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Lancement des banques numériques en Algérie : un bouleversement économique
Les autorités algériennes ont donné le feu vert à la création, l’approbation et l’exercice des activités des banques numériques, selon des conditions spécifiques définies par le « régime 24-04 », signé par le gouverneur de la Banque d’Algérie le 13 octobre dernier.
Conditions de fonctionnement des banques numériques
Selon le numéro 77 du Journal officiel – consulté par Al Jazeera – la création des banques numériques doit respecter les mêmes normes que celles des établissements financiers, sauf pour l’établissement d’une banque numérique en tant que filiale d’une banque étrangère. Voici les principales conditions :
- Il est nécessaire qu’un des actionnaires de la banque numérique soit une banque soumise à la législation algérienne, possédant une expertise dans les services bancaires en ligne, détenant au moins 30 % du capital, sans que cette participation soit supérieure à celle des autres actionnaires.
- La loi impose à la banque numérique d’ouvrir un siège social en Algérie à des fins administratives, avec la possibilité de l’utiliser pour traiter les réclamations des clients.
- La banque numérique n’a pas le droit d’ouvrir des agences autres que celles qualifiées de « numériques », qui fonctionnent intégralement de manière automatique, conformément à la réglementation.
- Elle est également interdite d’accorder des prêts aux grandes entreprises, à l’exception des prêts dus par les petites et moyennes entreprises devenues grandes.
Le régime permet à ces banques d’exercer toutes les opérations prévues par la législation monétaire et bancaire, notamment la réception des fonds du public, les opérations de crédit et les transactions bancaires relatives à la finance islamique, tout en mettant à disposition des clients tous les moyens de paiement.
Importance des banques numériques pour l’économie algérienne
Omar Haroun, expert en politiques monétaires, a qualifié le lancement des banques numériques d’étape essentielle dans le développement du système bancaire en Algérie, en raison de son impact sur les transactions en espèces et l’économie dans son ensemble.
Il a déclaré à Al Jazeera que les banques numériques encouragent l’utilisation des moyens de paiement électroniques, réduisant ainsi la demande de liquidités, notamment pour des achats importants comme les voitures et les biens immobiliers.
Haroun a souligné que la principale caractéristique des transactions numériques est la facilité d’accès rapide à divers biens et services, tout en évitant les crises de liquidité souvent observées dans les économies qui n’ont pas évolué vers le numérique. Les banques numériques devraient également réduire les coûts, tout en renforçant la sécurité de leurs opérations contre la fraude.
Ces établissements contribueront au développement de l’économie de la connaissance et des startups axées sur des produits d’innovation financière, tout en dynamisant les marchés boursiers, qui n’acceptent pas l’achat et la vente d’actions et d’obligations par le biais de liquidités.
Haroun a également signalé un effet positif sur le financement des finances publiques, notamment par l’émission de bons du Trésor pour combler un déficit budgétaire qui a atteint cette année 62 milliards de dollars.
Défis du secteur des banques numériques
Le principal défi auquel ces banques numériques sont confrontées concerne les mécanismes proposés pour transférer les fonds du marché parallèle, évalué officiellement à environ 90 milliards de dollars, vers les canaux officiels, dans un contexte où la culture financière repose fortement sur l’argent liquide.
Haroun a exprimé sa conviction que les banques numériques apporteront plus de transparence à l’économie locale, en réduisant les flux d’argent vers le marché parallèle, tout en favorisant une plus grande mobilisation de l’épargne et l’amélioration de la gouvernance financière sur le marché algérien.
Il a également noté qu’il y a actuellement 12,5 millions de comptes bancaires en Algérie, avec un solde total d’environ 3700 milliards de dinars algériens (environ 28 milliards de dollars). Si l’on inclut les dépôts, ce montant pourrait atteindre 7600 milliards de dinars (57 milliards de dollars), et il a prévu que le système financier numérique pourrait multiplier le nombre de comptes.
Perspectives d’avenir
Abdel Rahmane Ayya, directeur du laboratoire de développement de l’entreprise économique algérienne à l’Université Ibn Khaldoun, a indiqué qu’en dépit d’une volonté politique, la bureaucratie actuelle dans le secteur financier en Algérie complique la mise en place de banques numériques.
Il a également souligné la nécessité d’aborder le défi du transfert des capitaux de et vers l’étranger lors de la mise en œuvre du système des banques numériques. Selon l’expert, le rôle des banques numériques ne se limitera pas au financement des marchandises à l’importation et à l’exportation, mais s’étendra également au financement des études de faisabilité, du marché, et des frais de scolarité, entre autres services.
Il a conclu que l’utilisation des outils de paiement numérique contribuera sans aucun doute à augmenter la valeur des exportations en dehors du secteur des hydrocarbures. En 2023, les exportations algériennes ont atteint 55,6 milliards de dollars, tandis que les importations se sont chiffrées à 42,5 milliards de dollars, dont 4,78 milliards de dollars pour des services.