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Nouvelle-Écosse : 5 ans après la tuerie de Portapique, un souvenir sobre

by Sara
Canada, Nouvelle-Écosse

Le village de Portapique, en Nouvelle-Écosse, est resté gravé dans la mémoire collective depuis avril 2020, moment où il a été le théâtre de la tuerie de masse la plus meurtrière de l’histoire moderne du Canada. Un tireur déguisé en policier, au volant d’une fausse voiture de police, a semé la terreur durant une cavale violente qui a coûté la vie à 22 personnes.

Panneau routier de la route Portapique Beach et deux véhicules de police qui bloquent l'entrée de la route.

La tuerie de Portapique a fait 22 morts les 18 et 19 avril 2020. (Photo d’archives) – Radio-Canada / Jonathan Villeneuve

Un hommage sobre cinq ans après le drame

Cinq ans après cet événement tragique qui a profondément marqué la Nouvelle-Écosse et dont l’onde de choc a dépassé les frontières provinciales, le souvenir de la tuerie de Portapique est commémoré de façon sobre. Aucune cérémonie officielle n’a été organisée par les autorités.

Dans un communiqué, le premier ministre Tim Houston a appelé ses concitoyens à faire preuve de compassion et de soutien en cette période difficile, tout en respectant l’intimité des familles et des communautés affectées. Il a souligné l’importance de leur laisser l’espace nécessaire pour faire leur deuil, réfléchir et se souvenir.

Les drapeaux seront en berne vendredi et samedi dans toute la province, et une minute de silence est invitée à midi ces deux jours en mémoire des victimes.

Une voiture de la GRC près d'une exposition commémorative à Portapique après la fusillade de masse en avril 2020.

Photo d’archives – Radio-Canada / Brett Ruskin

Un deuil toujours profond

La tuerie a laissé un traumatisme durable, souligne Myra Freeman, présidente du comité chargé de la mise en œuvre des 130 recommandations issues de la commission d’enquête publique sur la tragédie. Elle rappelle que cinq ans après, les effets restent très présents dans la communauté.

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a refusé de commenter à ce sujet, tandis que Radio-Canada a choisi de ne pas solliciter les proches des victimes pour ce reportage, respectant ainsi leur intimité.

La diversité des réactions face au deuil

Janah Fair, responsable régionale en santé mentale à Santé Nouvelle-Écosse, explique que chacun vit son deuil à sa manière. Certains trouvent utile de partager leur histoire, alors que d’autres éprouvent des difficultés, ressentent un traumatisme ou sont submergés par les émotions.

Elle insiste sur la nécessité d’être très prudents afin de respecter la vie privée des communautés et leur manière individuelle de faire face à ce drame.

Contexte et déroulement de la tragédie

Au printemps 2020, la Nouvelle-Écosse faisait face à la pandémie de COVID-19, imposant un confinement strict tandis que les hôpitaux accueillaient de nombreux patients. Personne n’imaginait qu’un denturologiste de 51 ans allait déclencher la cavale la plus meurtrière du pays moderne dans ce petit village de la baie de Cobequid.

Photo de la fausse autopatrouille que conduisait le tueur de Portapique.

Photo d’archives – GRC Nouvelle-Écosse

L’auteur, connu pour ses comportements violents et sa possession illégale d’armes acquises aux États-Unis, possédait également une collection d’objets liés aux forces de l’ordre, incluant d’anciennes voitures de la GRC. Lors d’une dispute conjugale au chalet familial, il enferme sa compagne Lisa Banfield dans une de ses voitures de police factices, revêt un uniforme et se lance dans une série d’attaques meurtrières.

Une scène d’apocalypse

Lisa Banfield parvient à s’échapper, mais le tireur assassine plusieurs voisins de sang-froid, certains devant leurs enfants, tout en incendiant plusieurs bâtiments, y compris son propre chalet.

Lorsque les premiers appels d’urgence arrivent à la GRC vers 22h, les policiers les plus proches sont à 45 kilomètres. Ceux qui interviennent décrivent une scène chaotique avec incendies, explosions et échanges de tirs.

Le tueur de Portapique au volant de sa voiture a semé la terreur.

Photo d’archives – Radio-Canada

Treize personnes sont assassinées dans le village, notamment Greg et Jamie Blair, Joy Bond, Peter Bond, et plusieurs autres. Le tireur fuit ensuite par un chemin privé non référencé sur les cartes officielles, passant la nuit dans un parc industriel à Debert, où sa présence passe inaperçue en plein confinement.

Au petit matin du 19 avril, il reprend sa cavale meurtrière en tuant trois personnes supplémentaires à Wentworth et en incendiant une maison.

Montage des photos des victimes de la tuerie de Portapique.

Photo : Radio-Canada / CBC

La traque d’une course contre la montre

Lisa Banfield, en se cachant dans les bois, fournit aux policiers des informations cruciales : le suspect est habillé en policier et conduit un véhicule presque identique à ceux de la GRC. Les policiers lancent une chasse à l’homme sur plus de 200 kilomètres.

Le tireur continue de tuer, ciblant notamment une femme sur le bord de la route, deux infirmières, et tue une policière lors d’un échange de tirs à Shubenacadie. Il vole également plusieurs véhicules au fil de sa fuite, se terminant à une station-service d’Enfield où il est finalement abattu par les agents de la GRC.

Réplique du véhicule de police du tireur capturée par une caméra de sécurité à Truro.

Photo d’archives – Gracieuseté : GRC

Policiers en position après l'interception du tireur à Enfield.

Photo d’archives – La Presse canadienne / Tim Krochak

Enquête publique et recommandations

Après 13 heures d’horreur, la tuerie prend fin, déclenchant une demande de commission d’enquête publique, finalement acceptée par les gouvernements fédéral et provincial. La Commission des pertes massives a examiné 40 000 documents, recueilli des centaines de témoignages et tenu de nombreuses audiences durant près de deux ans.

Le juge Michael MacDonald président de la Commission des pertes massives.

Photo d’archives – La Presse canadienne / Andrew Vaughan

Le rapport final a révélé que la GRC n’était pas préparée à gérer une tuerie d’une telle ampleur, notamment en raison de graves défaillances dans les communications internes et externes. Dès les premières minutes, les informations reçues du 911 n’étaient pas correctement relayées aux agents sur le terrain.

Au cours de la chasse à l’homme qui s’est étendue sur plus de 200 kilomètres, les problèmes de communication ont persisté, allant jusqu’à des tirs accidentels sur une caserne de pompiers d’Onslow-Belmont, prise à tort pour le tireur.

Caserne des pompiers d'Onslow-Belmont touchée par des tirs accidentels.

Photo d’archives – Radio-Canada / CBC

Par ailleurs, la GRC a omis d’émettre une alerte publique d’urgence, se limitant à des messages sur Twitter, ce qui, selon l’enquête, aurait pu sauver des vies.

Des mesures et leur mise en œuvre

Suite aux recommandations de la commission, des améliorations concrètes ont été apportées, notamment dans le système d’alertes d’urgence, aujourd’hui largement utilisé pour les interventions policières et les avis sanitaires.

Pierre-Yves Bourduas, ancien sous-commissaire de la police fédérale, rappelle à quel point la rapidité de l’information est cruciale pour protéger la population en situation de crise.

La Nouvelle-Écosse a également interdit la vente d’équipements anciens des forces de l’ordre après Portapique, et la commercialisation des anciens véhicules de patrouille demeure suspendue.

Des progrès encore attendus

Cependant, certains changements prennent plus de temps à se concrétiser, notamment ceux visant à prévenir la violence conjugale et à soutenir les victimes. La province a adopté en septembre dernier une loi reconnaissant la violence entre partenaires intimes comme une épidémie. Malgré cela, sept femmes ont été tuées par leur conjoint depuis cette date.

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source:https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2157613/portapique-tuerie-commemoration-cinq-ans

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