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L’Éthiopie a inauguré mardi son méga-projet hydroélectrique, présenté comme une promesse de progrès économique et une source potentielle de tensions géopolitiques. Le projet, connu sous le nom de barrage de la Renaissance éthiopienne, est le plus grand barrage hydroélectrique d’Afrique et vise à multiplier la production nationale d’électricité.
Promesses économiques et conditions pour les atteindre
Les autorités éthiopiennes, dont le Premier ministre Abiy Ahmed (https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2018/2/24/%D8%A3%D8%A8%D9%8A-%D8%A3%D8%AD%D9%85%D8%AF-%D8%A7%D9%84%D9%85%D8%B3%D9%84%D9%85-%D8%A7%D9%84%D9%85%D8%B1%D8%B4%D8%AD-%D9%84%D8%B1%D8%A6%D8%A7%D8%B3%D8%A9-%D9%88%D8%B2%D8%B1%D8%A7%D8%A1), annoncent des retombées financières importantes, jusqu’à un milliard de dollars par an selon certaines estimations. Toutefois, ces gains ne sont pas garantis : ils dépendent d’investissements complémentaires et d’une extension significative des réseaux de transport d’électricité.
Pour que le barrage devienne réellement un moteur économique, l’Éthiopie devra :
- connecter davantage de ménages au réseau national ;
- renforcer les lignes de transmission internes ;
- développer des accords d’exportation d’électricité avec les pays voisins.
Bénéficiaires actuels et inégalités d’accès
Alors que le pays aspire à électrifier massivement sa population, une partie notable de l’électricité produite en surplus semble déjà bénéficier à des activités fortement consommatrices.
La presse souligne que les sociétés de minage de cryptomonnaies (https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2017/9/27/%D8%A3%D8%A8%D8%B1%D8%B2-%D8%A7%D9%84%D8%B9%D9%85%D9%84%D8%A7%D8%AA-%D8%A7%D9%84%D8%B1%D9%82%D9%85%D9%8A%D8%A9-%D8%A7%D9%84%D9%85%D8%AA%D8%AF%D8%A7%D9%88%D9%84%D8%A9) pourraient consommer près d’un tiers de la production électrique du pays cette année.
Conséquence : la majorité des Éthiopiens privés d’électricité risquent d’attendre plusieurs années, voire jusqu’en 2030, avant d’être pleinement raccordés.
Risques géopolitiques : inquiétudes pour l’Égypte et le Soudan
Le barrage soulève des craintes profondes en Égypte (https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2014/10/20/%D9%85%D8%B5%D8%B1) et au Soudan (https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2014/11/3/%D8%A7%D9%84%D8%B3%D9%88%D8%AF%D8%A7%D9%86) concernant leur part des eaux du Nil (https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2015/11/28/%D9%86%D9%87%D8%B1-%D8%A7%D9%84%D9%86%D9%8A%D9%84).
Selon l’analyse publiée par The Economist, les options d’une confrontation directe sont limitées. Une attaque visant le barrage — menace évoquée par le passé — serait « un acte de folie », car elle provoquerait des inondations catastrophiques affectant notamment des zones soudanaises.
« Bombarder le barrage — comme on l’a déjà menacé — serait un acte de folie car cela déclencherait des inondations catastrophiques dans des parties du Soudan. »
Au-delà du technique : nationalisme et rivalités régionales
Le débat autour du barrage dépasse les seules considérations techniques. Il alimente des discours nationalistes, l’Éthiopie se présentant comme une puissance qui rompt avec une prétendue « hégémonie égyptienne ».
De son côté, l’Égypte qualifie la question du barrage de « question de vie ou de mort », illustrant l’intensité des perceptions opposées.
Le Soudan, affaibli par une guerre interne, se trouve dans une position délicate entre son besoin d’eau et son soutien traditionnel à l’Égypte.
Implications régionales et nouveaux alignements
L’instabilité dans la corne de l’Afrique (https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2018/2/23/%D8%A7%D9%84%D9%82%D8%B1%D9%86-%D8%A7%D9%84%D8%A3%D9%81%D8%B1%D9%8A%D9%82%D9%8A-%D8%A3%D9%87%D9%85%D9%8A%D8%A9-%D9%85%D8%AA%D8%B9%D8%A7%D8%B8%D9%85%D8%A9-%D9%88%D8%B5%D8%B1%D8%A7%D8%B9%D8%A7%D8%AA) peut s’aggraver si d’autres acteurs régionaux s’impliquent.
Le rapprochement croissant entre l’Égypte et l’Érythrée, ennemi voisin de l’Éthiopie, suscite des craintes d’une escalade et d’une possible internationalisation du conflit.
Parallèlement, des déclarations du dirigeant éthiopien laissent entrevoir des ambitions retrouvées de projection maritime vers la mer Rouge (https://www.aljazeera.net/encyclopedia/2023/12/26/%D8%A7%D9%84%D8%A8%D8%AD%D8%B1-%D8%A7%D9%84%D8%A3%D8%AD%D9%85%D8%B1-%D9%85%D9%85%D8%B1-%D9%85%D8%A7%D8%A6%D9%8A-%D8%A5%D8%B3%D8%AA%D8%B1%D8%A7%D8%AA%D9%8A%D8%AC%D9%8A), ce qui complexifie encore davantage les équilibres régionaux.
Points clés à retenir
- Le barrage de la Renaissance éthiopienne promet d’augmenter fortement la production électrique de l’Éthiopie.
- La réalisation des bénéfices attendus dépend essentiellement de l’extension des réseaux et d’accords d’exportation.
- Les activités énergivores, comme le minage de cryptomonnaies, absorbent déjà une part importante de la production.
- Le projet accentue les tensions avec l’Égypte et le Soudan autour du partage de l’eau du Nil.
- Les risques d’escalade régionale augmentent au fur et à mesure que de nouveaux acteurs se rapprochent des parties en présence.