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Nouveau partenariat politique au Maroc : vers des élections anticipées ?
Rabat – Le jeudi dernier, les dirigeants de trois partis politiques marocains ont signé un protocole de création d’une alliance politique appelée « le bloc populaire ». Cette coalition, qui regroupe le Parti de la performance populaire, le Parti marocain libre et le Parti national démocratique, vise à présenter une alternative populaire répondant aux aspirations des Marocains et à restaurer l’image de la scène politique marocaine, comme ils l’ont annoncé.
Selon le protocole de création, dont Al Jazeera a pris connaissance, cette alliance est née d’une situation de stagnation sans précédent qui affecte la scène politique. Le protocole décrit la situation comme marquée par un « recul tangible dans les missions de représentation et d’encadrement des différentes institutions traditionnelles, une montée du secteur politique non structuré, et la prolifération de l’encadrement aléatoire ». Cela crée un danger qui approfondit le fossé de tension entre les citoyens et les institutions.
Ce bloc entend renforcer les canaux de communication avec les acteurs politiques, civils et les personnalités nationales, afin de créer des ponts de dialogue constructif entre les mécanismes de la démocratie représentative et la démocratie participative.
Dynamique politique après une stagnation
Lors de l’annonce de la création du bloc le week-end dernier, Mohamed Ouzine, secrétaire général du Parti de la performance populaire, a déclaré que cette initiative ne doit pas être réduite à une simple étape électorale, mais qu’elle est plutôt une réaction à la convergence des visions et des idées de plusieurs acteurs.
Il a précisé que ce bloc vise à dynamiser une politique marocaine qui n’est pas dans les meilleures conditions. Ce partenariat, annoncé par le Parti de la performance populaire qui fait partie de l’opposition, fait suite à l’annonce de deux autres partis d’opposition, le Parti de l’Union socialiste des forces populaires et le Parti du progrès et du socialisme, qui ont repris leur coordination l’été dernier afin d’unifier la gauche marocaine.
Cependant, des analystes politiques considèrent ces mouvements comme des préparatifs partis pour les élections législatives prévues l’année prochaine, les partis d’opposition et de la majorité ayant commencé à reconstruire leurs relations et alliances pour améliorer leur position sur la carte politique.
Dans ce contexte, l’analyste politique Hafid Zouhari estime que l’initiative des trois partis s’inscrit dans une dynamique politique qui caractérise la scène politique marocaine après une « quasi-stagnation » durant l’actuelle législature, en raison de la force numérique et électorale de la coalition gouvernementale qui a fait d’elle la puissance dominante sur la scène politique.
L’alliance gouvernementale se compose de trois partis : le Rassemblement national des indépendants, le Parti de la justice et du développement et le Parti de l’Istiqlal, qui détiennent 269 sièges à la Chambre des représentants sur un total de 395.
Impact varié
Le Parti de la performance populaire a obtenu 28 sièges à la Chambre des représentants lors des élections législatives de 2021, et après la formation du gouvernement, il s’est aligné sur l’opposition, se classant juste après le Parti de l’Union socialiste des forces populaires (34 sièges).
Zouhari souligne que le Parti de la performance populaire cherche à s’imposer comme le leader de l’opposition face au déclin et à la fragmentation des autres partis politiques.
Il mentionne également que les élections sont souvent précédées de mouvements politiques, prévoyant l’émergence d’autres alliances et coalitions entre les autres partis, dans le but de dynamiser la vie politique et de regagner la confiance des citoyens. Il évoque ici la coordination annoncée entre le Parti de l’Union socialiste et le Parti du progrès et du socialisme.
D’autre part, Abdel Rahim Al-Alam, professeur de droit constitutionnel à l’Université Cadi Ayyad à Marrakech, estime que l’alliance entre des partis ayant une base électorale significative peut avoir un impact si ces partis partagent une idéologie et une conviction politique. Il considère que l’alliance entre l’Union socialiste et le Parti du progrès et du socialisme s’inscrit dans ce cadre, ce qui pourrait inciter ceux qui se sont éloignés de la vie politique au sein de la même famille idéologique à revenir à leur activité politique ou à encourager d’autres organisations et partis de gauche à rejoindre l’alliance.
Selon Al-Alam, « l’alliance entre l’Union et le progrès pourrait avoir un impact sur la réalité politique, en aidant les deux partis à rassembler les fragments de la gauche ».
En revanche, il pense que le bloc constitué par le Parti de la performance populaire, bien qu’il cherche à exercer une influence sur la scène politique, ne pourra pas le faire, car ce parti ne bénéficie pas d’une base électorale importante et appartient à ce que l’on appelle « les partis des notables », qui dépendent de personnalités influentes sur le plan électoral.
Il ajoute que les deux partis alliés ne sont pas représentés au parlement et leur base populaire est peu visible. « Cette alliance a plus un aspect symbolique qu’une stratégie véritable, visant à créer une publicité politique et médiatique pour le Parti de la performance populaire tout en sauvant les deux autres partis du risque d’extinction de la vie politique ».
De leur côté, les partis de la coalition gouvernementale ont évoqué la possibilité de coopérer entre eux en préparation des élections de 2026, une information rapportée par des médias marocains comme une des idées clés discutées lors d’une réunion de la majorité gouvernementale l’été dernier, sans préciser la forme et les limites de cette coopération.
Concernant la capacité des alliances et coalitions formées par les partis d’opposition à faire face à la coalition de la majorité qui gouverne, Al-Alam pense que les initiatives de l’opposition ne sont pas principalement dirigées contre l’alliance majoritaire, mais plutôt vers la rue et vers leurs propres partis, afin de susciter une prise de conscience politique pour éviter que ces partis ne deviennent marginaux, surtout après le déclin constant de leurs sièges parlementaires ces dernières années.