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Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou est apparu devant la caméra, tenant une feuille de papier, avec en arrière-plan un écran montrant les images de trois enfants de Gaza visiblement affaiblis par la faim sous le blocus.
Dans son allocution filmée dimanche dernier, Netanyahou a commenté une à une ces images, tentant de déformer leur sens et de nier l’existence d’une famine confirmée par de nombreux rapports et témoignages palestiniens et internationaux.
Cette déclaration s’inscrit dans une campagne israélienne croissante visant à nier et contester tout lien entre le siège de Gaza et la famine qui y sévit.
Netanyahou a qualifié d’« Fake » (faux) ces photos, derrière lesquelles se cachent pourtant des tragédies réelles de familles ayant vu leurs enfants perdre du poids et de la force à cause de la faim. Il a attribué leur souffrance à des maladies génétiques, s’appuyant sur des informations délibérément trompeuses diffusées par l’occupant.
L’équipe d’enquête de Al Jazeera a suivi ces allégations et, à l’aide de preuves et de documents officiels, a révélé les vérités complètes concernant chaque enfant, dévoilant ainsi la réalité au-delà de la propagande israélienne.
Cas d’Osama Al-Raqab : Une maladie génétique démentie par le dossier médical
Benjamin Netanyahou a commencé son intervention en lisant d’une feuille, affirmant que l’enfant gazéen Osama Al-Raqab souffrait de problèmes de santé génétiques qui l’empêchaient d’absorber correctement les nutriments, expliquant ainsi sa maigreur apparente sur les photos.
Cependant, un examen approfondi a réfuté cette version. Un certificat médical officiel délivré par le ministère palestinien de la Santé le 23 avril dernier atteste qu’Osama ne souffrait d’aucune maladie génétique. Sa dégradation physique est le résultat direct de la malnutrition causée par la guerre et le blocus, selon le Dr Ahmed Al-Farra, son médecin traitant.
Pour confirmer ces faits, la mère d’Osama a montré dans la même vidéo des photos anciennes de son fils en bonne santé, avant que sa condition ne se dégrade en mars, suite au refus d’entrer des vivres dans la bande de Gaza assiégée.
Le 12 juin, Osama a été évacué vers un hôpital en Italie pour un traitement médical, son corps s’étant transformé en « squelette » à cause de la sévère malnutrition provoquée par la guerre et la fermeture des frontières. Des images publiées par des militants montrent sa perte de poids dramatique et son extrême faiblesse.
Accusations contre un enfant décédé et tromperie sur un autre cas
Dans la même vidéo, Netanyahou a prétendu que l’enfant Abdelkader Al-Fayoumi souffrait de troubles neurologiques héréditaires provoquant une faiblesse musculaire et une perte de poids. Il a soutenu que ce déficit musculaire, et non la faim, expliquait son état.
Or, une enquête menée par Al Jazeera révèle une contradiction flagrante. Selon des sources de l’hôpital baptiste de Gaza, Abdelkader est décédé le 25 juillet dernier des suites de la faim et de la malnutrition, dans un contexte d’interruption totale de la nourriture et des soins médicaux.
Par ailleurs, Netanyahou a présenté l’enfant Mohammed Zakaria Ayoub Al-Mutawqa, affirmant qu’il souffrait d’une maladie génétique, et a dénoncé les affirmations du Hamas, allant jusqu’à menacer de poursuivre le journal The New York Times pour « folie ».
Le dossier médical consulté à l’hôpital Al-Rantisi à Gaza montre que Mohammed, né le 23 décembre 2023, a effectivement souffert de séquelles dues à un manque d’oxygène à la naissance, engendrant un retard cérébral et moteur. Il avait besoin d’une alimentation spécialisée, mais son état s’est aggravé en raison de la malnutrition aiguë liée à la guerre.
Sa mère, Hidaya Al-Mutawqa, a déclaré dans une interview que son fils, âgé d’un an et sept mois, « n’était pas malnutri à la naissance », même s’il souffrait du déficit en oxygène. Elle a précisé dans une vidéo sur Instagram que Mohammed vivait normalement avant l’apparition de la malnutrition sévère, due à la guerre et à la famine.
Son poids a chuté de 9 à 6 kilogrammes, tandis qu’elle vit désormais dans une tente de fortune sans services de base.
Données erronées sur l’aide humanitaire et la situation du blocus
Netanyahou n’a pas seulement accusé les Gazaouis de falsification des images de faim. Il a affirmé également que l’armée israélienne avait récemment autorisé l’entrée de tonnes d’aide humanitaire par le passage de Kerem Shalom, mais que les aides étaient bloquées côté gazéen et non distribuées, illustrant ses propos par une photo prétendument récente.
Or, cette image fut en réalité publiée en décembre 2024, bien avant le pic de la crise alimentaire délibérée à Gaza, ce qui dément la thèse israélienne quant à son lien avec la situation actuelle.
Parallèlement, Israël mène une campagne médiatique coordonnée non pas pour secourir les affamés, mais pour déformer la tragédie et accuser les organisations humanitaires, l’ONU et le Hamas de détourner l’aide et de la stocker dans les tunnels.
Al Jazeera s’est entretenu avec des sources au sein de plusieurs agences onusiennes qui ont clairement indiqué que l’UNRWA n’a pas pu faire entrer de l’aide humanitaire dans Gaza depuis le 2 mars, à cause du blocus israélien strict.
L’UNRWA a déclaré à notre équipe que « malgré les accusations israéliennes, nous faisons face à des restrictions sévères qui limitent notre capacité à fournir nourriture, médicaments et matériel sanitaire dans la bande de Gaza, où nous sommes la plus grande agence onusienne sur place ».
Elle a ajouté que près de 6 000 camions d’aide humanitaire attendent en Égypte et en Jordanie l’autorisation d’entrer à Gaza, avec un risque important que leur contenu périme.
Enfin, l’agence onusienne souligne que l’occupant contrôle entièrement les points d’entrée et de sortie, ainsi que les déplacements humanitaires à l’intérieur même de Gaza, entravant toute coordination depuis plus de 22 mois.