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À la fin du mois d’avril, la direction d’ArcelorMittal, premier groupe sidérurgique en France et en Europe, a annoncé un vaste plan de réduction des capacités et de délocalisation des effectifs. Malgré la mobilisation des salariés, le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) est en cours, souvent dans des conditions étonnantes, voire choquantes.
Le contexte du PSE
Alors que la décarbonation promise est au point mort, les objectifs financiers de la famille Mittal se dévoilent dans l’indifférence des pouvoirs publics, particulièrement du gouvernement français. Christèle Khelf, secrétaire générale adjointe de la fédération générale de la métallurgie et des mines (FGMM) CFDT, s’inquiète de la situation. Le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, avait pourtant annoncé en février la création d’une « alliance européenne de l’industrie lourde », rassemblant plusieurs ministres européens engagés pour le maintien de l’acier et de la chimie en Europe.
Un plan de suppressions d’emplois alarmant
La direction d’ArcelorMittal a annoncé un plan de 1 660 suppressions de postes en Europe, un chiffre qui pourrait en réalité approcher les 2 000 selon Khelf. Ce plan vise à délocaliser en Pologne et en Inde les fonctions support telles que la finance, les ressources humaines, et l’informatique. En France, 600 postes sont menacés, dont certains liés à la production. À Basse-Indre et à Dunkerque, le PSE entraîne la suppression de 378 emplois.
Des conditions de transfert préoccupantes
La direction a accordé plus de temps pour l’application du PSE, mais avec une condition surprenante : le transfert des savoir-faire des salariés ne se fera pas vers d’autres collègues, mais vers une Intelligence Artificielle (IA). Les salariés devront interagir avec le logiciel Epiplex, développé en Inde, ce qui soulève des questions sur la déshumanisation de ce processus.
Conséquences économiques à long terme
Le rapport de l’OCDE indique que le niveau mondial de surcapacité de l’acier pourrait atteindre 720 millions de tonnes. Khelf souligne que Mittal cherchera à réduire les capacités pour maximiser l’utilisation des usines où la main-d’œuvre et l’énergie coûtent moins cher. Cela soulève des interrogations quant à la capacité de Mittal à répondre aux besoins de l’économie européenne.
Subventions et avenir de l’aciérie de Dunkerque
L’État a accordé une subvention de 850 millions d’euros pour décarboner l’aciérie de Dunkerque. Toutefois, Khelf considère cela plutôt comme un co-investissement. La direction aurait annoncé un investissement dans un four électrique, mais peu de progrès semble être fait, la société cherchant encore des aides supplémentaires.
Le rôle des politiques et des aides publiques
Face à cette crise, Khelf appelle à une meilleure conditionnalité des aides publiques. Elle s’inquiète que les subventions aillent à des entreprises qui procèdent ensuite à des PSE, laissant les salariés licenciés comme les principaux contributeurs au financement de ces aides. Une commission d’enquête sénatoriale sur l’utilisation des aides publiques sera bientôt rendue publique, ce qui pourrait éclairer la situation d’ArcelorMittal.
Propositions pour l’avenir
Christèle Khelf exprime une préférence pour des prises de participation minoritaires des pouvoirs publics plutôt qu’une nationalisation d’ArcelorMittal. Elle estime que la plupart des solutions doivent être élaborées à l’échelle européenne, notamment en matière de décarbonation et de régulation des importations de produits en surcapacité. Khelf appelle également à la création d’une entité ArcelorMittal Europe, permettant un accès aux décisions stratégiques, afin d’éviter des suppressions de postes sans préavis.