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L’Allemagne vient d’opérer un durcissement majeur de sa politique migratoire, avec l’annonce mercredi 7 mai que la plupart des demandeurs d’asile seraient désormais refoulés à ses frontières. Cette décision intervient alors que l’extrême droite progresse dans les sondages, poussant le nouveau gouvernement à adopter des mesures plus strictes pour contrôler l’immigration irrégulière.
Annulation d’une directive historique et nouvelles consignes aux frontières
Quelques heures seulement après sa prise de fonctions, le ministre de l’Intérieur conservateur Alexander Dobrindt a annoncé l’abrogation d’une directive datant de 2015, mise en place lors de la crise migratoire européenne. À cette époque, l’Allemagne avait accueilli plus d’un million de réfugiés, principalement syriens et afghans.
Cette directive, instaurée par son prédécesseur Thomas de Maizière, autorisait la police fédérale à laisser entrer des ressortissants de pays tiers sans papiers et sans demande formelle d’asile. Désormais, cette politique d’accueil est révolue : la police des frontières devra refouler la majorité des demandeurs d’asile sans papiers, à l’exception des groupes vulnérables, comme les enfants et les femmes enceintes.
Lors d’une conférence de presse à Berlin, M. Dobrindt a souligné que « l’Allemagne doit pouvoir prendre des décisions pour réduire les chiffres de l’immigration illégale et des demandes d’asile ».
Une politique migratoire axée sur le contrôle renforcé
Le ministre a insisté sur la nécessité d’une politique migratoire « claire, cohérente et contrôlée ». Il a précisé que le gouvernement ne fermerait pas les frontières, ni ne chargerait excessivement les pays voisins, mais renforcerait les contrôles afin d’augmenter le nombre de refoulements aux frontières.
Cette démarche vise également à apaiser les critiques des pays frontaliers, notamment la Pologne, qui dénoncent l’impact des contrôles sur la circulation des travailleurs transfrontaliers.
Réactions en Pologne et au sein de l’Union européenne
La décision allemande a suscité une mise en garde rapide de la part du chef du gouvernement polonais, Donald Tusk. Lors d’une conférence de presse conjointe à Varsovie, il a exhorté le chancelier Friedrich Merz à se concentrer sur la sécurisation des frontières extérieures de l’Union européenne et à préserver la libre circulation au sein de la zone Schengen.
Dans une interview accordée à Die Welt, M. Merz a indiqué avoir informé au préalable Emmanuel Macron et Donald Tusk des mesures de contrôle renforcé. Il a rappelé que ces contrôles aux frontières intérieures ne seraient qu’une mesure transitoire, nécessaire tant que la migration irrégulière resterait élevée au sein de l’UE. L’Allemagne, située au cœur de l’Europe, est particulièrement affectée par ce phénomène.
Évolution des demandes d’asile et résultats des premières mesures
Selon les données du ministère de l’Intérieur allemand, le nombre de demandes d’asile avait augmenté entre 2020 et 2023, avant de diminuer en 2024. Cette année-là, 250 945 personnes ont sollicité l’asile en Allemagne, soit une baisse de 28,7 % par rapport à 2023.
De plus, plus de 53 000 demandeurs ont été refoulés aux frontières allemandes depuis octobre 2023, selon des chiffres officiels publiés début mai.
Contexte politique et pression de l’extrême droite
Ce durcissement de la politique migratoire était largement attendu, alors que le sujet a dominé la campagne électorale des législatives, notamment après une série d’attaques commises par des étrangers.
Le chancelier Friedrich Merz avait annoncé avant son investiture que la maîtrise de l’immigration serait l’une des priorités de son gouvernement, dans le but de regagner la confiance des électeurs tentés par l’extrême droite.
Montée de l’Alternative pour l’Allemagne et inquiétudes gouvernementales
Dans plusieurs sondages récents, le parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD), arrivé deuxième aux législatives, s’est parfois hissé en tête, dépassant les conservateurs. Cette popularité accrue inquiète le gouvernement de Friedrich Merz.
Classé récemment comme « extrémiste de droite » par les services de renseignement intérieur, l’AfD est accusé de mener une « agitation continue » contre les migrants, réfugiés et musulmans, qu’il présente comme une « menace collective ».