L’Union européenne projette de durcir ses règles sur l’investissement étranger afin d’empêcher certaines entreprises, notamment chinoises, de profiter du marché unique sans générer d’emplois locaux ni transférer de technologies, rapporte le Financial Times.
Pression sur les industries européennes
L’afflux de produits chinois à bas prix vers l’UE accentue les difficultés des industries européennes déjà fragilisées.
Ces difficultés sont en partie amplifiées par des effets secondaires des droits de douane imposés par l’administration américaine.
Les secteurs les plus touchés comprennent :
- la sidérurgie ;
- la chimie ;
- les industries manufacturières soumises à des coûts énergétiques élevés et à des normes environnementales strictes.
Une vague d’investissements industriels chinois en Europe suscite des craintes : Pékin pourrait renforcer la dépendance de l’UE à ses industries de haute qualité, consolidant ainsi une influence géopolitique.
Certains y voient aussi un moyen pour les entreprises chinoises de contourner d’éventuels droits de douane sur les produits importés directement depuis la Chine.
Le commissaire européen chargé de l’industrie, Stéphane Séjourné, a déclaré que les nouvelles normes devraient veiller à ce que « les investissements étrangers ne se limitent pas à des composants assemblés à l’étranger », mais contribuent à « faire fonctionner l’ensemble de la chaîne de valeur européenne ».
Selon lui, les règles révisées exigeront probablement que les investisseurs étrangers :
- emploient des travailleurs locaux ;
- transfèrent des connaissances technologiques, notamment dans des secteurs comme les batteries ;
- créent une valeur ajoutée pour la croissance européenne, plutôt que d’utiliser l’UE simplement comme porte d’entrée vers le marché.
Séjourné a ajouté qu’il partageait l’objectif de relocalisation industrielle affiché par l’administration américaine, en précisant que l’UE privilégiera toutefois d’autres instruments de politique industrielle plutôt que les droits de douane.
Un responsable européen a souligné que le texte législatif ne mentionnera pas la Chine nommément, mais, au vu des flux d’investissement en provenance de l’État asiatique, l’orientation de la réforme est claire.

La Commission européenne (Reuters)
Investissement chinois
Les flux d’investissement direct étranger en provenance de la Chine vers l’UE ont bondi de 80 %, atteignant 9,4 milliards d’euros en 2024, selon les données de la Commission européenne.
Cette hausse nourrit les débats sur les conditions d’accès au marché européen et sur la nécessité d’assurer des retombées locales.
La société chinoise de batteries CATL, disposant d’une technologie jugée plus avancée que celle de ses concurrents européens, attire une attention particulière.
Après avoir ouvert une usine en Allemagne, elle construit désormais une unité de 7 milliards d’euros en Hongrie et une installation de 4 milliards d’euros en Espagne.
Quelques points clés à retenir :
- CATL a été ajoutée à la liste noire du Pentagone en janvier, soupçonnée de liens avec l’armée chinoise, allégations qu’elle nie.
- Pour l’usine espagnole, le projet prévoit d’importer 2 000 travailleurs chinois dans la région de Saragosse, alors que l’effectif total atteindra 3 000 personnes, majoritairement espagnoles.
- Des responsables syndicaux craignent toutefois que la société se montre réticente à partager ses technologies les plus sensibles, conformément à la pratique de l’État chinois.
Madrid soutient vigoureusement l’initiative européenne visant à renforcer les règles d’investissement étranger.
Un responsable espagnol a déclaré que la mesure devrait renforcer « la sécurité économique et la résilience de l’Europe » et garantir que les investissements créent une forte valeur ajoutée, des technologies et des emplois locaux.
Les entreprises chinoises ont également fortement investi dans des projets d’hydrogène en Allemagne, en Espagne et dans les pays nordiques ces dernières années.
Le directeur du groupement industriel Hydrogen Europe, Laurent Donsel, estime qu’il est difficile d’évaluer « le degré réel de participation » des entreprises chinoises dans ce secteur, car les acteurs sont souvent difficiles à identifier.
Selon lui, les règles actuelles — qui limitent par exemple à 25 % la part des composants chinois dans les électrolyseurs financés par l’UE — peuvent être contournées assez facilement.
Le débat sur les investissements chinois dans l’UE (investissements chinois UE) met en exergue la volonté européenne de concilier ouverture du marché et sécurité économique, tout en préservant la compétitivité industrielle du continent.