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Réinventer l’Afrique : le premier roman de F. Sar à Marrakech
Marrakech – « L’Afrique n’a ni à suivre personne ni à se plier à des chemins tracés, mais doit avancer sur la voie qu’elle a choisie. » Avec ces mots, l’écrivain sénégalais F. Sar présente son nouvel ouvrage « Afrotopia », qui esquisse les contours d’une civilisation plus profonde et plus consciente des besoins humains pour vivre avec dignité. Ce livre a été rendu accessible au lecteur arabe grâce à une traduction soignée par l’écrivain marocain Nourredine Derrar.
Une Afrique autonome et culturelle
Dans une interview accordée à Al Jazeera, Sar souligne que l’Afrique, qui comptera d’ici moins de quatre décennies un quart de la population mondiale, doit se concentrer sur la culture et réaliser une révolution profonde, constituant une base solide pour son avenir.
Avec un enthousiasme manifeste, il déclare : « Nous devons nous efforcer de garder la lumière allumée partout et ne pas emprunter le même chemin que l’Occident, basé sur l’exploitation des ressources d’autrui et la soumission. Il est impératif que nous contribuions à une civilisation plus consciente, plus respectueuse de la dignité humaine et de l’intérêt général de tous. »
Le festival du livre africain à Marrakech
F. Sar a participé au Festival du livre africain à Marrakech, qui s’est déroulé du 30 janvier au 2 février, aux côtés d’une élite de penseurs et d’écrivains, dans le but de redéfinir l’image du continent dans un monde en mutation, en tenant compte de l’identité et de la mémoire collective.
La romancière française Valérie Maran Lamilly a déclaré : « L’Afrique nous enseigne beaucoup, peut-être plus que ce que nous attendions, elle nous apprend à vivre en tant qu’êtres humains, comme nous étions, et non comme d’autres voudraient que nous soyons. »
La mémoire collective et l’identité
Lamilly, dont les œuvres sont liées au continent africain, souligne que la mémoire collective nous aide à nous souvenir du passé, non pas pour y rester bloqués, mais pour en tirer des leçons et établir des liens durables qui favorisent la prospérité de nos sociétés contemporaines.
De son côté, l’historien Mamadou Diouf met en avant l’importance de la perception de soi pour l’homme africain et comment celle-ci s’aligne avec les enjeux du continent dans sa quête de l’avenir. Cette perception détermine la manière dont l’Afrique interagit avec le monde extérieur et permet une ouverture sans aliénation, tout en intégrant diverses narrations historiques de manière équitable.
Les défis du passé et la restitution des richesses
Les interventions lors de ce festival ont captivé le public de Marrakech, abordant les tragédies récentes et passées subies par l’Afrique, ainsi que les richesses et les ressources humaines qui ont été exploitées par l’Occident pour son propre avancement matériel et ses guerres.
Ali Benmakhlouf, écrivain et académicien marocain, affirme que cet intérêt n’est pas une quête de victimisation historique pour l’homme africain, mais plutôt un droit historique pour récupérer des trésors africains d’Europe et d’Amérique, ouvrant la voie à la construction d’un patrimoine africain qui préserve les savoirs locaux, en particulier ceux qui sont perdus.
Un nouveau regard vers l’Afrique
Sar souligne l’importance de la restitution de certaines œuvres d’art de l’État du Bénin par la France, un événement chargé d’émotion qui souligne l’importance de bâtir une Afrique nouvelle, fondée sur ses propres ressources et connaissances.
Alors que certains estiment que parler des tragédies passées pèse sur les générations futures, le dramaturge rwandais Dorsey Rogamba, auteur de « Rwanda… Lettres aux absents », insiste sur l’importance de raviver la mémoire collective pour les générations montantes, affirmant que c’est également un hommage à toutes les victimes.
Un lien complexe avec ses origines
Être né en dehors du continent tout en ayant des racines africaines impose une grande responsabilité à un penseur ou écrivain pour défendre et promouvoir l’Afrique sur la scène internationale, en cherchant toujours ce qui unit sa propre histoire à celle de ses racines, dans le but d’établir des liens humains globaux.
Rafaël Reed, une jeune écrivaine d’origine togolaise, partage son expérience au festival, notant que comprendre ces relations lui confère un sentiment d’appartenance au monde, surtout face aux défis quotidiens.
Une inspiration culturelle
Chaque écrivain puise son inspiration de son héritage culturel, abordant des sujets liés à son identité et son histoire, cherchant à contribuer à la construction de sa propre narration tout en l’intégrant dans des récits collectifs.
Ali Benmakhlouf explique que les rencontres culturelles à Marrakech visent principalement à offrir au continent, par le biais de ses écrivains et penseurs, une vision claire pour réécrire l’histoire de l’Afrique, en particulier l’histoire locale qui s’illustre à travers les œuvres de penseurs comme l’écrivain marocain Al-Mokhtar Soussi.
Le pouvoir de la littérature africaine
Nin Simon Vallet, jeune romancier ivoirien et auteur de « Ces soleils brûlants », souligne que l’écrivain africain a la force de devenir un leader pour son peuple et son continent, étant mieux placé pour défendre leurs intérêts sur la scène mondiale.
En clôturant cet événement, F. Sar réalise qu’il quittera Marrakech transformé, rempli d’un désir renouvelé de démontrer la richesse d’idées de l’Afrique, ainsi que la singularité de son patrimoine, de ses arts et de sa littérature.