Les États‑Unis ont adressé une mise en garde à l’Union européenne et à ses États membres: si la régulation numérique européenne n’évolue pas, Washington promet des représailles. Cette position reflète la pression des géants de la tech pour un assouplissement des restrictions qui encadrent leurs activités transatlantiques. L’enjeu porte sur l’équilibre entre le cadre régulateur et l’accès au marché américain, perçu par les autorités américaines comme discriminatoire et préjudiciable à l’innovation.

Dans un message diffusé sur X, Jamieson Greer, du bureau du Représentant au commerce (USTR), dénonce une approche discriminatoire et le recours à des procédures, des impôts, des amendes et des directives visant les prestataires de services américains. Il affirme que des acteurs européens ont bénéficié d’un accès facilité au marché américain sans réciprocité et cite une liste d’entreprises concernées: Accenture, Amédée, Capgemini, DHL, Mistral, Publicis, SAP, Siemens et Spotify.
Face à ces accusations, l’Union européenne réplique en assurant que ses règles s’appliquent de manière égale et équitable à toutes les entreprises opérant dans l’UE. Bruxelles rappelle que le cadre régulateur est conçu pour contenir les dérives tout en préservant la concurrence et l’innovation sur le marché européen.
Le débat s’inscrit dans un contexte de tensions commerciales croisées: l’UE a déjà sanctionné des acteurs majeurs et les États‑Unis envisagent des contreparties potentielles. En 2023, la Commission européenne a infligé à Google une amende de 2,95 milliards d’euros pour abus de position dominante dans la publicité en ligne. Google a enregistré en 2024 un chiffre d’affaires d’environ 322 milliards d’euros et un bénéfice d’environ 92 milliards d’euros, chiffres qui relativisent l’ampleur de la sanction à l’échelle du groupe. À la fin de l’année dernière, Bruxelles a aussi sanctionné le réseau X d’Elon Musk à hauteur de 120 millions d’euros. Par ailleurs, une condamnation fédérale à San Francisco a ordonné le versement d’environ 391 millions d’euros pour atteinte à la vie privée, visant près de 100 millions d’utilisateurs qui avaient désactivé le suivi. Les États‑Unis évoquent aussi la possibilité d’un abaissement des droits de douane sur l’acier et l’aluminium en échange d’un assouplissement des règles européennes.
Réagissant à ces développements, Luther Lowe, responsable de Y Combinator, déplore ce qui lui apparaît comme une trahison envers la « petite tech ». Il soutient que le cadre du Digital Markets Act (DMA) doit être préservé et, selon lui, étendu pour favoriser les jeunes entreprises du secteur. Le DMA est présenté comme un levier qui pouvait ouvrir des parts de marché pour les petites entreprises américaines; il appelle à copier ce cadre plutôt qu’à l’attaquer.
Côté légal, l’Europe rappelle que le Digital Services Act (DSA) a été adopté en 2023 pour lutter contre les contenus illicites et dangereux en ligne, et que le cadre du DMA continue d’encadrer les pratiques des grandes plateformes actives dans l’UE. Le récit suggère une série d’échanges et de calculs entre les deux blocs, où chaque camp affirme défendre l’équilibre entre sécurité, liberté d’entreprise et compétitivité internationale.