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De récentes découvertes archéologiques à Pompéi remettent en question l’idée que les femmes de l’Antiquité n’existaient que par leur rôle d’épouse, comme l’explique Emily Hauser, de l’université d’Exeter. Ces trouvailles invitent à repenser la place des femmes dans la société romaine, dévoilant une réalité plus complexe et valorisante.
Les routes de la mémoire à Pompéi
Pour les Romains de l’Antiquité, les routes menant aux villes étaient bien plus que de simples voies de passage : elles étaient de véritables « voies de la mémoire ». Le long de ces chemins, des tombes jalonnaient l’espace, certaines ornées d’inscriptions modestes en souvenir des défunts, d’autres plus imposantes, aménagées pour accueillir les proches lors de festivités commémoratives.
Certaines sépultures s’adressaient directement aux passants, comme si les occupants pouvaient transmettre leurs expériences. Un exemple remarquable est celui de l’affranchi Publius Vesonius Phileros, dont la tombe porte cette inscription :
« Étranger, attends un peu si cela ne te dérange pas, et apprends ce qu’il ne faut pas faire. »
Entrer et sortir de Pompéi revenait ainsi à se souvenir des modes de vie et de la manière dont on avait vécu et quitté ce monde, tout en rendant hommage à ceux qui avaient parcouru les mêmes chemins.
Une tombe monumentale révélatrice
La récente découverte d’une tombe monumentale près de l’entrée est de la ville, surmontée de sculptures grandeur nature représentant une femme et un homme, constitue une trouvaille fascinante. Ce monument invite à réfléchir sur les individus qui ont vécu et sont morts dans cette cité italienne animée.
Le cœur de la tombe est un grand mur parsemé de niches destinées à recevoir des restes incinérés. Au sommet, une sculpture en relief montre une femme et un homme côte à côte, sans toutefois se toucher. La femme, mesurant 1,77 m, est légèrement plus grande que l’homme, qui fait 1,75 m. Drapée d’une tunique, d’un manteau et d’un voile symbolisant la féminité romaine, elle porte un pendentif en forme de croissant de lune appelé lunula. Ce bijou, lié aux cycles lunaires, évoque la fécondité et la naissance des femmes. L’homme est vêtu de la toge romaine typique, signe de son statut de citoyen romain.
Une identité surprenante
En archéologie, la représentation d’un couple homme-femme dans une tombe suggère souvent des époux. Pourtant, un détail notable remet cette hypothèse en question : la femme tient dans sa main droite une branche de laurier, un attribut des prêtresses utilisées lors des rituels religieux pour souffler la fumée de l’encens et des herbes.
Dans la Rome antique, les prêtresses jouissaient de pouvoirs exceptionnels pour des femmes. Selon certaines hypothèses, cette femme pourrait être une prêtresse de la déesse Cérès, déesse romaine de l’agriculture, équivalente de la déesse grecque Déméter.
La présence conjointe de symboles reflétant leurs statuts respectifs — prêtresse pour elle, togatus (« homme en toge ») pour lui — indique qu’elle est considérée comme un membre à part entière de la société pompéienne. Elle pourrait être sa mère, voire avoir une importance supérieure, ce qui expliquerait sa taille plus grande. Sans inscription, il demeure impossible de confirmer précisément leur lien. Ce qui est certain, c’est qu’une femme n’avait pas besoin d’être l’épouse d’un homme pour se tenir à ses côtés.
Un phénomène attesté au-delà de Pompéi
Ce phénomène ne se limite pas à Pompéi. Emily Hauser souligne dans son ouvrage Mythica, consacré aux femmes de la Grèce de l’âge du bronze, que les découvertes archéologiques récentes défient continuellement les idées reçues sur la place et le rôle des femmes dans les sociétés antiques.
Un exemple remarquable provient d’une sépulture royale à Mycènes, en Grèce, datant de la fin de l’âge du bronze, soit environ 1700 ans avant l’éruption du Vésuve. Un homme et une femme y ont été enterrés ensemble dans la nécropole royale. Initialement, les archéologues les ont identifiés comme un couple marié, mais une analyse ADN réalisée en 2008 a révélé qu’ils étaient en réalité frère et sœur.
Cette femme était donc enterrée en tant que membre de la famille royale par naissance et non par mariage, confirmant qu’elle possédait un statut distinct et reconnu par elle-même.
Redéfinir le rôle des femmes dans l’Antiquité
Des trésors de Mycènes aux ruines cendrées de Pompéi, les vestiges du monde antique racontent une histoire différente de celle longtemps admise. Les femmes de l’Antiquité n’étaient pas cantonnées à un rôle d’épouse. Elles pouvaient aussi être des figures influentes, des membres respectés de la société avec des fonctions religieuses ou sociales importantes.
À travers ces découvertes, il devient essentiel de revoir le regard porté sur le rôle des femmes dans l’Antiquité, en s’appuyant sur les preuves tangibles laissées par ces civilisations disparues.