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Un procès hors normes s’ouvre ce lundi 24 février devant la cour criminelle du Morbihan à Vannes. L’ex-chirurgien Joël Le Scouarnec est accusé de viols et d’agressions sexuelles sur 299 victimes durant des décennies, dans de nombreux hôpitaux, principalement en Bretagne.
299 victimes, dont l’âge moyen est de 11 ans
Ce procès est exceptionnel en raison du nombre de victimes impliquées : Joël Le Scouarnec est poursuivi pour 300 faits, concernant 299 victimes. L’ancien chirurgien avait été mis en examen pour viols et agressions sexuelles sur 312 victimes potentielles, révélées par ses journaux intimes relatant des sévices sexuels sur plusieurs décennies. Certaines victimes ont été écartées de la procédure en raison de la prescription des faits.
Au total, Joël Le Scouarnec est accusé de 111 viols aggravés et 189 agressions sexuelles aggravées sur 158 victimes de sexe masculin et 141 de sexe féminin. Ces crimes se sont déroulés sur une période de 25 ans, de janvier 1989 à janvier 2014, avec un âge moyen des victimes de 11 ans.
Le Scouarnec est soupçonné d’avoir commis ces actes dans plusieurs hôpitaux de l’ouest de la France, notamment à la polyclinique du Sacré-Cœur à Vannes, ainsi qu’à Quimperlé, Lorient et Malestroit. L’ancien chirurgien a également exercé en Loire-Atlantique (Ancenis), en Indre-et-Loire (Loches) et en Charente-Maritime (Jonzac).
Dans ce dossier, il risque jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle. Actuellement en prison, il avait été condamné en décembre 2020 à 15 ans de réclusion criminelle pour des actes similaires.
Des victimes identifiées grâce à ses journaux intimes
Cette affaire a été révélée grâce à une plainte déposée en 2017 par une voisine de Joël Le Scouarnec, une petite fille de 6 ans à Jonzac. Les enquêteurs ont découvert dans sa maison 300 000 photos et vidéos pédopornographiques, ainsi que des milliers de pages de journaux intimes où il notait les noms de ses victimes potentielles et les détails de ses agressions.
Ce travail minutieux d’analyse des fichiers informatiques a permis d’identifier de nombreuses victimes, qui, lors des faits, étaient souvent sous anesthésie lors d’interventions chirurgicales. Certaines d’entre elles, comme Marie, n’ont appris les sévices qu’en 2019, lorsque la gendarmerie leur a montré les écrits de Le Scouarnec.
Ratés et omerta familiale
Les faits pour lesquels Joël Le Scouarnec est poursuivi s’étendent sur un quart de siècle. Malgré une première condamnation en 2005 pour détention d’images pédopornographiques, il a continué à exercer, en grande partie en raison d’une lenteur du système judiciaire à transmettre les informations pertinentes aux autorités médicales.
Des membres de sa famille étaient au courant de ses agissements, y compris son épouse, qui, selon lui, savait dès 1996. Des témoignages évoquent aussi des agressions répétées envers des nièces, jamais signalées à la justice.
Dans les hôpitaux où il exerçait, le silence était également de mise. Plusieurs alertes avaient été lancées sur ses comportements, mais aucune action n’a été entreprise pour le suspendre.
Une première condamnation, mais pas de sanctions disciplinaires
Deux associations ont déposé plainte contre X pour « non-obstacle à la commission d’une infraction » et « mise en danger d’autrui ». Elles dénoncent l’absence de restrictions sur l’exercice de Joël Le Scouarnec, même après sa première condamnation. Ce jugement n’a entraîné aucune mesure préventive, lui permettant de continuer à travailler avec des mineurs.
Lors du procès, une journée sera consacrée à examiner l’absence de sanctions disciplinaires à son encontre, avec l’audition de plusieurs témoins, dont l’ancienne directrice du centre hospitalier de Jonzac.
Une logistique impressionnante
Le procès se déroule devant la cour criminelle du Morbihan, et en raison de son ampleur, une salle spécialement aménagée a été mise à disposition dans l’ancienne faculté de droit de Vannes. Trois salles sont équipées pour permettre au public et à la presse de suivre le procès sur des écrans.
Avec 75 jours d’audiences prévus, 45 témoins et dix experts seront appelés à la barre, incluant plusieurs journées à huis clos. La durée prévisionnelle du procès est de quatre mois, ce qui représente un défi logistique significatif pour les autorités judiciaires.