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La confiance en la science est souvent mise à l’épreuve par des résultats qui remettent en cause des croyances profondément ancrées. Les découvertes scientifiques qui semblent en contradiction avec nos valeurs peuvent déclencher des réactions de défense puissantes. En tant que chercheur travaillant sur des sujets controversés, j’ai souvent constaté que les réactions négatives augmentent lorsque je présente des résultats qui interrogent les différences entre les sexes ou les influences génétiques sur les capacités cognitives, comparativement à d’autres sujets moins sensibles.
Dissonance cognitive et défenses psychologiques
Ce phénomène a été théorisé dans les années 1950 par Leon Festinger, qui a introduit le concept de « dissonance cognitive ». Ce terme désigne l’inconfort ressenti lorsqu’un individu est confronté à de nouvelles informations qui entrent en conflit avec ses croyances existantes. Pour résoudre cette dissonance, les individus ont tendance à adopter des stratégies cognitives pour rejeter ces nouvelles informations afin de protéger leurs croyances.
Une étude sur la « chicanerie cognitive »
Des chercheurs en psychologie de l’université de Pennsylvanie ont récemment réalisé une série d’études sur ces mécanismes, qu’ils appellent « chicanerie cognitive ». Les participants ont lu des résumés fictifs d’études scientifiques, présentés sous deux versions légèrement différentes. Un résumé stipulait que les chercheurs hommes sont de meilleurs mentors que les femmes, tandis que la version contrôle inversait les rôles. Les chercheurs ont observé que la première version, jugée plus dérangeante, suscitait davantage de critiques.
Pour évaluer les réactions, les participants devaient choisir parmi divers commentaires critiques. Ces commentaires incluaient des procédés rhétoriques identifiés par Arthur Schopenhauer, tels que le raisonnement de l’homme de paille et l’argument ad personam, visant à discréditer l’auteur des résultats.
Résultats et implications
Les résultats ont montré que les participants étaient plus enclins à critiquer la version dérangeante des résumés, indépendamment de la qualité de la recherche. Cela a mis en lumière un usage fallacieux des arguments critiques, démontrant que le désaccord semblait davantage lié à la nature dérangeante des résultats qu’à leur validité scientifique.
Il est également important de noter que ces biais peuvent fonctionner dans les deux sens. Lorsque des résultats scientifiques soutiennent des croyances déjà établies, il est crucial de rester vigilant, car cela peut altérer notre jugement critique.
La nécessité de la remise en question
Ces résultats soulèvent des inquiétudes concernant l’adhésion de la population à la démarche scientifique. Celle-ci n’est pas automatique et peut être influencée par les croyances personnelles. Les résultats scientifiques qui renforcent nos certitudes sont souvent acceptés sans réserve, tandis que ceux qui les contestent sont rejetés, parfois sans fondement. Or, l’essence même de la science réside dans sa capacité à interroger nos croyances et à évoluer, même lorsque cela implique de mettre en cause des idées bien ancrées.
De plus, il a été observé que les participants se montraient parfois favorables à la censure des résultats qui les dérangent. Une étude complémentaire a révélé que certains chercheurs choisissent de s’auto-censurer, craignant des répercussions pour avoir publié des résultats jugés délicats.
Conclusion sur la valeur de la science
Ces travaux soulignent l’importance de rappeler que la science doit fournir des réponses fiables, même si elles ne correspondent pas à nos attentes. Si le monde était conforme à nos désirs, la science perdrait tout son sens, car elle est avant tout une quête de vérité, peu importe à quel point elle peut être dérangeante.