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En novembre 1957, aux confins de la taïga, un homme s’aventure vers « un endroit où personne, à part un ex-prisonnier, ne serait allé de son plein gré ». Récemment amnistié, Matveï Bélov a passé dix-huit ans dans les camps du goulag, et sa liberté est entachée par des souvenirs douloureux.
Un parcours dramatique
Libre, Matveï Bélov ne peut néanmoins pas résider dans une grande ville. Chaque nuit, il est hanté par l’apparition d’un vagabond, persuadé que ce double de lui-même détient la clé de son passé. Depuis sa libération, des mots lui reviennent dans une langue étrangère, lui rappelant les fragments d’une identité qu’il a dû abandonner pour survivre.
La quête d’un rêve
Né Lucien Baert dans le nord de la France le 10 novembre 1918, Matveï était fasciné par l’idéologie communiste. En août 1939, il part pour l’URSS, espérant prouver la fausse prétention de Céline qui affirmait que « la grande prétention du bonheur » était « l’énorme imposture soviétique ».
La désillusion soviétique
Lucien se heurte rapidement à la réalité du « rêve écarlate ». Les « magnifiques prolétaires » laissent place à des « ouvriers fatigués » dans des conditions déplorables. Lorsque Lucien apprend que l’Union soviétique a signé un traité de non-agression avec l’Allemagne, son monde s’écroule. Soupçonné d’espionnage, il est envoyé dans un bagne de l’Oural, marquant le début d’une période de privations et de travail forcé.
La mémoire et l’espoir
Après vingt ans d’isolement, il partage son histoire avec Daria, avec qui il tente de se reconstruire dans une isba. L’idée de retrouver ses proches, notamment celle qu’il a laissée sur un quai de gare en 1939, commence à germer dans son esprit.
Le récit d’un rêveur
Dans son œuvre, Andreï Makine redonne vie à ce « cocu de l’Histoire », offrant une voix aux « cris dans le désert » d’un rêveur sacrifié. Sa plume, puissante, s’appuie sur des détails soigneusement choisis, comme un article vantant les « prisons humanistes » du modèle communiste, ou un ancien soldat échangeant ses médailles contre des dollars dans un marché devenu le symbole d’un capitalisme envahissant.
Ce roman, « Prisonnier du rêve écarlate », condamne la barbarie stalinienne tout en dénonçant l’hypocrisie occidentale, sans jamais tourner en dérision l’idéalisme de son protagoniste, uniquement coupable d’avoir rêvé d’un monde meilleur.
Détails du livre
« Prisonnier du rêve écarlate », d’Andreï Makine (Grasset, 416 p., 23 €).