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Pourquoi certaines cellules mutées deviennent-elles cancéreuses ?

by Sara
France, Canada

Des millions de cellules dans notre organisme portent des mutations liées au cancer, mais très peu d’entre elles développent réellement des tumeurs. Une étude canadienne menée par l’institut de recherche Lunenfeld-Tanenbaum à Toronto révèle que la vitesse à laquelle une cellule se divise pourrait être déterminante dans l’apparition d’un cancer. Cette découverte offre un nouveau regard sur les mécanismes du cancer et ouvre des pistes potentielles pour la prévention et le traitement.

Mutations et cancer : une distinction cruciale

Le cancer apparaît lorsque des cellules anormales envahissent les tissus voisins et peuvent se propager dans le corps. Il est aujourd’hui établi que ce phénomène résulte de mutations dans des gènes appelés oncogènes ou gènes suppresseurs de tumeur. Lorsque ces gènes sont altérés et dysfonctionnels, la cellule peut devenir cancéreuse, c’est-à-dire agressive et problématique.

Cependant, de nombreuses cellules saines portent aussi ces mutations sans jamais former de tumeurs. La grande question que se posent les chercheurs est donc : qu’est-ce qui différencie les cellules mutées qui déclenchent un cancer de celles qui restent inoffensives malgré leurs mutations ?

Le cycle cellulaire : un facteur clé

Le cycle cellulaire correspond au temps nécessaire à une cellule pour se diviser, comprenant plusieurs étapes comme la croissance, la duplication de l’ADN et la division elle-même. Selon l’étude publiée dans Nature, ce temps est un facteur décisif pour prédire si une cellule mutée deviendra cancéreuse.

Les chercheurs ont utilisé des souris génétiquement modifiées pour activer ou désactiver certains gènes afin de créer des mutations cancérigènes. Ils ont ensuite observé différents tissus tels que l’œil, le poumon et l’hypophyse pour étudier la durée du cycle cellulaire grâce à une technique de double marquage. Celle-ci permet de visualiser au microscope le moment précis de la division cellulaire, facilitant ainsi l’analyse du devenir des cellules.

Par exemple, dans le cancer du poumon à petites cellules, caractérisé par l’inactivation des gènes RB et p53, les chercheurs ont constaté que lorsque le cycle cellulaire était plus court, la croissance tumorale était plus rapide, que la mutation ait été induite chez des souris embryonnaires ou adultes.

Les cellules à division rapide, principales coupables

Les observations ont montré que la cellule qui devient cancéreuse après division est généralement celle qui se divise le plus rapidement. Dans le cas de l’œil, les cellules amacrines de la rétine, dont le cycle cellulaire ne dure que 26 heures, ont été identifiées comme cancéreuses, contrairement à d’autres cellules voisines avec un cycle entre 77 et 143 heures, également porteuses de mutations mais non cancérigènes.

Renata Basto, cheffe de l’équipe Biologie des centrosomes et de l’instabilité génétique à l’Institut Curie, souligne que cette étude est prometteuse mais appelle à la prudence, car l’étape précise du cycle cellulaire impliquée dans la transformation cancéreuse reste encore inconnue.

Ralentir le cycle cellulaire : une piste prometteuse

Pour approfondir leurs recherches, les scientifiques ont modifié des gènes responsables de la rapidité du cycle cellulaire, bloquant ainsi certaines protéines favorisant une division rapide. Le résultat a été spectaculaire : aucune tumeur n’est apparue malgré la présence des mutations cancérigènes.

Rod Bremner, coauteur de l’étude, témoigne de leur étonnement devant cette découverte. Selon lui, cela suggère qu’un tissu peut contenir des cellules mutées, habituellement à l’origine de cancers, sans pour autant former de tumeurs, ce qui est une révélation importante.

La prochaine étape consiste à tester cette hypothèse sur des cellules humaines en laboratoire. Toutefois, Renata Basto rappelle que le cycle cellulaire n’est pas le seul facteur en jeu dans le développement du cancer, d’autres causes comme l’inflammation étant également impliquées. Par ailleurs, contrôler artificiellement le cycle cellulaire reste un défi, car certains organes, tels que la peau ou l’intestin, nécessitent un renouvellement rapide pour fonctionner normalement.

source:https://sante.lefigaro.fr/medecine/des-chercheurs-decouvrent-pourquoi-certaines-cellules-mutees-deviennent-cancereuses-et-d-autres-pas-20250506

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