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Convaincus de leur « bonne foi », ceux qui voient dans l’Etat de droit un obstacle à l’accomplissement de la volonté populaire et ceux qui le défendent ne peuvent que s’affronter, postule la directrice éditoriale de l’Institut Montaigne dans une tribune au « Monde ». Cette tribune interroge le sens et l’avenir de la démocratie à l’aune d’événements politiques récents, et suggère que la fracture principale pourrait dorénavant se situer au sein même des démocraties.
Pourquoi la démocratie se divise : tendances observées en 2025
Publié aujourd’hui à 06h00 — Temps de lecture 3 min. — la tribune tire les leçons d’un premier semestre politique particulièrement intense. Les mois écoulés ont été marqués, selon l’auteure, par un rythme soutenu alimenté par la personnalité de Donald Trump et par des épisodes politiques européens qui ont montré des inflexions importantes dans le discours public.
La directrice éditoriale pointe plusieurs exemples récents qui, ensemble, illustreraient un mouvement plus large : la condamnation de Marine Le Pen, reconnue coupable de détournement de fonds publics en mars ; l’investiture du président polonais Karol Nawrocki ; et la trajectoire politique de l’Italie sous Giorgia Meloni. Ces faits sont présentés comme des éléments d’une dynamique partagée, qui conduit à une redéfinition de la frontière entre régimes fondés sur l’État de droit et autres systèmes.
Autrefois, note la tribune, il existait une démarcation relativement identifiable entre démocraties — reposant sur des institutions et des contre‑pouvoirs — et régimes autoritaires ou illibéraux. Même si le nombre et la qualité des démocraties avaient tendance à diminuer, on pouvait encore les repérer, les comparer et les classer. Aujourd’hui, insiste l’auteure, la coupure s’opère désormais à l’intérieur des démocraties elles‑mêmes, parce que leur définition ne fait plus consensus.
Aux États‑Unis et en Europe : des visions opposées du pouvoir
La tribune identifie l’Amérique de Donald Trump comme l’exemple le plus manifeste de ce que l’on pourrait appeler un « schisme démocratique », ou l’apparition de « démocraties parallèles ». D’un côté, le camp MAGA (« Make America Great Again ») défend, selon l’auteure, une « vision littérale et intégrale » du mandat populaire : le pouvoir conféré par le peuple ne devrait rencontrer « aucune entrave » et les mécanismes de contrôle seraient considérés comme des freins à la réalisation de la volonté populaire.
Cette posture s’accompagne, poursuit la tribune, d’une promotion d’une liberté d’expression sans limite et d’une critique virulente des institutions considérées comme hostiles, que certains désignent sous l’expression « Etat profond ». En face, la lecture dite « libérale » insiste sur la nécessité des contre‑pouvoirs, de l’indépendance de la justice, et de la protection des droits individuels et des minorités. Dans cette perspective, la liberté d’expression est défendue, mais la loi doit en fixer les limites.
L’auteure montre que la polarisation ne se limite pas aux États‑Unis : en Europe, des décisions judiciaires, des investitures et des prises de parole publiques ont alimenté des débats comparables sur la primauté du droit, la place des contre‑pouvoirs et la légitimité des institutions.
Implications et constats pour la vie politique
La thèse centrale de la tribune n’est pas une prédiction, mais un constat : la conflictualité actuelle ne témoigne pas seulement d’un affrontement inter‑régimes (démocraties contre autoritarismes), mais aussi d’une lutte interne à la démocratie sur sa propre définition. Cette remise en question génère des configurations politiques où des majorités populaires revendiquent l’absence d’entraves institutionnelles, tandis que d’autres acteurs rappellent l’importance des garde‑fous institutionnels.
Sur le plan démocratique, l’auteure met en lumière deux conséquences concrètes : la difficulté à maintenir un consensus sur les règles du jeu politique, et la montée d’un discours qui légitime le contournement des mécanismes judiciaires ou administratifs au nom d’une volonté populaire considérée comme souveraine. Ces enjeux sont présentés comme centraux pour comprendre les choix et les débats qui structureront les mois et années à venir.
La tribune invite ainsi à un examen attentif des tensions actuelles entre légitimité populaire et État de droit, sans proposer de solution unique mais en soulignant l’enjeu démocratique majeur posé par ces divergences de perception.
Exemples cités et portée des événements récents
Parmi les événements contemporains mentionnés, la condamnation en mars de Marine Le Pen pour détournement de fonds publics est citée comme un cas ayant suscité des réactions politiques et discursives importantes. De même, l’investiture de Karol Nawrocki en Pologne et la trajectoire politique de l’Italie sous la direction de Giorgia Meloni figurent comme exemples européens illustrant l’évolution des discours sur la justice et les contre‑pouvoirs.
Ces éléments servent à étayer l’idée que, loin d’être confinées à des régimes non démocratiques, les dynamiques de remise en cause des normes et institutions peuvent apparaître au cœur même de pays se présentant comme des démocraties.