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Une série de clichés jusque‑lors inconnus, prises à l’insu des nazis entre 1940 et 1942 à Paris et en banlieue, refait surface : ces Photos clandestines Occupation Paris, datées et assorties de commentaires moqueurs sur les forces d’occupation, ont été identifiées et replacées dans le récit individuel de leur auteur, un photographe amateur nommé Raoul Minot.
Photos clandestines Occupation Paris : identification et mise en lumière
Dans une série d’articles publiée à l’été 2024 dans « Le Monde », Philippe Broussard a raconté comment, en plongeant dans ce fonds exceptionnel, il avait fini par identifier ce photographe amateur : Raoul Minot, employé du grand magasin Printemps. Ces investigations initiales ont montré que des centaines de clichés, pris clandestinement et munis de commentaires moqueurs à l’égard des troupes allemandes, avaient échappé pendant des décennies à la curiosité des spécialistes de la Résistance.
Des recherches complémentaires menées par le journaliste permettent aujourd’hui d’aller beaucoup plus loin en retraçant pleinement le destin de cet homme. Broussard suit la trajectoire de Minot jusqu’à son arrestation et sa déportation en 1943, et replace les photographies dans le contexte professionnel et familial : l’épouse de Raoul Minot, Marthe, travaillait comme caissière au Printemps, où Minot était employé.
Le travail de Broussard se traduit par un ouvrage riche en documents : une centaine de clichés sont reproduits dans le livre, ainsi que des documents et des témoignages inconnus des historiens. Ces éléments permettent de mieux comprendre non seulement les images elles‑mêmes, mais aussi le réseau humain et professionnel dans lequel évoluait Minot au moment où il prenait ces photos clandestines de l’Occupation à Paris.
Le fonds photographique et le contexte professionnel chez Printemps
Les images, prises entre 1940 et 1942, sont souvent commentées avec ironie et moquerie envers les forces d’occupation. Elles documentent des scènes de la vie quotidienne sous l’Occupation et témoignent du regard critique d’un photographe amateur placé au cœur d’un grand magasin parisien. Le fonds éclaire aussi les coulisses du Printemps : l’auteur décrit la présence de Minot et de son épouse Marthe au sein du magasin et le climat professionnel qui entourait leurs activités.
Le livre engage, par la présentation de ces documents inédits, une réévaluation partielle de certains épisodes locaux de l’Occupation à Paris, tout en soulignant la singularité de ces photos clandestines par rapport aux archives institutionnelles et aux collections privées connues jusqu’alors.
Edmond Rachinel et l’interrogation sur les complicités internes
Les extraits publiés dans l’enquête se concentrent en particulier sur une figure du magasin : Edmond Rachinel, directeur du personnel du Printemps. Personnage apprécié de tous, il devient l’objet d’interrogations dans le récit de Broussard. L’auteur s’interroge sur « ce que cet homme apprécié de tous a pu savoir » des actions clandestines de Minot et de son collègue Jules Juven, lui aussi arrêté en possession de photos interdites.
Ces pages ne se contentent pas de dresser un portrait : elles posent la question des solidarités et des silences au sein d’un lieu de travail pendant l’Occupation. Le rôle exact de Rachinel dans la connaissance ou la tolérance de ces activités clandestines reste posé par l’auteur à travers des documents et des témoignages nouveaux pour les historiens.
Documents reproduits et apport historiographique
Outre la centaine de photographies, le livre rassemble des éléments d’archives et des témoignages qui n’avaient pas encore été exploités. Ces pièces enrichissent le dossier autour de Minot et de son entourage professionnel et familial, et permettent de documenter la chaîne des événements menant à l’arrestation et à la déportation de l’auteur des clichés en 1943.
Le livre de Philippe Broussard, paru chez Seuil et composé de 304 pages, propose ainsi une documentation visuelle et textuelle susceptible de nourrir de futures recherches sur la photographie clandestine et les pratiques résistantes dans les entreprises commerciales parisiennes pendant la guerre.
En ressaisissant ces archives photographiques et humaines, l’enquête éclaire une facette jusque‑lors méconnue de l’Occupation à Paris et pose de nouvelles questions aux historiens sur la diffusion, la protection et la découverte tardive de ces images rares.