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L’odorat est un sens fondamental qui influence notre santé, nos émotions et nos interactions sociales. Souvent sous-estimé et peu exploré, ce sens joue pourtant un rôle majeur dans notre quotidien. Les recherches récentes mettent en lumière son importance, notamment face aux conséquences liées à la perte d’odorat.
Un sens puissant et précoce
Longtemps considéré comme le moins essentiel des cinq sens, l’odorat humain révèle en réalité une capacité remarquable. Nous pouvons distinguer plus de 10 000 molécules différentes, et leurs combinaisons permettent d’identifier des milliards de nuances olfactives. Notre nez abrite environ 400 types de récepteurs olfactifs, chacun étant spécialisé dans la reconnaissance d’odeurs précises.
Contrairement aux idées reçues, l’odorat se développe très tôt dans la vie. « Les neurones olfactifs sont visibles dès la fin du deuxième trimestre de grossesse », indique le professeur Benoist Schaal du Centre des Sciences du Goût au CNRS à Dijon. Une récente étude démontre même que les fœtus réagissent différemment selon les aliments consommés par leur mère, soulignant l’importance de ce sens dès la vie intra-utérine.
Un lien direct avec le cerveau
Le système olfactif est étroitement connecté aux parties du cerveau qui gèrent les émotions et la mémoire. « Il y a un lien direct très rapide entre le nez, le cerveau et les centres de mémoire », explique Hirac Gurden, neurobiologiste au CNRS à Paris. Cette connexion explique pourquoi certaines odeurs peuvent raviver des souvenirs anciens avec une intensité particulière.
Les conséquences de la perte ou de la distorsion de l’odorat
La perte d’odorat, appelée anosmie, ou sa distorsion, la parosmie, peuvent profondément affecter la qualité de vie. Sonia, qui souffre de parosmie depuis quatre ans à la suite du Covid-19, témoigne : « Deux mois après, tout avait pris des saveurs bizarres. Le melon, j’ai l’impression de manger une savonnette. La mandarine, c’est comme de l’essence. Et le poulet, c’est comme si la viande était moisie. »
Ces troubles ont des répercussions sociales et émotionnelles importantes. « Je me suis enfermée. Je ne participe plus à rien. J’ai sauté des mariages, des baptêmes, des anniversaires. Ça fait quatre ans que je ne rentre plus dans un restaurant », confie-t-elle.
Hirac Gurden souligne également l’impact psychologique : « Le sens olfactif est directement lié aux centres qui codent les émotions, le plaisir et les souvenirs. Si on empêche l’entrée de ces informations olfactives, cela conduit à une fragilité cérébrale qui peut déclencher la dépression. »
La parosmie peut aussi engendrer des situations difficiles, comme l’illustre Sonia : « Un matin, dans le bus, une dame avait une odeur de cuisine sur elle. C’était insoutenable, ça m’arrive droit dans l’estomac. Je dois partir parce que je dois vraiment vomir. »
Un potentiel thérapeutique prometteur
L’olfaction ouvre des perspectives intéressantes dans le domaine médical, en particulier pour les troubles cognitifs tels que la maladie d’Alzheimer. Certaines maisons de retraite médicalisées organisent des ateliers olfactifs pour stimuler la mémoire et le cerveau des résidents. « Avec l’olfaction, on cherche à avoir un réveil de mémoire autobiographique », explique Estelle Rassat, olfactothérapeute.
Longtemps négligé, l’odorat est aujourd’hui reconnu comme un sens fascinant aux multiples facettes. Son étude approfondie pourrait favoriser le développement de nouvelles approches thérapeutiques et enrichir notre compréhension du lien entre l’humain et son environnement.