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Dans le silence apparent, les murmures se multiplient autour de la présidence de France Télévisions. Les auditions des quatre candidats pour ce poste clé sont prévues les 12 et 13 mai devant l’Arcom, et chacun prépare son entrée en scène avec soin. Tandis que certains répètent leurs oraux pour éviter les pièges, d’autres verrouillent toute communication externe. Le caractère très politique de cette fonction pousse les candidats à la discrétion, laissant souvent leurs entourages diffuser leurs messages. Selon les rumeurs, Delphine Ernotte-Cunci, présidente actuelle, serait en bonne position pour décrocher un troisième mandat de cinq ans. Son projet intitulé « Réconcilier » aurait notamment obtenu l’aval de Rachida Dati, ministre de la Culture, avec qui elle entretient de bonnes relations.
Les dossiers prioritaires sous surveillance
En cas de reconduction, Delphine Ernotte envisagerait de renforcer la place de Stéphane Sitbon-Gomez, notamment après le départ à la retraite de Christian Vion, directeur général adjoint. Cependant, cette perspective est pour l’heure démentie par les proches de la présidente.
Du côté des personnalités phares, Anne-Sophie Lapix, présentatrice du journal de 20 heures sur France 2, subit une pression croissante à cause d’un recul d’audience face à TF1. Des rumeurs persistantes laissent entendre qu’elle pourrait rejoindre BFMTV, propriété du groupe du milliardaire Rodolphe Saadé, qui souhaiterait renforcer sa chaîne d’information en difficulté face à CNews. En interne, le nom de Caroline Roux, animatrice de C dans l’air sur France 5, est avancé comme possible remplaçante si Delphine Ernotte conserve sa présidence.
Par ailleurs, la chaîne d’information France info traverse une crise notable. Alors que les chaînes d’information seront regroupées en juin, France info affiche une part d’audience très faible à 0,8 % en 2024. Le directeur de l’information, Alexandre Kara, est contesté pour ses choix éditoriaux et son management, jugé trop laxiste. Une réorganisation a été annoncée à la suite d’une polémique survenue début février, lorsqu’un responsable d’une organisation touristique a été invité à débattre de la possible transformation de Gaza en « French Riviera ».
Une influence politique contestée
Beaucoup envisagent la reconduction de Delphine Ernotte en insistant sur le poids supposé des influences politiques dans ce choix, mais cette idée semble largement exagérée. Un ancien membre du collège du défunt CSA, ayant participé à la précédente nomination, confie ne pas avoir constaté d’interférences politiques, une constatation qui l’a lui-même surpris.
Le collège de l’Arcom, composé cette fois de huit membres au lieu de neuf (Antoine Boilley étant déporté pour éviter un conflit d’intérêts), devra voter à bulletin secret. En réalité, ce sont la qualité du dossier et les performances à l’oral qui pèseront le plus dans la décision. En 2020, bien que le dossier de Delphine Ernotte ait été jugé léger, c’est l’oral qui avait finalement conduit à sa reconduction, battant un candidat tel que Christopher Baldelli, dont le dossier écrit était jugé solide.
Une baisse du nombre de candidats
Le nombre de candidats à la présidence de France Télévisions diminue d’année en année, témoignant d’un attrait moindre pour ce poste complexe. On recensait 33 prétendants en 2015, 12 en 2020, puis seulement 7 ce printemps. Un candidat malheureux de 2020 souligne le manque de compétence des membres de l’Arcom à choisir un patron de grande entreprise, rappelant que pour la BBC, un cabinet de chasseurs de têtes est sollicité.
Le contexte budgétaire tendu, avec 40 milliards d’euros d’économies à réaliser dans le budget de l’année prochaine, ainsi que la perspective incertaine d’une holding commune, freinent les vocations. Certains noms prestigieux comme Bruno Patino, patron d’Arte, ou Thierry Thuillier, directeur de l’information de TF1, n’ont finalement pas concrétisé leur candidature. La rumeur concernant Marc-Olivier Fogiel, libre depuis son départ de BFMTV, n’a pas non plus été confirmée.
La holding, une menace pesante
Depuis plusieurs années, l’audiovisuel public est suspendu à un projet de création d’une holding regroupant l’INA, France Télévisions et Radio France. Soutenue par le gouvernement, cette réforme tarde à être adoptée et pourrait ne pas passer à l’Assemblée avant l’été. Ce flou sur l’avenir rend le poste peu attractif, surtout pour ceux qui devraient quitter un emploi stable dans le secteur privé pour un engagement potentiellement limité à six mois.
Cependant, face à la présidente sortante, le combat est toujours ouvert. Frédérique Dumas, ancienne députée macroniste et productrice, soutenue par le journaliste Olivier Galzi, ancien de France Télévisions, espère tirer son épingle du jeu. En cas de victoire, Galzi deviendrait son directeur de l’information.
Dumas mise sur son positionnement auprès des syndicats et son engagement en faveur du maintien de France 4, dont elle avait défendu le maintien en 2018 contre l’avis d’Édouard Philippe. Elle souhaite également permettre au studio de France Télévisions de produire pour d’autres entités et s’étonne que des personnalités du service public, comme Michel Cymes avec sa chaîne Mieux, puissent tirer seuls profit d’une notoriété acquise grâce au service public. Sa proposition comprend aussi l’instauration d’une comptabilité analytique pour mieux piloter le groupe de plus de 8 000 salariés, une pratique absente jusqu’à présent.
Des challengers à suivre
Parmi les autres candidats, Irène Grenet, ancienne de la régie de France Télévisions, et Jean-Philippe Lefèvre, ancien de Public Sénat, restent en lice. Bien qu’ils ne soient pas favoris face à Delphine Ernotte, l’arrivée récente d’un nouveau président à l’Arcom, Martin Ajdari, ainsi que de deux nouveaux membres, pourrait dynamiser cette élection, la rendant plus ouverte qu’un simple renouvellement automatique.