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Franck Nicol : Leadership militaire et entreprise, une symbiose

by Sara
France

Ancien officier général et homme de terrain, Franck Nicol est aujourd’hui sparring-partner de dirigeants (certifié superviseur de dirigeants par HEC Paris) et maître de conférences associé à Sciences Po Rennes. Dans son nouvel ouvrage, Agir en leader, publié en mai dernier, il recommande un accompagnement humain des dirigeants afin de coconstruire avec eux des solutions pour manager dans la complexité et ainsi devenir leader. Entretien.

Une carrière militaire riche

FRANCK NICOL : Mes 38 années dans l’armée sont émaillées de nombreuses interventions opérationnelles m’amenant à faire face à des situations d’inconfort et à gérer l’incertitude. J’ai dirigé différents types d’unités, de 40 jusqu’à 9 000 personnes, et ai aussi servi « dans des bureaux », au sein d’états-majors parisiens. Gestions de crises de niveau stratégique, conception et création ex nihilo d’une ville d’entraînement au combat urbain, participation à la réorganisation du commandement interarmées furent des défis pleins de saveur.

Apports du militaire à l’entreprise

F.N. : Le chef militaire pratique au quotidien un leadership participatif et, lorsque les circonstances l’exigent, un leadership directif. L’armée est constituée d’hommes et de femmes qui n’ont pas conscience, lorsqu’ils la rejoignent, qu’elle est un corps vivant, un ensemble cohérent. Le capital humain y est édifié, l’action démultipliée.

C’est assez similaire dans l’entreprise : on parle beaucoup de production, de rendement mais c’est avant tout un ensemble humain avec des besoins individuels et des devoirs collectifs autour d’objectifs communs. Beaucoup de dirigeants arrivent à générer un climat de confiance propice au développement de l’activité et au bien-être du salarié. L’adaptation au marché est aussi la règle.

Le leader, qu’il soit militaire ou en entreprise, est un compositeur et un chef d’orchestre : il projette un modèle viable et apte à anticiper les aléas à venir ; dans l’action, il fait converger les efforts de ses collaborateurs et synchronise les effets attendus.

La culture militaire est construite autour de ce besoin d’adaptation permanente. C’est une manière d’imaginer et d’intégrer différentes temporalités, qui peut se calquer autant dans le monde géopolitique qu’économique. Le dirigeant d’entreprise ou d’administration se doit d’être capable de traduire sa vision dans l’action, tout en planifiant le coup d’après et en anticipant les évolutions de l’écosystème. Il doit aussi faire en sorte que tous les collaborateurs aient compris ce que l’on attend d’eux.

Le monde militaire quant à lui cherche à donner du sens à l’action. Mais avant tout, il développe la confiance et la considération mutuelles permettant de maintenir des liens solides en situation extrême.

Importance de l’adhésion en période d’incertitude

F.N. : Nous avons besoin de tous pour relever de nombreux défis de notre temps. Dans cet ouvrage, j’évoque la notion de puissance, cette capacité à agir grâce au collectif et à différents leviers. Sans puissance, pas de production. Tout organisme civil ou militaire est un instrument de puissance à développer, à entretenir.

Délivrer cette puissance nécessite une vision, un projet fédérateur facilitant la libération de l’initiative, la convergence des volontés de tous. Lors de crises, le dirigeant fera le plus souvent la différence, surtout s’il s’est préparé, s’il a préparé son organisme.

Jeune colonel, j’avais développé le concept de la « pyramide de la puissance » afin que mes attentes soient comprises de tous. La première facette de la pyramide représente l’esprit d’équipe. La deuxième fait référence à la performance individuelle et collective tandis que la troisième désigne le leadership et la discipline librement consentie. Si une des facettes manque, la puissance n’est pas au rendez-vous ou ne peut pas être correctement délivrée.

Identifier le bon momentum pour agir

F.N. : C’est la prise de distance face au contexte qui permet de repérer le point de bascule dans la décision. Il est nécessaire de s’ancrer dans la réalité, de dézoomer la situation et de l’imaginer en dynamique, avec différents scénarios en tête, de discerner.

C’est aussi un travail préalable à faire sur soi-même pour identifier ses propres vulnérabilités et déconstruire ses biais. Puis vient le moment d’être audacieux en faisant la convergence entre le souhaitable, le possible et l’acceptable, et vient le moment de décider.

Couverture du magazine Forbes - Automne 2024

Leadership | Entreprise | Militaire | Franck Nicol | Gestion De Crise | France

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