs douaniers, envisagés pour ne pas durer.
Plus fondamentalement, l’enjeu porte sur la réorientation des investissements des multinationales vers le territoire américain. Les données des deux premiers mois montrent une baisse des investissements américains à l’étranger et une augmentation des investissements étrangers aux États-Unis. Il faudra toutefois du temps pour confirmer cette tendance.
Déréglementation financière sous haute tension
La bourse américaine, après une chute initiale, a retrouvé en début mai son niveau antérieur à l’annonce des tarifs réciproques. L’attention se porte désormais sur la dérégulation financière silencieuse conduite par l’exécutif et la Réserve fédérale (Fed).
L’ONG Better Markets dresse un bilan alarmant : licenciements dans les agences de régulation, exclusion des membres démocrates, nominations favorables à la dérégulation. Les poursuites contre des acteurs délictueux dans le secteur financier ont été stoppées, tandis qu’un cadre issu du monde des cryptomonnaies dirige aujourd’hui la Commission de régulation des produits financiers à risque (CFTC).
La Fed a également suspendu des directives essentielles destinées à limiter les risques liés aux cryptoactifs, comme l’obligation d’informer la banque centrale et d’établir un contrôle rigoureux des risques. Ce retour en arrière rappelle la dérégulation des produits financiers complexes qui avait conduit à la crise des subprimes.
Par ailleurs, ce secteur est suspecté de favoriser la corruption et l’enrichissement personnel au plus haut niveau de la famille Trump.
Un capitalisme de confrontation mondial
Dans ce contexte, Jerome Powell, président de la Fed, défend l’indépendance de l’institution en matière de politique monétaire, mais soutient également la déréglementation bancaire et financière en cours.
Donald Trump entend remodeler la mondialisation pour la servir aux intérêts américains à travers un capitalisme de confrontation. Cette posture, certes proche de celle de ses prédécesseurs, révèle un leadership mondial plus instable, générant des risques politiques, sécuritaires, économiques et financiers que le monde entier devra assumer.