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CEDH condamne la France pour les lacunes du cadre sur le consentement

by charles
France

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la France pour des lacunes dans son cadre juridique relatif au consentement dans des affaires de violences sexuelles, selon des arrêts publiés ces derniers jours. Selon l’arrêt, la France « a manqué à ses obligations positives, qui lui imposaient d’instaurer des dispositions incriminant et réprimant les actes sexuels non consentis et de les appliquer de façon effective » et a été jugée en violation des articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Le dossier concerne notamment une pharmacienne qui, en 2010, aurait entamé une relation sadomasochiste avec un supérieur et a porté plainte en 2013; la CEDH souligne des « lacunes du cadre juridique » et des « défaillances » dans l’enquête. Elle a été condamnée à verser 20 000 euros au titre du dommage moral et 1 503,77 euros pour ses frais de justice, selon l’arrêt. La Cour rappelle aussi que le consentement doit être libre et révocable, et qu’un contrat passé entre les parties ne peut pas fixer le consentement au moment des faits.

CEDH: lacunes du cadre sur le consentement et condamnation de la France

La CEDH affirme que la France a manqué à ses obligations positives et cite des lacunes du cadre juridique et des défaillances lors de sa mise en œuvre, citant « l’exclusion des atteintes sexuelles dénoncées par E.A. du cadre de l’enquête », le « caractère parcellaire des investigations », « la durée excessive de la procédure », et les « conditions dans lesquelles le consentement d’E.A. a été apprécié par les juridictions ». Elle réaffirme aussi que « le consentement doit traduire la libre volonté d’avoir une relation sexuelle déterminée, au moment où elle intervient et en tenant compte de ses circonstances ». « Dès lors, aucune forme d’engagement passé – y compris sous la forme d’un contrat écrit – n’est susceptible de caractériser un consentement actuel à une pratique sexuelle déterminée, le consentement étant par nature révocable », souligne la cour.

Selon les enseignements de l’arrêt, la CEDH rappelle que le cadre juridique doit être efficace et que les mécanismes de prise en compte du consentement ne peuvent pas être contournés par des preuves formelles ou des accords antérieurs entre adultes.

Contexte et suites de l’affaire en France

Le dossier porte sur E.A., préparatrice en pharmacie à Briey dans le Meurthe-et-Moselle en 2010, qui a entamé une relation sadomasochiste avec un chef de service, K.B., né en 1967. Elle a porté plainte en 2013 pour « viol avec torture et actes de barbarie par une personne abusant de son autorité », « violences physiques et psychologiques » et « harcèlement et agression sexuels ». Le prévenu, condamné en première instance pour violences volontaires et harcèlement sexuel, a été totalement relaxé en 2021 par la cour d’appel de Nancy, les juges estimant que les deux protagonistes avaient signé un contrat « maître/chienne » régissant leur relation, ce qui a conduit la plaignante à saisir la CEDH.

La Cour a donné raison aux avocates de la requérante qui dénonçaient une « victimisation secondaire » de leur cliente, c’est‑à‑dire le fait d’être traitée elle‑même comme fautive du fait de questions déplacées ou de remarques culpabilisantes lors de la procédure. « L’audience en appel a été décrite comme cauchemardesque », témoigne Nina Bonhomme Janotto, juriste à l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT), partie civile dans l’affaire.

Avant l’annonce de cet arrêt, l’avocate de la plaignante espérait qu’une condamnation puisse motiver le gouvernement à rendre effective une loi plus protectrice des femmes et pousser les juges à améliorer leur interprétation de la loi. La CEDH rappelle que, dans certains systèmes, le cadre juridique doit évoluer pour clarifier le sens du consentement, tout en insistant sur le fait que, comme l’indique la cour, « le consentement est par nature révocable ». En parallèle, une proposition de loi est en cours d’examen au parlement pour modifier la formulation française du viol afin de le définir comme « tout acte sexuel non consentant » et pour préciser que le consentement doit être « libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable ».

CEDH: arrêt sur le consentement en France
La CEDH juge les lacunes du cadre sur le consentement en France.

Source : AFP

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