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En 2023, le gouvernement a lancé une initiative ambitieuse, concrétisant une promesse formulée par Emmanuel Macron lors de sa campagne : permettre aux ménages modestes d’accéder à un véhicule électrique pour moins de 100 € par mois. Cette démarche vise à répondre simultanément à la crise du pouvoir d’achat et à l’urgence climatique. Sous l’égide d’Agnès Pannier-Runacher, le dispositif cible principalement les 50 % de foyers les plus modestes, les actifs dépendant de leur voiture pour leurs trajets quotidiens, ainsi que les résidents de zones peu desservies par les transports en commun.
Un engouement populaire
L’enthousiasme suscité par cette mesure a été immédiat. En moins d’un mois, près de 50 000 demandes ont été enregistrées, incitant le gouvernement à doubler les volumes prévus pour 2025. La ministre de la Transition énergétique a précisé : « On l’appelle le leasing à 100 euros, mais on peut avoir accès à des voitures dès 54 euros par mois ». Cet engouement démontre que la voiture électrique peut devenir un bien de consommation accessible, et pas simplement un luxe réservé à une élite urbaine.
Les limites du dispositif
Cependant, ce succès rapide a révélé certaines limites structurelles : offre industrielle insuffisante, manque d’information chez les distributeurs, parcours d’achat complexe, et fragilité du modèle économique à long terme. Pour que le leasing social tienne ses promesses, il doit évoluer d’une simple expérimentation à un véritable outil de politique industrielle et sociale.
Le ministre de l’Industrie, Roland Lescure, a souligné que bien que la demande soit forte, le nombre de modèles fabriqués en France est encore insuffisant. Carlos Tavares, ancien directeur général de Stellantis, a également mis en garde : « Il ne faut pas couper les réacteurs au décollage ».
La mise en œuvre et ses défis
La mise en œuvre du leasing social a également été critiquée. De nombreux consommateurs ont exprimé des frustrations face à un processus jugé opaque et trop dépendant des concessionnaires, souvent mal informés. Des témoignages font état d’un « parcours du combattant », avec des délais flous et un manque d’accompagnement concernant la recharge, l’assurance, et la maintenance.
De plus, certains professionnels, comme Xavier Horent, délégué général de l’association professionnelle Mobilians, alertent sur les effets secondaires : en encourageant le neuf à bas prix, on déstabilise le marché de l’occasion et on menace la valeur résiduelle des véhicules, ce qui pourrait compromettre la viabilité économique du leasing à moyen terme.
Un retour prévu en 2025
Le leasing social devrait faire son retour en septembre 2025, avec une enveloppe budgétaire portée à 370 millions d’euros. L’État prévoit de proposer 50 000 nouveaux véhicules, doublant ainsi l’objectif initial de 2023, dont 5 000 unités réservées aux habitants des zones à faibles émissions (ZFE). Cette relance témoigne de la volonté du gouvernement de faire du leasing social un élément durable de la politique de transition écologique, tout en apprenant des leçons de la première édition.
Priorités et perspectives
Pour renforcer cette initiative, plusieurs priorités doivent être abordées :
- Renforcement de l’offre industrielle locale : Seuls les véhicules produits en Europe seront éligibles à l’édition 2025, une avancée essentielle pour la réindustrialisation.
- Meilleur ciblage des usages : Il est nécessaire d’inclure des critères géographiques et de distance domicile-travail pour mieux définir les besoins réels.
- Proposition d’un leasing tout compris : Intégrer la recharge, l’assurance, et la maintenance pour faciliter l’accès à l’électrique.
- Intégration du véhicule d’occasion : Structurer une chaîne de valeur durable en favorisant la circulation des modèles récents.
- Territorialisation du dispositif : Amplifier les efforts pour répondre aux besoins spécifiques des territoires périurbains, ruraux ou industriels.
Une initiative à double enjeu
Le leasing social se positionne comme un acteur clé de la justice sociale, offrant une solution aux ménages qui nécessitent une voiture sans pouvoir se permettre d’en acheter une à 30 000 €. De plus, il renforce la souveraineté industrielle en incitant les fabricants comme Renault et Stellantis à relocaliser ou à maintenir leur production en Europe.
Enfin, la cohérence territoriale est essentielle pour assurer la réussite de cette initiative. Les infrastructures comme les bornes de recharge et les transports collectifs sont des conditions préalables pour faire de l’électrique une solution viable.
Des défis à relever
Le leasing social a démontré sa capacité d’attraction et peut devenir un pilier de la transition écologique, à condition de passer à une échelle plus ambitieuse. Les pouvoirs publics doivent renforcer l’encadrement, clarifier les critères, et élargir l’offre pour inclure le marché de l’occasion.
Si la prochaine phase se contente de reproduire le premier acte, le risque de déception pourrait s’accentuer, aggravant les tensions sur le marché de l’occasion et freinant l’adhésion populaire à la transition.
Le rendez-vous est fixé au 30 septembre. Il appartient aux pouvoirs publics, aux industriels et aux territoires de faire de cette deuxième saison un véritable acte fondateur pour une voiture électrique populaire, durable, et fabriquée en France.