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Les ambitions expansionnistes du président américain Donald Trump, visant notamment le Groenland, ont relancé le débat sur l’indépendance du territoire. À tel point que le sujet, envisagé par la Constitution danoise, est au centre des élections législatives de mardi.
Les enjeux de l’indépendance au Groenland
L’indépendance se retrouve au cœur de la campagne électorale au Groenland. Les 57 000 habitants du territoire votent mardi 11 mars lors de législatives dont l’un des enjeux est de déterminer à quel moment rompre les amarres avec le Danemark, l’actuelle puissance tutélaire, sans tomber dans l’escarcelle de Donald Trump.
L’insistance parfois menaçante du président américain à prendre possession du Groenland a donné un coup de fouet aux aspirations indépendantistes parmi les habitants, nombreux à dire ne vouloir être ni danois ni américains, mais groenlandais.
Une nouvelle dynamique politique
« Donald Trump a en quelque sorte relancé la question de l’indépendance », explique la politologue Maria Ackrén à l’université du Groenland. « Ce n’est pas nouveau pour les Groenlandais, mais cela donne maintenant aux décideurs et aux politiciens groenlandais un élan pour peut-être atteindre des objectifs qui n’étaient pas possibles jusqu’à présent », ajoute-t-elle.
La question de l’indépendance a pris une grande place dans la campagne électorale, au milieu de thèmes tels que l’éducation, les affaires sociales, la pêche – 90 % des exportations de l’île – et le tourisme.
Une indépendance à différents rythmes
Si l’envie d’indépendance est largement partagée, les formations politiques en lice pour se disputer les 31 sièges du Parlement divergent sur le calendrier : « fast track » (voie rapide) ou plus long terme ?
Le parti nationaliste Naleraq (opposition), très visible pendant la campagne, réclame d’entamer rapidement le processus d’indépendance. Au précédent scrutin en 2021, il avait recueilli 12 % des voix.
« L’intérêt que nous constatons, non seulement de la part des États-Unis mais aussi du monde entier, joue en notre faveur », déclare Juno Berthelsen, l’un de ses candidats les plus en vue.
L’indépendance ? « On peut se hasarder à prédire que cela se fera dans un ou deux cycles électoraux » de quatre ans chacun, dit-il. Mais cela dépendra des négociations entre le Groenland et le Danemark.
Les défis économiques et sociaux
Depuis une loi de 2009, les Groenlandais peuvent déclencher eux-mêmes le processus d’indépendance qui nécessite de négocier un accord avec Copenhague, lequel doit ensuite être approuvé par référendum au Groenland et par un vote au Parlement danois.
Les deux composantes de la coalition sortante, Inuit Ataqatigiit (IA) et Siumut, sont globalement moins pressées. Elles estiment que le territoire doit d’abord atteindre une certaine viabilité économique. L’aide annuelle d’environ 530 millions d’euros versée par Copenhague représente un cinquième de son PIB.
« Les discussions sur l’indépendance sont toujours sur la table. C’est l’objectif final pour beaucoup d’entre nous au Groenland, mais ce sera dans 10, 20 ans ou plus », affirme Aaja Chemnitz, membre d’IA.
Une réalité partagée
Le chef de Siumut, Erik Jensen, ministre des Finances sortant, s’agace que la question de l’indépendance ait éclipsé d’autres enjeux quotidiens. « Tout le monde ici au Groenland parle de santé, des écoles et des crèches », souligne-t-il.
Dans les rues venteuses de Nuuk, les habitants oscillent entre le désir d’indépendance et le réalisme économique. « Nous voulons être indépendants du Danemark, car nous sommes considérés comme des citoyens de seconde zone », déclare Peter Jensen, un entrepreneur. Pourtant, les subventions de la métropole « nous ont gardés dans cette ‘prison' ».
L’exploitation des ressources minérales de l’île reste encore embryonnaire. « On doit d’abord réfléchir à la manière dont on peut devenir autosuffisant en matière de nourriture et de carburant », juge Ole Moeller, cadre dans une entreprise de transport.