Table of Contents
Donald Trump, homme d’affaires et personnalité télévisuelle bien avant de devenir homme politique, a profondément transformé les codes habituels des dirigeants de la Maison Blanche, tant dans leur comportement que dans leur manière de s’exprimer.
Un style de discours marqué par la compétition
Sur scène, Trump donne souvent l’impression de parler sans filtre, avec des digressions erratiques, des expressions clés répétées, des insultes directes et une utilisation constante des superlatifs. Cette rhétorique se caractérise notamment par une vision du monde divisée en « gagnants » et « perdants », « nous » contre « eux », ou encore entre ceux qui sont « très intéressants » et ceux qui sont « pathétiques ».
Une analyse des 433 heures de discours publics de Trump, comparée à des millions de phrases issues du langage courant américain, révèle que les termes liés à la compétition apparaissent 5,4 fois plus souvent chez lui qu’au sein du discours moyen américain. De plus, il emploie deux fois plus d’adjectifs superlatifs et 3,6 fois plus d’adverbes superlatifs que la moyenne.
La description des autres dans son langage est rarement neutre : ils sont souvent présentés comme des ennemis, insultés avec des surnoms enfantins tels que « Sleepy Joe » Biden ou « Crazy Kamala » Harris, ou encore comparés à des animaux ou des polluants.
Une simplification polémique des enjeux politiques
Cette rhétorique de la compétition tend à réduire la complexité des enjeux politiques. Le linguiste Anthony Koth, de l’université Rice, souligne que mapper la politique sur une compétition guerrière conduit à une simplification problématique où règles, arbitres et adversaires se confondent en un même ennemi dont l’objectif est de contrer Trump.
Pour Ulrike Schneider, linguiste à l’université de Mayence, la vision politique et économique de Trump se présente comme un jeu à somme nulle, où les pertes d’un camp résultent des gains illégitimes de l’autre.
Trump, entre homme ordinaire et figure exceptionnelle
Le style de discours de Trump vise à séduire l’Américain moyen tout en affirmant une image de figure exceptionnelle. Selon Schneider, Trump joue un double rôle : celui du « gars du quartier » mais aussi du « messie » ou leader incontestable.
Il utilise un superlatif tous les 19 adjectifs, soit deux fois plus que la moyenne américaine (un tous les 41 adjectifs). Parmi ses expressions favorites, le terme « greatest » (« le plus grand ») revient fréquemment, accompagné de promesses et d’actions « jamais vues », « jamais arrivées », « comme jamais », souvent avec l’expression « dans l’histoire de notre pays ». Ce dernier groupe de mots est d’ailleurs prononcé en moyenne toutes les cinq minutes.
Un style hérité du monde des affaires et de la télévision
Avant la Maison Blanche, Trump était promoteur immobilier et vedette de l’émission télévisée « The Apprentice », où il incarnait un magnat couronné de succès. Son style actuel conserve les traits de cette époque : phrases courtes, répétitives, deux mots plus courtes que la norme, et une autopromotion constante.
Un autre aspect inhabituel de son discours est la référence fréquente à lui-même à la troisième personne, avec le mot « Trump » prononcé toutes les six minutes en moyenne.
Lors d’une réunion à l’Office Oval en avril dernier, Trump a signé un décret mettant fin à la protection d’une vaste zone océanique. Lors de cette cérémonie, il s’est vanté d’avoir déjà levé cette protection pendant son premier mandat, avant que son successeur, Joe Biden, ne la rétablisse en zone interdite à la pêche. Trump a alors déclaré : « Je l’ai fait la dernière fois. Et ils l’ont annulé. C’est pourquoi nous devons rester président longtemps », s’exprimant au pluriel en parlant de lui.