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Le sommet Trump-Poutine, annoncé pour le 15 août en Alaska, suscite un examen attentif des choix symboliques et stratégiques entourant ce rendez‑vous entre Donald Trump et Vladimir Poutine, notamment en lien avec la guerre en Ukraine et les enjeux de l’Arctique.
Le choix de l’Alaska pour le sommet Trump-Poutine et ses dimensions géopolitiques
Donald Trump, fidèle à son goût du « teasing », avait indiqué que le lieu du sommet ne serait pas anodin. Les deux dirigeants s’entretiendront donc le 15 août prochain dans l’État le plus septentrional des États‑Unis, a précisé l’annonce officielle. Au menu des discussions : la guerre en Ukraine et « un hypothétique accord » entre Kiev et Moscou pour mettre fin au conflit, selon les propos du président américain.
Aucune précision n’a été apportée sur l’endroit exact du rendez‑vous ; Anchorage, la plus grande ville de l’État, est l’une des options envisagées. Le gouverneur républicain de l’Alaska, Mike Dunleavy, s’est réjoui sur X : « L’Alaska possède la localisation la plus stratégique au monde, au croisement de l’Amérique du Nord et de l’Asie, avec l’Arctique à notre nord et le Pacifique à notre sud ».
Pour se rendre en Alaska, les deux chefs d’État devront parcourir de longues distances : à vol d’oiseau, 7 000 km séparent Moscou d’Anchorage, et Donald Trump devra parcourir environ 5 500 km avant d’atterrir à l’aéroport de la ville. Dans tous les cas, les dirigeants seront éloignés du théâtre du conflit qu’ils évoqueront en détail : la guerre en Ukraine.
Histoire partagée, ressources et intérêts en Arctique
L’Alaska porte des traces de son passé russe : cette partie de l’Amérique était autrefois sous souveraineté russe avant d’être cédée aux États‑Unis en 1867 par le tsar Nicolas II, contre 6 624 000 €.
« La culture et l’histoire russes sont en quelque sorte ancrées dans l’Alaska », confirme Brandon Boylan, professeur à l’Université d’Alaska Fairbanks, auprès du New York Times. Des églises orthodoxes russes subsistent, notamment à l’ouest de l’État et dans les îles Aléoutiennes.
Au‑delà de l’histoire, l’intérêt commun porte sur les ressources de l’Arctique : pétrole, gaz, terres rares, or. Les États‑Unis et la Russie siègent au Conseil de l’Arctique et examinent des projets économiques transfrontaliers. Iouri Ouchakov, conseiller diplomatique de Vladimir Poutine, a souligné : « L’Alaska et l’Arctique sont des zones où les intérêts économiques de nos deux pays se recoupent ».
Moscou, dont l’économie est éprouvée après plus de trois ans de guerre en Ukraine, est attentif à toute manne financière susceptible de renflouer ses caisses. Washington, pour sa part, voit dans des partenariats ciblés une manière de contrer les ambitions régionales d’autres puissances, notamment la Chine, qui promeut depuis 2018 une « route de la soie polaire ».
Polémiques américaines et enjeux juridiques
La tenue du sommet sur le sol américain soulève des critiques. La Cour pénale internationale (CPI) a émis un mandat d’arrêt international contre Vladimir Poutine, pour des suspicions de « crimes de guerre » liés à la déportation d’enfants ukrainiens en Russie ; les États‑Unis ne reconnaissent pas la CPI, ce qui signifie que le président russe ne pourra pas être arrêté sur le territoire américain en lien avec ce mandat.
La décision de convier Vladimir Poutine en Alaska a été qualifiée par le Kremlin, via Iouri Ouchakov, de « tout à fait logique ». Mais dans l’opinion américaine, certains s’inquiètent des connotations historiques et nationalistes du choix. Michael McFaul, professeur de sciences politiques à Stanford et ancien ambassadeur des États‑Unis en Russie, note : « Trump a choisi d’accueillir Poutine dans une partie de l’ancien empire russe. Je me demande s’il sait que les nationalistes russes affirment que la perte de l’Alaska, comme celle de l’Ukraine, a été une mauvaise affaire pour Moscou, qu’il faut corriger ».
Certaines figures de la propagande russe ont, à l’occasion, exprimé le souhait de voir l’Alaska réintégrer les frontières russes ; sur ce point, Vladimir Poutine lui‑même avait répondu en 2014, ironique, lors d’une séance de questions/réponses : « Pourquoi avez-vous besoin de l’Alaska ? Nous sommes dans un pays nordique : 70 % de notre territoire se situe au nord et à l’extrême‑nord. En Alaska, il fait froid aussi. Alors, ne nous emballons pas ».