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Bernard Benoliel propose une plongée approfondie dans l’univers complexe de Clint Eastwood, acteur et réalisateur emblématique, à travers un ouvrage imposant qui dépasse les cadres traditionnels de la biographie et de la monographie. L’auteur explore la double vie d’Eastwood, souvent réduit à l’image du cowboy réactionnaire, tout en mettant en lumière sa capacité à défier et reconstruire ce mythe américain.
Un portrait nuancé du mythe Clint Eastwood
Le livre s’ouvre sur une scène marquante : en 1954, aux studios Universal de Los Angeles, un jeune Clint Eastwood débute maladroitement sa carrière. À cheval entre cours de diction et observation des tournages, il apparaît à la fois jeune et déjà marqué par une certaine rudesse, image saisissante que souligne Bernard Benoliel, directeur de l’action culturelle à la Cinémathèque. Ce dernier, déjà auteur d’un premier ouvrage sur Eastwood aux éditions des Cahiers, signe ici une étude plus vaste, décomposée en segments temporels et thématiques qui s’entrecroisent avec fluidité.
Le style d’écriture, précis et professionnel, mêle érudition et une simplicité décontractée, susceptible de déplaire au personnage, qui incarne dans Gran Torino un vétéran amer au regard critique sur lui-même.
L’image ambivalente d’un homme et d’une icône
La couverture du livre illustre parfaitement cette dualité : un portrait en gros plan tiré du film Maître de guerre, où Eastwood apparaît renfrogné, le visage camouflé de maquillage militaire. Cette image sublime joue avec la caricature du viril conservateur, un rôle qu’Eastwood a tenu toute sa vie tout en tentant parfois de s’en échapper ou de la réinventer.
Cette ambivalence nourrit le malentendu persistant autour de son personnage dans l’Inspecteur Harry, souvent perçu à tort comme un symbole néofasciste, une idée véhiculée par une partie de la critique légendaire. Benoliel déconstruit habilement cette lecture simpliste, révélant la complexité d’un artiste en constante négociation avec son image publique.
Une œuvre entre mémoire et cinéma
L’ouvrage ne se limite pas à la trajectoire d’Eastwood, il plonge aussi dans l’histoire du cinéma américain et ses mutations culturelles. Les films du réalisateur sont analysés à travers le prisme de leur époque, révélant comment Clint Eastwood a incarné et parfois contesté les valeurs d’une Amérique en quête d’identité.
Cette approche thématique permet de comprendre la place singulière d’Eastwood dans le 7e art, entre mythe fondateur et figure insituable, oscillant entre nostalgie et modernité.