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Grèce : des migrants soudanais détenus sous une loi sévère
Selon le journal britannique The Guardian, les autorités grecques maintiennent en détention des centaines de migrants en situation irrégulière en vertu d’une loi stricte adoptée en 2014. Cette législation criminalise le trafic d’êtres humains et prévoit des peines pouvant aller jusqu’à 25 ans de prison pour les contrevenants.
Les trafiquants condamnés représentent le deuxième groupe le plus important de détenus en Grèce, derrière uniquement les personnes impliquées dans des affaires liées à la drogue.
Un afflux croissant de migrants soudanais en Grèce
Les Soudanais constituent désormais la quatrième plus grande communauté de demandeurs d’asile en Grèce. Leur nombre dépasse celui des migrants irréguliers traditionnels venant d’autres nationalités comme les Syriens ou les Palestiniens.
L’île de Crète s’impose comme un point d’entrée majeur pour les migrants irréguliers, totalisant plus d’un quart des arrivées depuis janvier, surpassant ainsi des îles auparavant très fréquentées telles que Lesbos et Samos.
Les autorités grecques rapportent que plus de 2 500 personnes originaires d’Afrique ont atteint la Crète cette année. Les données du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés indiquent une multiplication par plus de six des arrivées en 2024 par rapport à 2023.
Critiques sur la criminalisation des migrants soudanais
Gabriela Sanchez, chercheuse en migration à l’université de Georgetown, dénonce dans The Guardian la politique grecque envers les demandeurs d’asile soudanais. Elle souligne que criminaliser les réfugiés issus de la guerre civile soudanaise est contraire au protocole des Nations unies sur la traite des migrants.
Ce protocole stipule clairement qu’aucun migrant ne peut être poursuivi pour avoir facilité son propre passage. Selon elle, le fait que des pays européens jugent des jeunes migrants comme trafiquants est en contradiction avec les principes de ce protocole.
Le cas de Samuel, un jeune réfugié soudanais
Samuel, 19 ans, originaire de la ville de Geneina dans l’ouest du Darfour, a fui après le pillage de sa ville par les forces paramilitaires. Après un périple terrestre jusqu’en Libye, il a embarqué pour traverser la Méditerranée pendant deux jours en juin dernier.
Une opération de sauvetage menée par un navire de commerce et les garde-côtes grecs l’a conduit à Crète. Toutefois, les autres passagers l’ont accusé d’avoir conduit le bateau, ce qui constitue une infraction selon la législation grecque.
Si Samuel est reconnu coupable, il risque jusqu’à 15 ans de prison. Actuellement, il est détenu dans une prison pour mineurs à Avlona, près d’Athènes, avec environ 50 autres Soudanais, majoritairement des réfugiés de guerre accusés de trafic après avoir demandé l’asile en Europe.
Samuel nie les accusations : « Je suis un réfugié, pas un trafiquant »
Ancien étudiant en droit, Samuel affirme n’être qu’un réfugié cherchant la sécurité. Il explique avoir payé 12 000 dinars libyens (environ 2 226 dollars) à des passeurs en Libye, qui l’ont obligé à piloter le bateau lui-même.
Il évoque la séparation d’avec sa famille — sa mère, son père et ses cinq frères et sœurs — et le fait qu’il n’a pas eu de nouvelles d’eux depuis plus d’un an, alors qu’ils vivent dans des camps de déplacés internes.
La condamnation européenne de la politique grecque
Julia Winkler, chercheuse politique et co-auteure d’un rapport de 2023 sur la criminalisation des migrants en Grèce, critique vivement les États européens. Elle qualifie la situation à Crète d’« exemple brutal » illustrant que la prétendue « guerre contre le trafic » en Europe équivaut en réalité à la criminalisation même de la migration.