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Entre une retraite en Dordogne et un voyage au Bhoutan, Matthieu Ricard nous reçoit chez son cousin à Paris pour parler de voyages et d’altruisme. Des amies passent, des collaborateurs s’affairent dans la pièce voisine autour d’un projet de film et d’un livre à paraître. Une ruche créative, baignée de joie et de bonne humeur.
Rencontre avec Matthieu Ricard
Ce samedi 28 décembre, Ushuaïa TV proposera un numéro inédit du magazine *Les voyageurs solidaires* consacré à Matthieu Ricard. Devenu moine bouddhiste, interprète français du dalaï-lama, auteur et photographe à succès, il a fondé Karuna-Shechen, une ONG laïque et apolitique, pour lutter contre la pauvreté.
Pourquoi partir vivre en Inde à 20 ans ?
Matthieu Ricard partage son expérience : « Grâce à ma famille, j’ai eu la chance d’être confronté à des gens passionnants qui venaient régulièrement à la maison : des prix Nobel, intellectuels, artistes, scientifiques, explorateurs… J’admirais leurs talents, mais je n’avais pas forcément envie de leur ressembler en tant qu’être humain. Et puis un jour, à 20 ans, j’ai vu *Le Message des Tibétains*, le documentaire d’Arnaud Desjardins. J’ai tout de suite décidé de partir en Inde, en 1967. » Il raconte comment il a rencontré son maître spirituel, Kangyur Rimpoché, et comment cette rencontre a changé sa vie.
L’Inde : beauté et solidarité
Pour Matthieu Ricard, l’Inde est un pays fascinant malgré ses défis. « Quand on voyage dans les campagnes indiennes, c’est très beau et émouvant. S’émerveiller devant la beauté de la nature ou le regard d’un enfant, ça nous sort du cocon de l’individualisme exacerbé. » Il souligne la solidarité des villages et évoque des souvenirs touchants de sa vie dans les quartiers pauvres de Delhi.
Le paradoxe des pauvres heureux
Ricard aborde le sujet délicat de la pauvreté et du bonheur. « Ce comportement a été étudié, il s’appelle le paradoxe des pauvres heureux. Évidemment, cela ne veut pas dire qu’il faut les laisser pauvres. Mais ils vivent avec une certaine insouciance, sans être préoccupés par l’ambition. » Il insiste sur l’importance de contribuer au bien commun au-delà de ses intérêts personnels.
Le voyage altruiste
« Tout est parti du voyage initial qui m’a mené à vivre en Inde, au Népal, au Bhoutan… J’ai donné tout l’argent de mes livres à des projets humanitaires et ai créé la fondation Karuna-Shechen. » Aujourd’hui, cette fondation aide directement 500 000 personnes et un million indirectement chaque année. Ricard évoque les nombreuses initiatives mises en place pour lutter contre la pauvreté.
Définir l’altruisme
L’altruisme, selon Matthieu Ricard, est « l’intention d’accomplir le bien d’autrui ou de soulager sa souffrance. » Il note que cette intention doit être purement altruiste, sans recherche de récompense personnelle. Il décrit sa vision de l’altruisme dans son livre *Plaidoyer pour l’altruisme* et projette de partager des pratiques concrètes pour aider les autres.
Une prédisposition humaine à l’altruisme
Les recherches en psychologie comportementale montrent que les humains sont des êtres profondément coopérateurs, et que même les jeunes enfants de moins de 5 ans montrent cette tendance. Ricard souligne que malgré les actes de violence dans le monde, la majorité des gens se comportent de manière décente les uns envers les autres, ce qu’il appelle la « banalité du bien. »
Voyage et altruisme
Matthieu Ricard conclut que « le voyage peut développer l’altruisme et d’autres qualités humaines. » Il encourage chacun à cultiver ces qualités intérieures, car elles donnent sens à notre existence. Le voyage nous ouvre les yeux sur notre humanité commune.
Faire face à la souffrance des autres
Ricard aborde le sujet de la détresse empathique. « L’empathie affective nous mène à souffrir de la souffrance de l’autre. En revanche, la compassion est tournée vers l’autre et régénère nos forces. » Il distingue les deux concepts et insiste sur l’importance de la compassion dans l’aide aux autres.
La lumière de l’humanité
Matthieu Ricard explique pourquoi ses portraits photographiques montrent toujours des humains souriants : « Je n’ai jamais pu faire de photos sur la déchéance humaine. C’est un choix que j’assume. » Il cherche à transmettre une vision positive de la nature humaine à travers son art.
