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Kepler Interactive confirme son statut d’éditeur atypique du secteur en signant deux des plus gros succès de l’année, avec les jeux Expedition 33 et Rematch, une performance mise en avant à la Gamescom de Cologne où la société cherche déjà sa prochaine pépite.
Kepler Interactive : un éditeur fondé pour préserver la liberté créative
À Cologne (Allemagne), Kepler Interactive se présente comme un modèle alternatif dans une industrie confrontée à un ralentissement de la croissance. « Anticiper un succès comme +Expedition 33+, c’était quasiment impossible », confie à l’AFP Alexis Garavaryan, le PDG de Kepler, soulignant l’effet de surprise autour du jeu.
Lancée en 2021 après une levée de fonds de 120 millions de dollars du géant chinois NetEase, la structure est née de l’association de sept studios indépendants pour « mutualiser leurs ressources et connaissances », explique M. Garavaryan. La levée de fonds se traduit par un investissement d’un montant équivalent à environ 110,4 millions d’euros.
Concrètement, Kepler détient une part majoritaire dans chacune des entités fondatrices, notamment via des échanges de participations. Chaque studio est actionnaire de l’éditeur à la hauteur de sa valorisation et participe à la stratégie du groupe, ce qui, selon le PDG, permet de prendre « de meilleures décisions » en donnant voix au chapitre « à des développeurs qui ont déjà eu plusieurs jeux à succès ».
Basée à Londres et comptant une cinquantaine de personnes, la société édite également des productions de studios extérieurs au groupe. Contrairement à la plupart des éditeurs, qui financent un titre en échange d’un contrôle plus ou moins important, Kepler « n’impose jamais de décision aux équipes », affirme Alexis Garavaryan, misant sur une promesse forte : la liberté créative.
Deux succès : « Expedition 33 » et « Rematch »
Le premier succès notable est « Clair Obscur : Expedition 33 », premier titre du studio français Sandfall, qui a vendu quatre millions d’exemplaires et reçu une critique unanime, allant jusqu’à susciter un message de félicitations du président Emmanuel Macron. François Meurisse, cofondateur de Sandfall, explique : « On aimait bien leur vision, le côté +publisher+ (éditeur) monté par des développeurs qui savent ce que c’est que d’être un studio de développement ».
Kepler a engagé des acteurs comme Andy Serkis et Charlie Cox pour le doublage et a négocié un accord avec Microsoft pour que le titre figure dans l’abonnement Game Pass dès sa sortie — des opportunités rares pour des studios indépendants.
Le second grand titre est « Rematch », développé par le studio français Sloclap, le plus important de la galaxie Kepler avec 135 employés. Jeu de football dynamique et spectaculaire, Rematch a réuni plus de 5 millions de joueurs en un mois. Pour Pierre de Margerie, patron du studio, les deux succès partagent « une originalité de la proposition et une qualité de l’exécution ».
Stratégie : sélectivité et budgets maîtrisés
Kepler se veut très sélectif : « évalue 1 400 projets par an en moyenne et n’en signe que 2 ou 3 », explique Alexis Garavaryan. Le groupe se distingue en finançant « des projets aux budgets contenus » mais avec « une réalisation visuelle assez élevée et des mécaniques de jeux innovantes ».
Cette approche permet selon Pierre de Margerie de ne pas viser des ventes colossales pour atteindre la rentabilité : « La liberté créative est aussi liée au fait qu’on n’a pas besoin de vendre 5 ou 15 millions de copies pour être rentable ». Face aux blockbusters dont les coûts explosent, Kepler défend une approche « plus durable et rationnelle », remarque Rhys Elliott, expert au cabinet Alinea Analytics, qui considère le modèle comme « un vrai sujet d’étude pour l’industrie ».
Kepler compte aujourd’hui neuf studios, avec l’ajout de Tactical Adventures et The Gentlebros, mais n’envisage « aucun agrandissement » pour le moment. Pour Alexis Garavaryan, c’est un « message rassurant », « parce qu’il y a eu beaucoup d’excès dans notre industrie ces dernières années ».