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Décolonialité et universalismes : vers une philosophie mondiale ?

by Sara
France

Savoir qui nous sommes, savoir ce à quoi nous tenons, penser les lieux et les échelles de ce qui nous rassemble… Le Campus Condorcet organise, les 20, 21 et 22 mars 2025, trois jours de débats et de rencontres sur le thème « Universel(s) ? ». Un événement dont Libération est partenaire.

Les études décoloniales : une philosophie de l’histoire

Les études décoloniales d’Amérique latine et des Caraïbes proposent une réflexion sur l’histoire : depuis la conquête des Amériques en 1492, modernité et colonialité seraient indissociables, et nous n’aurions jamais été véritablement postcoloniaux. Ces études critiquent l’universalisme « de surplomb » et « désincarné » élaboré depuis le XVIIe siècle en Europe, qui ignore ou réduit à l’état d’objet d’étude les savoirs des sociétés colonisées. Mais ces perspectives se détachent-elles pour autant de l’Occident, rejettent-elles toute forme d’universalisme, ou sont-elles enfermées dans l’identitarisme et le relativisme ?

Des penseurs décoloniaux engagés

Des auteurs et autrices décoloniaux comme Anibal Quijano, Enrique Dussel, Walter Mignolo, Arturo Escobar, Silvia Rivera Cusicanqui, Maria Lugones, Ramon Grosfoguel ou Rita Segato ont une solide formation en sciences sociales et en humanités, souvent de tendance marxiste. Depuis les années 1960, ils dénoncent le caractère eurocentré des sciences sociales dominantes, fondant leur critique sur leur expérience personnelle.

Une diversité de pensées philosophiques

Dans leurs travaux, certains ont cédé à la tentation romantique d’exalter l’irréductible altérité des traditions de pensée subalternes, adoptant ainsi une approche presque anti-universaliste et anti-occidentale. Néanmoins, il convient de souligner que des penseurs comme Anibal Quijano, Silvia Rivera Cusicanqui et Enrique Dussel, tout en critiquant l’hégémonie, cherchent à formuler d’autres types d’universels.

Les noyaux problématiques universels d’Enrique Dussel

Enrique Dussel, philosophe de la libération, identifie quatre *« noyaux problématiques universels »* que toutes les sociétés humaines se posent :

  • « Que sont et comment se comportent les choses réelles ? »
  • « En quoi consiste le mystère de l’intériorité humaine ? »
  • « Comment penser la liberté, le monde éthique et social ? »
  • « Comment interpréter le fondement ultime de l’univers ? »

Les récits rationnels, tant mythiques que philosophiques, abordent ces questions avec des langages distincts, symboliques ou démonstratifs, mais coexistent souvent.

Une vision pluriverselle

Dussel affirme que chaque récit, en traitant de problèmes communs, propose des réponses d’une validité universelle, ouvertes à la discussion. Il encourage un dialogue interphilosophique visant à enrichir la pensée dans une optique de *« philosophie mondiale pluriverselle »* et *« transmoderne »*.

Appel au débat et à la diversité

Il est essentiel de lire et de discuter les pensées décoloniales d’Amérique latine et des Caraïbes dans toute leur diversité. L’universalisme classique ne parvient plus à inspirer et à unir, laissant place à une promesse d’égalité non réalisée. Des voix émergent pour promouvoir un pluriversalisme, comme l’universalisme latéral (Souleymane Bachir Diagne), cosmopolite (Alain Policar), concret (Michel Cahen) ou les universalismes mineurs (Markus Mesling).

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source:https://www.liberation.fr/forums/pensees-decoloniales-et-universalismes-20250312_JOVATU3VSBEV3NMK2UL63U623E/

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