La première fois que j’ai décidé de traverser l’Atlantique à la voile avec mon copain, c’était en avril, à l’âge de 21 ans. Ce périple de quatre mois doit débuter en novembre depuis le nord de la Bretagne, en passant par les Canaries et le Cap-Vert jusqu’aux Antilles avant d’arriver en Amérique latine. Par la suite, je prévois de prendre un bus pour rejoindre l’État de Oaxaca, dans le sud du Mexique, vers mars.
Je m’y rends pour mon terrain de recherche de fin de master en géographie à l’École normale supérieure et à l’École des hautes études en sciences sociales. Prendre un vol pour m’y rendre m’embête. L’été dernier, j’ai tenté de rejoindre le Liban sans prendre l’avion. J’ai réussi jusqu’à Chypre, où j’ai dû finalement opter pour un vol en raison de la crise libanaise.
Engagement environnemental
Depuis le lycée, j’ai eu de nombreux engagements associatifs axés sur les questions environnementales. Lors des marches pour le climat en 2019, alors élève en première, mes amis et moi avons créé un mouvement nommé Climaction. Nous organisions des conférences et des actions pour végétaliser notre lycée.
Pour mon mémoire de recherche cette année, je travaille sur un sujet environnemental portant sur le développement des parcs éoliens dans le sud du Mexique et les enjeux liés à l’accaparement des terres. Ce travail m’a amenée à réfléchir sur les notions de capitalisme vert et de colonialisme vert.
Choix du voilier
Une grande partie des sociologues et des anthropologues qui étudient l’Amérique latine se penchent sur des questions liées à l’environnement. Ce modèle est troublant : nous passons notre vie à écrire que la crise climatique impacte gravement les populations défavorisées de cette région, et pourtant beaucoup de chercheurs réalisent deux allers-retours en avion par an pour s’y rendre. Il existe un décalage et une réflexion absente sur ces problématiques, justifiés par le fait que l’on produit du savoir.
Pour rejoindre le Mexique par la mer, j’ai exploré plusieurs options : j’ai d’abord cherché à embarquer sur un cargo, mais cela n’est plus courant ou s’avère très coûteux. Ensuite, j’ai envisagé de partir en tant qu’équipière sur des voiliers, via des sites Internet ou des groupes Facebook où des skippeurs recherchent des compagnons de voyage. L’option de la voile s’est rapidement imposée, même si je cherchais une autre formule. J’avais déjà participé à des stages d’initiation à la navigation, mais n’avais jamais navigué plus d’une semaine.