Table of Contents
Le débat autour de l’acétamipride renforce les tensions dans le secteur agricole et environnemental
Le projet de loi Duplomb, actuellement en discussion en France, fait émerger une controverse intense autour de la réintroduction potentielle de l’acétamipride, un insecticide des néonicotinoïdes interdit dans l’Hexagone depuis 2020. Alors que ses défenseurs, notamment des agriculteurs, soulignent son efficacité pour la protection des cultures, ses opposants et certains experts alertent sur ses effets dévastateurs sur la santé et l’environnement.
Un insecticide polémique toujours utilisé en Europe malgré l’interdiction en France
Bien que interdit en France, l’acétamipride continue d’être autorisé dans 26 pays européens, tels que l’Allemagne, la Pologne ou la Croatie. Ce produit, réputé efficace contre les insectes nuisibles comme les pucerons transmettant la jaunisse ou la mouche de la noisette, est largement plébiscité par les agriculteurs. Selon le sénateur Laurent Duplomb, ces derniers dénoncent une concurrence déloyale face aux importations, car l’interdiction française leur prive d’un outil essentiel.
« L’acétamipride est autorisé dans la majorité des pays européens, ce qui crée une disparité. La filière agricole française souffre de cette situation », explique-t-il lors d’un entretien avec franceinfo.
Les risques pour la biodiversité et la santé humaine
Les défenseurs de l’environnement mettent en avant les effets nocifs de cet insecticide, notamment sur les abeilles et autres pollinisateurs sauvages. Des études ont montré que l’acétamipride persiste dans les sols et l’eau, contaminant ainsi l’écosystème et provoquant une mortalité massive chez les abeilles lors des pulvérisations. La ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, a récemment rejeté ces affirmations, assurant que l’acétamipride n’a pas d’impact direct sur la mortalité des abeilles.
Le scientifique Philippe Grandcolas, du CNRS, conteste cette position. Il souligne que si l’acétamipride est considéré comme le « moins toxique » des néonicotinoïdes, il reste cependant très toxique. Il insiste également sur l’absence de données suffisantes concernant ses effets sur les pollinisateurs sauvages et la non prise en compte de ses effets subtils, pouvant nuire à la santé sur le long terme.
Les dangers potentiels pour la santé humaine
Au-delà de l’environnement, l’acétamipride inquiète la communauté scientifique pour ses impacts sur la santé humaine. Dès 2013, l’EFSA, l’Autorité européenne de sécurité alimentaire, a alerté sur ses risques pour le développement du système nerveux chez l’enfant, le cerveau et la mémoire. La Ligue contre le cancer évoque également « un potentiel cancérogène » et rappelle que de nombreuses études montrent que cette substance persiste dans le corps humain et peut provoquer des troubles neurodéveloppementaux, notamment chez le fœtus.
Le débat autour de la loi Duplomb, qui pourrait permettre la réintroduction de l’acétamipride, oppose donc différents acteurs : d’un côté, une majorité d’agriculteurs qui le jugent indispensable, et de l’autre, des scientifiques, défenseurs de l’environnement et citoyens signataires de la pétition record dépassant un million de signatures, qui réclament plus de précautions et d’interdictions.
Les questions restent ouvertes quant à l’équilibre entre besoin agricole et protection de la santé publique, à une époque où l’impact des pesticides sur l’environnement et la santé ne cesse d’être scruté de près.