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La crise du logement demeure le principal défi pour les Espagnols et offre des pistes d’analyse utiles pour la France en matière de logement abordable et de loi logement. Dans une interview analysée ici, José María Aguilera rappelle qu’un problème commun peut devenir le terrain de différenciations idéologiques marquées. Le débat oppose deux recettes très différentes, portées par deux approches politiques distinctes.
Constats : un problème partagé et des solutions idéologiques opposées
«L’accès à la vivienda est le principal problème des Espagnols.» Un problème commun qui, a priori, ne comprend pas d’idéologie, mais pour lequel s’appliquent deux recettes absolument opposées et marquées, précisément par un fort composant idéologique. Le gouvernement de Pedro Sánchez a misé sur l’interventionnisme. Dans les zones tendues, le loyer est plafonné; les logements vacants sont imposés davantage; les étrangers acheteurs sont soumis à des prélèvements plus lourds; et les obstacles urbanistiques traditionnels sont maintenus, freinant les promoteurs privés. Le résultat est clair: la sécurité des prix dans un système de libre marché s’est émoussée et les prix, notamment les loyers, ont continué de grimper.
Selon Aguilera, «¿Ha tenido éxito?» La réalité est sans appel: le logement demeure le principal problème des Espagnols et les prix restent élevés, en particulier pour la location. Deux recettes opposées coexistent, sans que l’une ne résolve durablement la question. Le contraste entre interventionnisme et libéralisation illustre bien les dilemmes de politique publique face à une demande soutenue et une offre insuffisante.
La réponse de l’Andalousie : une loi du logement axée sur la collaboration public-privé
L’exécutif régional dirigé par Juanma Moreno vient de présenter sa nouvelle Loi de Vivienda, issue du décret-loi adopté en mars et dont le processus parlementaire commence aujourd’hui au Conseil de Gouvernement. La recette est radicalement différente et opposée à celle de Madrid.
- Favoriser les pouvoirs locaux et les promoteurs en privilégiant la collaboration public-privé.
- Créer une bolsa de suelo, une réserve foncière dédiée au logement abordable.
- Établir des mesures pour flexibiliser les usages des sols tertiaires, des bureaux et des sols touristiques.
- Mettre en place des plans de vivienda et un portail dédié pour informer sur ce marché.
- Réduire la bureaucratie tout en renforçant la sécurité juridique et opérationnelle des projets.
- Objectif ultime : augmenter l’offre de logements pour compenser la forte demande et faire baisser les prix.
Cette loi autonómica se distingue par son large soutien et son consensus fort, s’appuyant sur les échecs des expériences antérieures et en évitant une approche purement fiscale sans accords entre les parties prenantes. Le temps dira quelle formule est la plus adaptée, mais l’orientation privilégie des mécanismes de marché encadrés par une coordination publique renforcée.
« Menos burocracia, más seguridad », résume l’approche andalouse: moins de contraintes administratives, davantage de garanties pour construire. Cette démarche mise sur l’efficacité opérationnelle et la transparence pour stimuler une offre capable de répondre à la demande et d’infléchir la courbe des prix.
Quelles leçons pour la France ?
À l’échelle française, ces expériences offrent plusieurs enseignements pour la crise du logement et la loi logement. L’idée générale consiste à rapprocher les acteurs publics et privés, tout en réduisant les obstacles administratifs et en sécurisant les résultats concrets pour les locataires et les acheteurs.
- Favoriser des partenariats public-privé robustes pour accélérer les projets de logements abordables, en particulier dans les zones tendues.
- Mettre en place une réserve foncière dédiée au logement abordable afin de libérer rapidement des terrains constructibles.
- Simplifier les procédures et clarifier les règles d’urbanisme pour réduire les retards et les coûts des projets.
- Créer des portails d’information destinés à suivre les programmes et à informer les citoyens sur l’offre disponible.
- Éviter une approche purement punitive sur le plan fiscal et rechercher des mécanismes de consensus entre les différents acteurs du secteur.
En somme, l’option française pourrait s’inspirer d’un équilibre entre incitations et cadre réglementaire, afin d’augmenter l’offre sans provoquer d’incertitudes supplémentaires, et en plaçant la sécurité juridique et l’efficacité au cœur des projets de logement abordable et de loi logement.
Dans tous les cas, les résultats dépendront de la mise en œuvre concrète sur le terrain et de la capacité à réunir les acteurs autour d’un objectif commun: offrir un logement abordable suffisant pour répondre à une demande constante, et ce, sans retomber dans des dynamiques idéologiques qui freinent l’investissement et la construction.
