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Égypte : Réactivation du projet social « التكية الإسلامية » pour lutter contre la pauvreté

by Sara
Égypte : Réactivation du projet social « التكية الإسلامية » pour lutter contre la pauvreté
Égypte

En Égypte, un projet social historique renaît sous une forme modernisée. La ministre égyptienne de la Solidarité sociale, le Dr Maya Morsi, a annoncé l’étude de la réactivation du projet « التكية الإسلامية », visant à apporter une aide durable aux plus démunis.

Ce projet a pour objectif de fournir quotidiennement des repas gratuits aux populations en situation de grande pauvreté ou sans source de revenu stable, en partenariat avec des organisations de la société civile et des associations caritatives. Un contrôle rigoureux garantira la transparence et l’efficacité dans la distribution des services.

Cette initiative intervient suite au succès de la campagne « أهل الخير للإطعام » lancée durant le mois sacré de Ramadan, qui a permis de distribuer plus de 52 millions de repas grâce à la coopération de multiples acteurs communautaires. Selon le Dr Mohammed Al-Okbi, assistant de la ministre pour la communication stratégique, le projet « التكية الإسلامية » reprend le principe historique d’offrir des repas chauds et soignés aux nécessiteux, rappelant ainsi le rôle traditionnel de la « takiya ».

La mise en œuvre à grande échelle de ce projet nécessite une coordination étroite avec plusieurs ministères, notamment ceux du développement local, de la santé et des affaires religieuses, notamment pour l’utilisation des infrastructures relevant des waqfs. L’objectif affiché est d’assurer un service au citoyen égyptien, avec pour ambition première sa satisfaction.

Nouveaux regards sur la lutte contre la pauvreté

Le Dr Walid Hindi, expert en santé mentale, considère que l’augmentation des taux de pauvreté exige des solutions durables plutôt qu’éphémères. Il voit dans le renouveau du concept de « التكية » une tentative dans cette direction, tout en émettant des réserves quant à son appellation, qu’il juge porteuse d’un « échec implicite ». Il insiste notamment sur la nécessité d’éviter toute connotation religieuse dans ces initiatives sociales, rappelant que les communautés chrétiennes ont également leurs propres institutions caritatives actives depuis des décennies.

Selon lui, le terme « التكية » est connoté dans la conscience populaire égyptienne par les réunions de dhikr soufi et une forme de retrait de la vie active, des notions qui s’opposent aux valeurs modernes de travail et de productivité. Il souligne en outre que l’aide aux pauvres doit dépasser la simple distribution alimentaire pour inclure des programmes d’éducation, de formation et de création d’emploi, en cohérence avec la politique nationale de développement durable.

Le Dr Hindi appelle également à moderniser les modalités de distribution des aides, par exemple via la soumission électronique des demandes, afin de préserver la dignité des bénéficiaires.

Un héritage culturel et historique

Le Dr Abdel Rahim Reyhan, expert en archéologie et membre du comité de l’histoire au Conseil supérieur de la culture, invite à redonner aux takiyas leur rôle social et de service d’antan. Originellement, ces établissements étaient des refuges pour les pauvres et les voyageurs, avant de se transformer en centres dédiés au dhikr soufi. Il rappelle que les takiyas sont des institutions religieuses majeures datant de l’époque ottomane, issues de la région de l’Anatolie et répandues dans les provinces ottomanes ainsi que dans les sultanats moghols et en Perse avant l’ère safavide.

À l’origine, ces lieux accueillaient des soufis isolés dans la méditation mais ont évolué pour offrir aussi des soins médicaux, remplissant des fonctions similaires aux bimaristans ayyoubides et mamelouks en Égypte, avant que leur rôle ne diminue à l’arrivée des Ottomans.

Le mot « takiya » vient du persan signifiant « lieu de repos » ou « soutien ». Progressivement, ces établissements sont devenus des refuges pour les pauvres, les voyageurs, voire les mourants, financés principalement par des waqfs ou des donations de hauts dignitaires.

Un appui social structuré

Durant la période ottomane, les takiyas ont accueilli des chômeurs, notamment des migrants ottomans dans des provinces prospères comme l’Égypte et la Syrie. Les habitants, appelés dérviches, vivaient grâce aux allocations mensuelles fournies par les takiyas. Ces institutions étaient entretenues par des fondations établies par les sultans ottomans, les émirs mamelouks et d’importantes familles égyptiennes, assurant un système intégré de protection sociale.

Dans ce contexte, le Dr Reyhan soutient que la réhabilitation des takiyas selon une vision contemporaine peut s’intégrer dans les stratégies de développement, sous réserve que leur gestion soit adaptée aux exigences de transparence et d’équité sociale. Il insiste également sur l’ouverture des takiyas à tous, sans distinction religieuse ou sociale, pour en faire un maillon d’un réseau de protection sociale plus large.

source:https://www.aljazeera.net/lifestyle/2025/7/15/%d8%b9%d9%88%d8%af%d8%a9-%d8%a7%d9%84%d8%aa%d9%83%d9%8a%d8%a9-%d8%a7%d9%84%d8%a5%d8%b3%d9%84%d8%a7%d9%85%d9%8a%d8%a9-%d9%85%d8%b4%d8%b1%d9%88%d8%b9-%d8%a7%d8%ac%d8%aa%d9%85%d8%a7%d8%b9%d9%8a

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