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Une nouvelle onde de choc traverse le monde rural du Vieux Continent. Dès la semaine prochaine, une vaste mobilisation se prépare, symbolisée par une manifestation agriculteurs Europe majeure qui convergera vers Bruxelles. Au cœur de la colère : la refonte controversée de la Politique Agricole Commune (PAC) et les craintes persistantes liées à l’accord commercial avec le Mercosur.
Une fronde paneuropéenne : de Nicosie à Bruxelles
Le mécontentement ne connaît pas de frontières. Les agriculteurs chypriotes ont annoncé qu’ils descendraient dans la rue jeudi prochain pour contester la « nouvelle architecture » de l’Union européenne concernant l’agriculture. Thomas Thoma, secrétaire de l’union des agriculteurs chypriotes pour Nicosie et Kyrenia, a résumé l’état d’esprit général sur la chaîne Alpha : « L’Europe descend dans la rue, et nous prévoyons de le faire aussi pour résister à tout cela, afin qu’il y ait encore des agriculteurs demain ».
Cette mobilisation locale s’inscrit dans un mouvement bien plus large. Environ 40 délégations venues de toute l’Europe ont apporté leur soutien à la manifestation centrale prévue à Bruxelles. Des rassemblements sont également attendus dans plusieurs autres capitales européennes.
Cristiano Fini, président de l’organisation italienne CIA–Agricoltori Italiani, a confirmé l’ampleur du rassemblement : « Nous serons dans les rues de Bruxelles avec plus de 5 000 agriculteurs et au moins 1 000 tracteurs arrivant de tout le continent ». Il a rappelé avec force que l’agriculture est « appelée le secteur primaire pour une raison ».
Coupes budgétaires et tensions géopolitiques
Le principal grief des syndicats concerne les coupes prévues dans le budget de la PAC. Le sentiment d’abandon est palpable, exacerbé par le contexte géopolitique actuel. Les représentants syndicaux dénoncent un transfert de ressources, estimant que l’argent est retiré à l’agriculture « pour être donné aux guerres ».
Pour de nombreux exploitants, ces restrictions budgétaires menacent directement la viabilité de leurs fermes, alors que les coûts de production restent élevés et que les normes environnementales se durcissent.
Le spectre du Mercosur et la réaction française
Outre la question budgétaire, l’accord commercial entre l’UE et le bloc sud-américain du Mercosur reste un point de crispation majeur. Un porte-parole de la FNSEA, le principal syndicat agricole français, a indiqué que les manifestants exprimeraient leur ferme opposition à ce traité.
Les agriculteurs européens craignent une concurrence déloyale, redoutant d’être sous-cotés par des produits sud-américains soumis à des contrôles à l’importation jugés trop laxistes. En réponse à ces inquiétudes, l’UE a récemment assoupli certaines règles sur les émissions industrielles pour les élevages de porcs et de volailles, mais cela peine à convaincre la base.
Des concessions administratives sur la table
Bruxelles tente de calmer le jeu par des mesures de simplification administrative. Les élevages de bétail dans l’UE pourraient bientôt être soulagés de leurs obligations de déclarer leur utilisation d’eau, d’énergie et de matières premières. Les États membres obtiendraient l’option de rapporter ces émissions à l’UE au nom des agriculteurs, allégeant ainsi la bureaucratie.
Positions divergentes au sein des États membres
Face à la grogne, les gouvernements nationaux affichent des positions variées. Le gouvernement français a exigé des clauses de sauvegarde plus strictes pour protéger le marché unique européen de toute « perturbation » causée par un afflux d’importations sud-américaines. Une position partagée, avec des réserves, par la Pologne, l’Irlande, la Hongrie, les Pays-Bas et l’Autriche.
L’Italie, quant à elle, navigue en eaux troubles. Si le pays est le deuxième exportateur de l’UE vers le Mercosur et que la Première ministre Giorgia Meloni est une proche alliée du président argentin Javier Milei, Rome n’a pas encore tranché officiellement. Toutefois, le ministre de l’Agriculture Francesco Lollobrigida pousse, à l’instar de ses homologues français, pour des garanties renforcées, tout en accueillant favorablement l’allègement des régulations sur le reporting des émissions.