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Le Kenya a organisé des funérailles d’État pour le leader de l’opposition Raila Odinga, dans un climat encore marqué par les violences survenues la veille lorsqu’une intervention des forces de sécurité a entraîné la mort de plusieurs personnes lors d’un hommage public à son corps.
Hommage national au stade Nyayo
Tens of thousands de personnes s’étaient rassemblées au stade national Nyayo de Nairobi, où la cérémonie s’est tenue sous une importante présence policière.
Les participants agitaient des mouchoirs blancs, dansaient et brandissaient de grandes banderoles à l’effigie d’Odinga. Certains soufflaient dans des sifflets et des vuvuzelas, contribuant à une atmosphère à la fois festive et solennelle.
Le président William Ruto, des responsables des deux chambres du Parlement et de la justice, ainsi que des chefs d’État africains, dont le président somalien Hassan Sheikh Mohamud, ont assisté à la cérémonie.
Bousculade mortelle et bilan des blessés
La veille des funérailles, une bousculade au stade de football où le corps était exposé a fait au moins deux morts et près de 200 blessés, selon l’ONG médicale Médecins Sans Frontières (MSF).
Des images et des témoignages ont rapporté que la panique est survenue alors que des milliers de personnes faisaient la queue pour voir l’ancien Premier ministre après une veillée. La dispersion des foules a été rendue plus difficile par l’affluence et l’émotion.
Par ailleurs, des scènes chaotiques ont éclaté lorsque les forces de sécurité ont ouvert le feu pour repousser des personnes qui tentaient d’accéder à une zone VIP. Des organisations et des médias locaux ont donné des chiffres variables sur le nombre de personnes tuées par balles, évoquant entre trois et quatre morts selon les sources.
Contexte de la violence et réactions
La répression a suscité de vives réactions. Le groupe de défense des droits VOCAL Africa a déclaré avoir confirmé la réception de plusieurs corps au dépôt mortuaire municipal après les incidents au stade de Kasarani.
La police kenyane a également rapporté des décès, mais les chiffres diffèrent selon les chaînes locales et les organisations indépendantes, tandis que des dizaines de personnes ont été blessées par la panique ou par des tirs.
Les violences surviennent dans un contexte de tension politique accrue et d’importantes manifestations dirigées par la jeunesse au cours de l’année écoulée.
Parcours politique et héritage de Raila Odinga
Raila Odinga, 80 ans, est décédé d’une crise cardiaque présumée dans une clinique du sud de l’Inde, provoquant une vague d’émotion dans tout le pays (voir la dépêche : https://www.aljazeera.com/news/2025/10/15/kenyan-opposition-leader-raila-odinga-dies-of-heart-attack-in-india-at-80).
Surnommé « Baba » (père en swahili), Odinga a dominé la scène politique kényane de sa génération. Bien qu’il n’ait jamais remporté la présidence malgré cinq tentatives, il a été Premier ministre en 2008 et a joué un rôle déterminant dans le retour à la démocratie multipartite dans les années 1990.
Il est également crédité d’avoir été l’acteur principal derrière la constitution saluée de 2010 et a conclu des alliances politiques notables, notamment avec l’ancien président Uhuru Kenyatta en 2018 puis avec William Ruto l’année précédente.
Perception publique et débats
Nombreux sont ceux qui ont rendu hommage à son engagement politique et à son rôle d’activiste. Jean Jerry Abeka, 24 ans, a dit à l’agence Reuters : « Raila Odinga, le père de la démocratie au Kenya, était un leader altruiste prêt à tout risquer — même sa vie — pour faire fonctionner le pays. »
Cependant, Odinga restait une figure controversée. Certains l’ont accusé de s’être rapproché du pouvoir, notamment après que son parti ait été perçu comme aligné sur le gouvernement, ce qui a conduit certains à le qualifier de traître.
Malgré ces divisions, beaucoup souhaitent aujourd’hui se souvenir davantage de ses contributions au pays que des dissensions politiques récentes.
Programme funéraire et perspectives politiques
Après les cérémonies à Nairobi, le corps sera transporté dans la région de l’ouest du Kenya, berceau familial d’Odinga, où de nouvelles rassemblements importants sont attendus avant un service funéraire privé prévu dimanche.
La disparition d’Odinga crée un vide au sein de l’opposition kenyane, sans successeur évident, à l’approche d’élections qui pourraient s’annoncer volatiles en 2027.
À lire aussi
- Au moins 2 tués alors que la police kényane tire pour disperser des pleureurs d’Odinga : https://www.aljazeera.com/news/2025/10/16/police-in-kenya-fire-tear-gas-to-disperse-mourners-at-raila-odinga-viewing
- La politique du « handshake » au Kenya : préservation des élites déguisée en compromis : https://www.aljazeera.com/opinions/2025/3/21/kenyas-handshake-politics-elite-self-preservation-disguised-as-compromise
- Les protestations au Kenya ne sont pas un symptôme de démocratie en faillite. Elles sont la démocratie : https://www.aljazeera.com/opinions/2025/7/28/kenyas-protests-are-not-a-symptom-of-failed-democracy-they-are-democracy