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Alors que l’attention internationale reste largement focalisée sur ce qui se passe à Gaza, de nouveaux témoignages et rapports d’ONG alertent sur une montée dangereuse des violences et du déplacement forcé en Cisjordanie. Entre extension des colonies, attaques de colons et accélération des expulsions, des Palestiniens sont contraints de quitter leurs terres, posant la question du devenir démographique et géographique de la région.
Contexte et interventions d’ONG
Une conférence organisée par l’ONG Crisis Action, depuis son siège à New York et animée par l’actrice et militante américaine Susan Sarandon, a réuni experts en droits humains et responsables communautaires pour documenter la situation sur le terrain.
Les intervenants ont présenté des témoignages en provenance de villages de Cisjordanie, y compris de la vallée du Jourdain, décrivant des expulsions, des perquisitions domiciliaires et un étouffement de l’aide humanitaire.
Ils ont insisté sur le fait que les incidents rapportés ne sont pas des événements isolés, mais s’inscrivent dans un processus plus large de modification de la réalité territoriale et démographique par la force.
Chiffres clés et expulsions massives
Plusieurs chiffres et constats ont été avancés par les ONG et les juristes présents :
- Des responsables estiment qu’environ 53 communautés, principalement bédouines, ont déjà été déplacées, totalement ou partiellement.
- On évoque l’annexion d’environ 70 km² provenant de l’est de Jérusalem et d’autres secteurs de la Cisjordanie.
- Depuis janvier, près de 35 000 Palestiniens auraient été déplacés de plusieurs camps et localités, notamment de Jénine et de Tulkarem, entraînant des vagues de déplacements internes.
- Les déclarations officielles niant l’existence d’un processus d’annexion ont été contestées ; des juristes rappellent la position de la Cour internationale de Justice sur l’illégalité de politiques d’annexion.
Allegra Batcheeko, dirigeante d’un réseau de protection de la Cisjordanie, a insisté : « L’annexion a eu lieu et a lieu maintenant » — ajoutant que le déplacement forcé et la domination permanente par la puissance occupante violent le droit international.
Des habitants du camp urbain de Tulkarm évacuent leurs maisons alors que l’armée israélienne poursuit des opérations en vue de démolitions programmées.
Témoignages personnels
Plusieurs témoignages directs ont illustré la violence quotidienne subie par les communautés palestiniennes.
Alia Mleihat, militante de la vallée du Jourdain, a relaté l’expulsion de sa famille d’un camp près de Jéricho puis d’un autre lieu proche après des raids de colons en juillet. Elle décrit des maisons envahies, des troupeaux volés et des tirs dirigés contre les habitants, y compris des menaces visant des femmes.
Mleihat travaille avec des communautés bédouines déplacées et des bergers pour défendre leurs terres et leurs moyens de subsistance face à la pression croissante des colonies et aux campagnes de démolition.
Une femme palestinienne confrontée à une attaque de colons et à l’intervention des forces israéliennes dans le sud d’Hébron.
De la localité d’al-Tuwana, dans les collines d’Hébron, le militant Mohammad Hrini a évoqué la « confrontation ouverte » et a souligné le rôle du documentaire primé par un Oscar qui, selon lui, dévoile une réalité de nettoyage ethnique et d’apartheid pratiquée par certains colons.
Hrini a rapporté des agressions contre les réalisateurs du film, dont l’enlèvement et la détention temporaire d’un des protagonistes à son retour des États-Unis, et il a témoigné des violences et arrestations répétées qu’il a subies depuis l’adolescence.
Responsabilité internationale et demandes des ONG
Les intervenants ont appelé la communauté internationale à cesser les ambiguïtés diplomatiques et à traduire les constats juridiques en actions concrètes.
Parmi les demandes formulées :
- Fournir une protection internationale aux civils palestiniens exposés à la violence quotidienne, y compris par le déploiement de forces de protection si nécessaire.
- Conditionner toute coopération ou aide à l’absence de soutien aux colonies illégales et cesser le commerce avec celles-ci.
- Établir des mécanismes indépendants de surveillance, de documentation et de mise en cause des responsables d’abus, afin d’assurer la responsabilité et de prévenir l’impunité.
Bushra Khalidi, responsable des politiques pour Oxfam en Israël et dans les territoires palestiniens occupés, a insisté sur le fait que la diplomatie polie ne change pas la réalité : sans reddition de comptes, l’occupation devient naturelle et l’aide humanitaire ne sert que d’« pansement » sur une blessure maintenue ouverte.
Les organisations demandent que les conclusions de la Cour internationale de Justice et d’autres instances juridiques se reflètent dans des politiques nationales et internationales, afin d’empêcher toute normalisation du déplacement forcé en Cisjordanie.
Les ONG et témoins présents à l’événement ont lancé un message clair : la mise en œuvre effective de la responsabilité internationale n’est pas symbolique mais vitale, et l’arrêt du déplacement forcé en Cisjordanie nécessite des mesures politiques, économiques et juridiques immédiates.

