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Aux États‑Unis, la gauche s’arme pour se protéger

by Sara
États-Unis

Une enquête approfondie publiée par le site The Intercept dévoile l’engagement de groupes de gauche, de minorités et de communautés marginalisées aux États‑Unis dans des formations au maniement d’armes. Face à l’accroissement des discours de haine et de la violence politique, ces organisations entraînent leurs membres pour qu’ils puissent se protéger et défendre leurs communautés.

Révélation et réactions

Le journaliste d’investigation Alan Stevens rapporte que la découverte selon laquelle le candidat démocrate au Sénat et ancien marin Graham Blattner animait des ateliers d’initiation au tir a surpris de nombreux observateurs. Cette information a mis en lumière des pratiques qui se déroulaient jusque‑là en grande partie hors de la vue du public.

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Possession d’armes : un phénomène qui change de visage

Stevens estime que la pratique de Blattner n’est pas une exception, mais plutôt le reflet d’une tendance montante : l’appropriation des armes au sein de la gauche américaine. Cette tendance s’explique en partie par la hausse des violences politiques et la crainte des menaces venues de l’extrême droite.

Un sondage réalisé l’an dernier par le réseau NBC montre une augmentation de la détention d’armes parmi les Américains, notamment chez les électeurs du Parti démocrate, dont la proportion de propriétaires d’armes est passée de 33 % en 2019 à 41 %. (Source du sondage : NBC)

La figure traditionnelle du détenteur d’arme — rurale et conservatrice — laisse place à un profil plus divers :

  • libéraux urbains cherchant à se protéger ;
  • minorités raciales opposées à l’idéologie de la National Rifle Association mais considérant l’arme comme un moyen de sécurité ;
  • membres de la communauté LGBTQ+ qui s’organisent face aux menaces ciblées.

Des structures comme la Socialist Rifle Association, le Liberal Gun Club ou les Pink Pistols offrent des espaces de formation « sécurisés », éloignés de la culture de virilité souvent associée aux milieux de droite, selon The Intercept.

Groupes et initiatives

Parmi les initiatives citées :

  • Socialist Rifle Association — fondée en 2018, elle défend une approche de classe pour l’application du deuxième amendement ;
  • Pink Pistols — organisation de la communauté LGBTQ+ créée en 2000 sous la bannière « les personnes LGBTQ armées ne sont pas des cibles », qui a vu ses effectifs croître après la fusillade d’Orlando en 2016 et l’élection de Donald Trump ;
  • Liberal Gun Club — club de propriétaires d’armes aux orientations progressistes ;
  • Progressive Shooters — fondée à Los Angeles par l’instructeur Tom Nguyen, qui promeut la discipline, la responsabilité et la réflexion plutôt que l’exhibition de virilité.

Ces groupes prônent un entraînement sérieux et des pratiques de sécurité qui attirent principalement des progressistes cherchant à se protéger dans un contexte perçu comme de plus en plus dangereux.

Attaques et perte de confiance

Stevens rappelle une série d’attaques perpétrées par des nationalistes blancs dans des villes comme Pittsburgh (Pennsylvanie), El Paso (Texas) et Jacksonville (Floride). Ces assauts, ciblant parfois des lieux de rassemblement communautaire, ont semé un climat d’insécurité pour de nombreuses minorités et groupes marginalisés.

Les manifestations et événements LGBTQ+ ont été exposés à des agressions armées et à des menaces, ce qui a contribué à éroder la confiance envers les forces de l’ordre. En conséquence, des collectifs tels que le John Brown Gun Club ont pris l’initiative d’assurer la sécurité des manifestations par le biais de volontaires armés.

Pour beaucoup, ces groupes se situent dans une lignée historique de défense communautaire américaine, depuis les Black Panthers des années 1960 jusqu’à des organisations récentes de protection communautaire.

Les risques d’une « démocratie armée »

Ce basculement comporte néanmoins des dangers. Stevens met en garde contre l’émergence d’une « démocratie armée » où les désaccords politiques se règlent par la force plutôt que par le débat. L’escalade des soupçons et le recul de la confiance institutionnelle augmentent le risque d’une rupture interne grave.

Le parallèle historique est invoqué : la République de Weimar (1919–1933), née après la Première Guerre mondiale, illustre comment des tensions internes non résolues peuvent précipiter un effondrement politique. (Contexte historique : https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2014/12/17/%D8%A7%D9%84%D8%AD%D8%B1%D8%A8-%D8%A7%D9%84%D8%B9%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%8A%D8%A9-%D8%A7%D9%84%D8%A3%D9%88%D9%84%D9%89)

Les données de la Anti‑Defamation League (ADL) signalent que, entre 2014 et 2024, 328 personnes ont été tuées par des extrémistes de droite, pour la plupart par balles, ce qui illustre l’ampleur de la menace d’extrême droite aux États‑Unis. (Source ADL : https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2025/5/22/%d8%b1%d8%a7%d8%a8%d8%b7%d8%a9-%d9%85%d9%83%d8%a7%d9%81%d8%ad%d8%a9-%d8%a7%d9%84%d8%aa%d8%b4%d9%87%d9%8a%d8%b1-%d9%85%d9%86-%d8%a7%d9%84%d8%af%d9%81%d8%a7%d8%b9-%d8%b9%d9%86)

Motivations et perspectives

Selon Stevens, les motivations d’un grand nombre de progressistes à se former au maniement d’armes sont pragmatiques plutôt qu’idéologiques. Dans un contexte d’augmentation des actes de haine et d’un sentiment d’insécurité, il s’agit pour beaucoup d’éviter d’être des « cibles faciles » et de protéger leurs proches et leurs espaces communautaires.

Ce phénomène redéfinit la notion de sécurité au sein de la gauche américaine et interroge l’équilibre entre auto‑protection et risque d’escalade armée dans la vie politique du pays.

source:https://www.aljazeera.net/politics/2025/11/2/%d8%a7%d9%84%d9%8a%d8%b3%d8%a7%d8%b1-%d8%a7%d9%84%d8%a3%d9%85%d9%8a%d8%b1%d9%83%d9%8a

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