Table of Contents
Dharavi : Un enjeu immobilier majeur à Bombay
Dans une tribune parue dans Le Monde, Vanessa Caru, historienne et chercheuse au CNRS, met en lumière la situation économique de Bombay, la ville indienne la plus chère au monde. L’immobilier s’est révélé être une source immense de profits, mais il est aussi le reflet d’inégalités croissantes. La métropole, qui a été marquée par un long processus d’urbanisation dont les racines remontent à l’époque coloniale, abrite également Dharavi, le plus grand bidonville d’Asie.
Une convoitise immobilière grandissante
Dharavi, souvent évoqué pour son image stéréotypée véhiculée par des films comme Slumdog Millionaire (2008), est devenu l’objet d’une intense convoitise de la part de promoteurs immobiliers. Ces derniers, soutenus par de grands groupes capitalistes proches du parti nationaliste hindou au pouvoir, cherchent à acquérir ces terrains stratégiquement situés. Sous prétexte de « redéveloppement », ces projets visent principalement à accaparer l’espace urbain au détriment des habitants de Dharavi.
Impact des politiques néolibérales
À partir des années 1990, la mise en œuvre de politiques économiques néolibérales à Bombay a vu les inégalités se creuser au sein de la population. L’explosion du secteur tertiaire et l’essor du capitalisme financier ont entraîné une spéculation immobilière sans précédent. En l’espace de quelques années, les prix de l’immobilier ont quadruplé, imposant à la ville le statut de métropole parmi les plus chères au monde dès 1996. Les anciens bâtiments ont été démolis pour céder la place à des tours de béton et de verre, faisant peu à peu disparaître l’identité architecturale de la cité.
La réalité des bidonvilles
Malgré cette frénésie immobilière, les populations précaires continuent d’affluer vers les bidonvilles. Au début des années 2000, près de 5 à 6 millions de personnes vivaient dans ces espaces insalubres, occupant seulement 6% de la surface totale de Bombay. Cette situation n’est pas uniquement le fruit des politiques néolibérales, mais également le résultat d’une histoire complexe héritée du colonialisme. Le port de Bombay, devenu un axe vital du capitalisme britannique, a entraîné une urbanisation rapide et des transformations sociales profondes.
L’héritage du passé colonial
Bombay, qui a connu un essor significatif au XIXe siècle grâce à son port et à l’industrie textile, témoigne d’une dualité entre richesse et pauvreté. Ce contraste dévastateur continue de manière persistante à définir la ville aujourd’hui. L’immobilier, moteur de profits pour certains, soulève des questions sur la justice sociale et l’avenir des populations les plus vulnérables, notamment à Dharavi, qui se voit menacée par des projets de développement qui ne tiennent pas compte des besoins de ses résidents.
La dynamique actuelle à Bombay représente un défi complexe, entre modernisation urbaine et enjeux sociaux, laissant présager un futur incertain pour ses habitants et la structure même de la ville.