Home HistoireLe pont de pierre de Tours : une révolution urbaine au XVIIIe siècle

Le pont de pierre de Tours : une révolution urbaine au XVIIIe siècle

by Sara
France

Retrouvez les grandes dates marquantes de l’histoire de la Touraine à travers l’ouverture du pont de pierre Tours, racontée par Cédric Delaunay, agrégé d’histoire-géographie, professeur au lycée Descartes à Tours et auteur de Grandes dates de Touraine aux Éditions Nouvelle République.

Un trajet périlleux entre Paris et Tours au milieu du XVIIIe siècle

Jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, le voyage de Paris à Tours reste pénible. De Paris à Orléans, la route royale ne présente pas de difficultés majeures, mais la suite du parcours exige de l’endurance. Après Blois la route devient souvent impraticable ; on doit repasser sur la rive droite de la Loire puis cheminer bon gré, mal gré jusqu’à Tours.

Le franchissement du fleuve se faisait sur le pont bâti par Eudes II en 1044 au niveau de la cathédrale, un ouvrage ancien et branlant réparé parfois à la hâte. Une fois la Loire et la muraille franchies, le voyageur empruntait la Grand rue (les actuelles rues Colbert et du Commerce) : il fallait se frayer un passage entre charrettes, animaux, piétons et étals qui débordaient largement sur la voie. Au bout d’un périple épuisant d’environ cinq jours, le voyageur pouvait enfin poursuivre sa route vers le sud.

Le pont de pierre Tours : livraison en 1779 et audace technique

Sous l’impulsion des intendants Gaspard Charles César de l’Escalopier (intendant de 1756 à 1766) et François Pierre Du Cluzel (intendant de 1766 à 1783), et sur commande de l’intendant des Finances Charles Trudaine, un vaste projet de percée d’axe routier est lancé pour mettre Tours sur la nouvelle route royale venant de Paris via Vendôme et Château‑Renault.

Au sud du rempart, la chaussée de Grammont, surélevée et aménagée, voit le jour en 1758 après treize ans de travaux. Deux nouveaux ponts permettent alors de franchir le Cher. Entre 1765 et 1779, les ouvriers creusent une tranchée dans le coteau de la rive nord pour relier la ville à la nouvelle route royale.

Pour assurer la continuité entre ces tronçons, la construction d’un nouveau pont sur la Loire est projetée. Après de longs travaux préparatoires, les travaux propres ont commencé en 1765. L’ouvrage, audacieux, se distingue par son tablier plat de 440 mètres de longueur, porté par 14 piles en pierre, contraste avec les tabliers inclinés plus couramment bâtis à l’époque. Les difficultés rencontrées au cours du chantier n’ont pas empêché la livraison du pont à la circulation en 1779.

Aménagements urbains : esthétique, confort et hygiène

L’édification du pont s’accompagne d’une transformation urbaine organisée autour des principes antiques de Utilitas, Venustas et Firmitas. Il fallait non seulement un ouvrage utile, mais aussi une belle avenue et des abords solides et sains.

La rue Traversaine est élargie et des normes de construction sont imposées pour donner à la nouvelle rue Royale une harmonie certaine. Deux pavillons de style classique encadrent l’entrée nord, apportant une composition architecturale soignée à l’axe d’arrivée.

Sur le plan du confort et de l’hygiène, la rue Royale et ses abords sont progressivement pavés et l’éclairage public se développe : en 1770 on compte 213 réverbères. Les cimetières urbains sont repoussés vers les marges de la ville. En l’espace d’un demi‑siècle, l’urbanisme tourangeau connaît un changement radical qui prépare la ville à la modernité du XIXe siècle, période au cours de laquelle elle connaîtra une expansion sans précédent.

La mise en perspective locale et historique

Le pont de pierre, par son importance technique et symbolique, transforme la desserte routière et l’image de Tours : il facilite les communications vers le sud et marque la volonté de l’administration royale d’organiser et d’embellir les villes traversées par les grandes routes. L’ensemble des aménagements — chaussée de Grammont, tranchée de la rive nord, élargissement de voies et uniformisation des façades — illustre une planification urbaine pensée pour durer.

Cédric Delaunay propose ces repères pour comprendre comment, à la fin du XVIIIe siècle, un grand ouvrage d’art et des décisions administratives ont façonné l’espace urbain tourangeau et préparé les évolutions des décennies suivantes.

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source:https://www.francebleu.fr/emissions/histoire-en-touraine/1779-le-pont-de-pierre-est-ouvert-a-la-circulation-4528202#xtor=RSS-10

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