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Les avantages pour le Rwanda d’accueillir des réfugiés britanniques
Pourquoi le Rwanda?
Après deux ans de débats, il semble que le plan du Parti conservateur britannique de déporter les demandeurs d’asile illégaux vers le Rwanda commence à se concrétiser. Le 23 avril dernier, le Parlement a adopté une loi permettant au gouvernement de transférer ces migrants vers le Rwanda, franchissant ainsi le dernier obstacle juridique pour le Premier ministre Rishi Sunak.
- Entre 2013 et 2018, environ 4 000 demandeurs d’asile érythréens et éthiopiens ont été envoyés du Moyen-Orient vers le Rwanda et l’Ouganda dans le cadre d’un plan secret de « rapatriement volontaire ».
- Depuis 2019, le Rwanda participe à un programme avec le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et l’Union africaine pour accueillir des réfugiés et demandeurs d’asile africains détenus en Libye.
Boris Johnson, ancien Premier ministre britannique, avait annoncé en avril 2022 qu’à partir du 1er janvier de la même année, tout demandeur d’asile entrant illégalement au Royaume-Uni pourrait être envoyé au Rwanda, où sa demande serait traitée.
Humanité et finances
Londres espère dissuader les migrants de traverser la Manche par petites embarcations et réduire les coûts exorbitants liés au système d’asile britannique, estimés à environ 4 milliards de livres sterling. En parallèle, Kigali voit dans cet accord une opportunité de solidarité humanitaire et une source de financement.
- Le Royaume-Uni versera 120 millions de livres sterling pour relocaliser 300 personnes, plus 20 000 livres par individu.
- Le ministère de l’Intérieur britannique couvrira les frais de traitement et les coûts opérationnels, qui dépassent les 150 000 livres par personne.
Les estimations britanniques indiquent que le coût total de ce plan pourrait varier entre 1,1 milliard de livres si les migrants quittent le Rwanda immédiatement, et 3,9 milliards s’ils s’y établissent pour au moins cinq ans.
Investissement dans le futur
L’accord représente une opportunité économique majeure pour Kigali. Londres investira au moins 370 millions de livres sterling dans un fonds de transformation économique, dont 240 millions ont déjà été versés à la fin de 2023. Ce financement pourrait créer de nouvelles opportunités économiques, impliquant les réfugiés dans le marché du travail local et le développement de projets entrepreneuriaux.
Selon Girey Aksu, directeur adjoint des recherches à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, cet accord est « un investissement dans le futur », contribuant à la prospérité du Rwanda par l’innovation et l’implication des réfugiés.
Gains politiques et diplomatiques
L’accord renforce le rôle du Rwanda en tant qu’acteur clé pour résoudre les crises migratoires, cimentant ainsi son statut de partenaire indispensable pour l’Occident. Kigali espère également qu’en coopérant avec Londres, elle pourra atténuer les critiques occidentales concernant son implication dans les conflits de l’est de la République démocratique du Congo.
Déjà, depuis la signature de l’accord en 2022, Londres a modéré ses critiques à l’égard de Kigali, contrairement à d’autres pays occidentaux. Par exemple, la France et la Belgique ont souvent critiqué le Rwanda pour son soutien présumé au groupe rebelle « M23 » en RDC.
Améliorer l’image
Pourtant, des organisations de défense des droits de l’homme accusent Kigali de pratiques abusives envers les opposants, y compris la détention arbitraire et les disparitions forcées. En réponse à ces critiques, le Rwanda met en avant son tradition d’accueil des réfugiés, soulignant l’absence de hostilités envers eux.
Yolande Makulo, porte-parole du gouvernement rwandais, affirme que « le Rwanda a accueilli des réfugiés depuis des décennies, intégrant ce devoir mondial dans sa culture ».
Quelques observateurs estiment que cet accord avec le Royaume-Uni vise également à améliorer l’image internationale du Rwanda et à réduire les critiques sur son bilan en matière de droits de l’homme.
Volontairement ou non, cet accord pourrait bien représenter pour le Rwanda une complexité à la fois morale et financière, tout en mettant en lumière les enjeux mondiaux des politiques migratoires actuelles.