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La fermeture de 537 restaurants en Turquie : impacts de la boycott

by Sara
Turquie

La fermeture de 537 restaurants en Turquie : impacts de la boycott

İstanbul – Dans un développement sans précédent, la société américaine « Yum Brands », propriétaire des chaînes Kentucky et Pizza Hut, a annoncé le 8 février la résiliation de son accord de franchise avec la société locale « İş Gıda », entraînant la fermeture de 537 établissements et la déclaration de faillite de l’opérateur turc avec des dettes dépassant 7,7 milliards de livres turques (environ 214 millions de dollars).

Bien que « Yum Brands » ait justifié sa décision par le non-respect par « İş Gıda » des normes opérationnelles et de qualité, le timing de la fermeture soulève des questions concernant le rôle joué par la campagne de boycott qui a pris de l’ampleur en Turquie depuis le début de l’agression israélienne contre la bande de Gaza. Selon des rapports locaux, les ventes de Kentucky en Turquie ont chuté de 40 % ces derniers mois, exacerbant la crise financière que connaissait l’entreprise turque.

De la franchise à la faillite

Depuis l’obtention des droits d’exploitation de Kentucky et Pizza Hut en Turquie en 2020, « İş Gıda » avait adopté une stratégie d’expansion rapide, augmentant le nombre de ses établissements Kentucky de 125 à 283, et ceux de Pizza Hut de 45 à 254 en peu de temps, ce qui lui avait valu le prix de « Meilleur partenaire de franchise de l’année 2023 » décerné par « Yum Brands ».

Cependant, l’opérateur local s’est basé sur une croissance non maîtrisée, ce qui l’a confronté à une pression financière croissante. Cette expansion n’était pas soutenue par une base financière solide, mais par un endettement excessif, rendant l’entreprise vulnérable à une crise de liquidité avec la hausse des taux d’intérêt.

Les investissements d' »İş Gıda » ne se limitaient pas au secteur de la restauration, s’étendant à d’autres domaines, notamment l’acquisition de la société « Peiman » pour la production de noix, l’achat de l’usine de jantes allemande « PBS », et la possession de la chaîne de télévision allemande « Rhein Main TV ».

« Yum Brands » a justifié sa décision de mettre fin au contrat de franchise avec « İş Gıda » par le non-respect des normes de fonctionnement et de qualité. Le directeur financier de l’entreprise, Chris Turner, a déclaré que sa société avait fourni un soutien continu à l’opérateur turc, mais que celui-ci avait échoué à améliorer ses performances, ajoutant que les ventes de Kentucky et Pizza Hut en Turquie étaient bien inférieures à la moyenne mondiale, rendant l’activité non rentable économiquement.

La montée de la campagne de boycott en Turquie

La campagne de boycott en Turquie est passée d’un mouvement populaire à une force économique significative, incitant les entreprises étrangères et locales à réévaluer leurs investissements. Ce mouvement a pris de l’ampleur en réponse aux agressions israéliennes sur Gaza.

Les actions de boycott officielles se sont traduites principalement par :

  • Des décisions des chemins de fer turcs et de Turkish Airlines d’éliminer les produits des entreprises soutenant l’occupation dans les services de restauration et les salons d’aéroport.
  • La décision de 45 municipalités affiliées au Parti de la justice et du développement (AKP) de cesser la vente de produits israéliens.
  • Le retrait de ces produits des installations du parlement turc.
  • Le 2 mai 2024, le ministère turc du Commerce a annoncé un arrêt complet des transactions commerciales avec Israël jusqu’à ce que l’entrée de l’aide humanitaire à Gaza soit autorisée sans restrictions.
  • Le mois dernier, la Turquie a décidé, sous la direction du président Recep Tayyip Erdoğan, de continuer à boycotter le Forum de Davos en raison de l’agression israélienne continue contre Gaza, considéré comme un soutien à Israël.

Dans le secteur privé, les actions de boycott les plus notables incluent :

  • Les entreprises traitant avec Israël ont subi des pressions sans précédent, forçant le groupe « Zorlu », le plus grand investisseur turc en Israël, à vendre ses parts dans trois entreprises israéliennes, mettant ainsi fin à des investissements d’une valeur d’un milliard de dollars.
  • Le secteur des boissons et de la restauration a également été touché, avec une baisse de 50 % des ventes de boissons gazeuses soutenant l’occupation, poussant les entreprises à offrir d’importantes remises pour réduire leurs pertes.
  • Les ventes de boissons gazeuses dans les restaurants et cafés ont chuté de moitié, indiquant un impact direct du boycott sur les revenus des grandes entreprises.

Une nouvelle dynamique économique

Dans ce contexte, le chercheur en économie politique, Hussein Özkan, estime que la campagne de boycott en Turquie a évolué d’un simple acte de consommation à un outil économique qui redessine le marché et pousse les entreprises mondiales à réévaluer leurs stratégies d’investissement.

Selon lui, la fermeture de Kentucky et Pizza Hut en Turquie n’est pas seulement une crise financière, mais le résultat d’un impact du boycott qui a déstabilisé l’opérateur local et accéléré son effondrement dans un environnement économique tumultueux.

Özkan indique que l’absence de statistiques officielles ne nie pas que les études à venir révéleront une baisse significative des ventes des marques ciblées, montrant que les entreprises étrangères ne mesurent plus leur succès sur le marché turc uniquement par les taux de profit, mais par leur capacité à s’adapter aux changements politiques et sociaux.

Cependant, malgré la puissance de cet impact, Özkan souligne que le boycott fait face à un véritable défi avec une diminution de son élan après l’annonce du cessez-le-feu à Gaza, ce qui reflète la problématique de le lier à des événements ponctuels plutôt que de le consolider en tant que stratégie économique durable.

Il met en garde contre le fait que certaines entreprises commencent à exploiter ce recul à travers des campagnes marketing agressives pour retrouver leur part de marché, insistant sur le fait que l’impact réel du boycott ne réside pas seulement dans son ampleur, mais dans sa durabilité et sa capacité à imposer des changements permanents dans les politiques des entreprises mondiales.

source:https://www.aljazeera.net/ebusiness/2025/2/15/%d8%aa%d8%b1%d9%83%d9%8a%d8%a7-%d9%85%d9%82%d8%a7%d8%b7%d8%b9%d8%a9-%d8%ba%d8%b2%d8%a9

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