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Ce samedi, une manifestation pro-Palestine a rassemblé plus d’un millier de personnes sur la place du Parlement britannique à Londres. Ce rassemblement silencieux s’est tenu parallèlement à une marche nationale de solidarité avec la Palestine, qui a réuni des dizaines de milliers de manifestants brandissant des pancartes affirmant leur opposition à l’« extermination de masse » et leur soutien à l’organisation Palestine Action.
La police britannique a annoncé dans un communiqué officiel avoir procédé à l’arrestation de 365 militants. Les organisateurs précisent que plus de 400 personnes ont déployé des banderoles devant le Parlement en refusant l’ordre policier de lever le camp ou d’être arrêtés selon les lois antiterroristes, qui exposent les détenus à des peines pouvant aller jusqu’à 14 ans de prison.
Les organisateurs souhaitent dépasser le record d’arrestations établi en 1990 lors des manifestations contre la politique fiscale, où 339 personnes avaient été appréhendées. Grâce à l’utilisation de bureaux mobiles pour les prisonniers, la police a réussi à surpasser ce chiffre, inscrivant cette manifestation comme l’une des plus vastes campagnes d’arrestations à Londres depuis plusieurs décennies.
Une mobilisation importante
Ce rassemblement intervient dans un contexte de montée de la violence dans la bande de Gaza et après la classification de l’organisation Palestine Action comme groupe terroriste par le gouvernement britannique. Cette décision fait suite à l’intrusion de plusieurs membres dans des usines d’armement, notamment l’usine « Filton 18 », principal exportateur de drones Quad Copter utilisés dans les crimes de guerre en Israël.
Le rassemblement a débuté à midi, dans le calme, avec des participants assis en rangées serrées tenant leurs affiches. Ils ont exprimé leur rejet des restrictions à la liberté d’expression et des tentatives de dissimulation des crimes perpétrés contre les Palestiniens. Parmi eux, des militants issus de divers secteurs, tels que des avocats, des médecins, des enseignants, ainsi que des personnalités publiques et culturelles.
La sit-in pacifique n’a duré que quelques heures avant que la police londonienne ne lance une vaste opération d’arrestations, ciblant 150 personnes principalement en vertu de l’article 13 de la loi antiterroriste de 2000, autorisant la détention préventive de suspects d’actes terroristes. Cette mesure a été dénoncée par Amnesty International qui a adressé un avertissement au commissaire de police Mark Rowley, soulignant une violation du droit international des droits humains.
Des figures emblématiques parmi les détenus
Parmi les personnes arrêtées figurent plusieurs personnalités, des médecins, des militants de groupes religieux, une personne non-voyante en fauteuil roulant ainsi que Robert Del Naja, membre du groupe Massive Attack, et l’activiste Bianca Jagger, tous deux porte-parole de la campagne « Défendre les jurés » à l’origine de l’événement.
Le retraité infirmier Lee Evans, célèbre pour une vidéo virale dans laquelle il suppliait les soldats égyptiens d’ouvrir le passage de Rafah, était également présent. Conscient des risques d’arrestation, il a affirmé ne pas craindre les poursuites tant que le génocide se poursuit, soutenu par sa famille et déterminé à défendre les femmes et enfants palestiniens victimes de cette tragédie.
Lee Evans a indiqué qu’il ne s’agissait pas de son premier voyage à Londres pour participer à ce type d’événements et qu’il avait déjà été arrêté sous les lois antiterroristes, attente de son procès. Son engagement reste intact malgré les conséquences judiciaires attendues.
Désobéissance civile et appel à la justice
Un message écrit émanant de plusieurs militants présents à la manifestation a été transmis, incluant une déclaration de Moazzam Begg, ancien détenu à Guantanamo et directeur exécutif de l’organisation CAGE. Il rappelle que la désobéissance civile a été historiquement utilisée au Royaume-Uni, dans le mouvement des droits civiques américains et dans la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud, pour combattre des lois injustes.
Beg souligne que l’événement ne concerne pas uniquement Palestine Action, mais le danger plus large lié à l’utilisation des lois antiterroristes pour restreindre les libertés, questionnant la criminalisation de la lutte contre l’apartheid et le génocide.
Moazzam Begg a été arrêté peu de temps après l’envoi de ce message. Anas Mustafa, responsable des relations publiques de CAGE, a expliqué que le rassemblement s’inscrit dans la campagne « Lift the Ban » visant à lever l’interdiction imposée à Palestine Action. Une décision judiciaire contestée sera réexaminée en novembre prochain, après que la Cour Suprême ait autorisé un recours initié par l’activiste Huda Ammori, fondatrice du mouvement.
Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a déclaré que cette interdiction est contraire au droit international.
Un climat de tension et d’inquiétude
Adi Adilikan, adjoint du commissaire de police de Londres en charge de la sécurité, a précisé que les prochains jours s’annoncent particulièrement chargés avec plusieurs manifestations simultanées, nécessitant une présence policière importante.
Il a réaffirmé l’engagement de la police à agir avec équité et impartialité, à appliquer la loi et à maintenir la paix en empêchant la convergence de groupes aux opinions opposées, ainsi qu’à éviter des troubles majeurs susceptibles de perturber la vie des citoyens.
Cette opération de maintien de l’ordre mobilisera d’importantes ressources policières.
En réaction, Sasha Deshmukh, directeur exécutif d’Amnesty International Royaume-Uni, a exprimé une profonde inquiétude face aux arrestations massives des manifestants pacifiques sous la loi antiterroriste. Il a rappelé que le droit à la protestation pacifique est fondamental, et que la colère suscitée par le génocide en cours à Gaza est compréhensible et légitime selon le droit international des droits humains.
Deshmukh a souligné que les protestataires ne faisaient pas l’apologie de la violence et que leur traitement comme des terroristes est profondément inapproprié, voire absurde.
Il a critiqué la législation britannique antiterroriste, jugée trop large et floue, menaçant la liberté d’expression. Ces arrestations récentes confirment ces craintes. Plutôt que de criminaliser les manifestants pacifiques, les autorités devraient concentrer leurs efforts sur des actions immédiates et décisives pour mettre fin au génocide à Gaza et aux risques d’implication du Royaume-Uni.