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Dans les bâtiments laissés à l’abandon par le régime du président syrien déchu Bachar al-Assad, les rebelles font chaque jour des découvertes stupéfiantes : des millions de pilules de captagon, un stimulant proche de la méthamphétamine, sont retrouvées et souvent détruites.
Des millions de pilules découvertes
L’effondrement du régime de Bachar al-Assad a libéré un stock immense de pilules. Dans des hangars et des bases militaires, les rebelles mettent au jour des quantités considérables de captagon, transformant la Syrie en un véritable narco-État.
« Après une fouille, nous avons compris que c’était une usine de Maher al-Assad (le frère de l’ex-président) et de son associé Amer Khiti », déclare Abou Malek al-Chami, un combattant de la coalition dirigée par les rebelles islamistes de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), qui a pris le contrôle de vastes territoires en Syrie en quelques jours.
Bachar al-Assad a été contraint de fuir à Moscou, son grand allié, tandis que son frère Maher, chef redouté de la Quatrième division de l’armée syrienne, reste introuvable. Ce dernier est suspecté d’être l’un des principaux acteurs du réseau de captagon syriens, une industrie estimée à plus de 10 milliards d’euros. Amer Khiti, quant à lui, est sous sanctions américaines et britanniques pour avoir facilité la production et le trafic de drogue.
Un moyen de pression diplomatique
Dans un hangar d’une carrière près de Damas, Abou Malek al-Chami continue son inspection. Les rampes du garage souterrain étaient utilisées pour charger des millions de pilules, habilement dissimulées dans des bobines de cuivre. « C’est difficile à décrire, il y avait des machines remplies de captagon prêtes à l’exportation », explique-t-il.
Des cartons pour masquer les chargements et des sacs de soude caustique, utilisés pour la méthamphétamine, sont toujours présents. Ce commerce illégal était devenu la principale source de revenus pour le régime d’Assad, alors que la Syrie était par ailleurs isolée sur la scène internationale.
Bachar al-Assad a exploité le trafic de captagon pour exercer des pressions sur les États du Golfe, en particulier l’Arabie saoudite, dans sa tentative de réintégrer la Syrie dans le monde arabe, selon le chercheur Hesham Alghannam du Carnegie Middle East Center. Dans le chaos de la guerre, le captagon a ainsi franchi les frontières syriennes.
Un marché florissant
Au Moyen-Orient, l’Arabie saoudite est le plus grand marché du captagon. Cette drogue est prisée tant par l’élite que par les classes modestes, qui l’utilisent comme stimulant dans un pays où l’alcool est fortement réglementé.
Cette addiction a permis au régime de rétablir ses relations avec la Ligue arabe en 2023. Peu avant la chute de son régime, Assad avait été accueilli à bras ouverts à Abou Dhabi et à Riyad.
Malgré cette réintégration, la production de captagon continue à un rythme effréné. À l’aéroport militaire de Mazzeh, près de Damas, des combattants de HTS ont récemment incendié des milliers de comprimés retrouvés dans des installations militaires.
Vers une interdiction
Dans un autre bâtiment de l’armée de l’air, des sacs de pilules s’accumulent, tous liés à Maher al-Assad. Un combattant de HTS, Khattab, affirme : « En entrant, nous avons découvert une quantité énorme de captagon et avons tout brûlé ».
HTS projette de remplacer le régime d’Assad avec un gouvernement intérimaire, promettant d’arrêter la production et l’exportation de captagon, un commerce qui surpassait les revenus de toutes les exportations légales de la Syrie. Cependant, la tâche semble ardue dans un pays dont l’économie est en ruine et soumis aux sanctions internationales.