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Le débat sur le prix du carbone au cœur des élections canadiennes
Montréal, Canada – Depuis des années, Pierre Poilievre, le leader du Parti conservateur du Canada, martèle un slogan simple : « Abrogez la taxe ». Attendu comme le prochain premier ministre, il a promis de supprimer le système de tarification du carbone instauré par le gouvernement libéral sortant de Justin Trudeau.
Cette politique a entraîné un coût supplémentaire pour les produits fossiles, tels que l’essence, dans le cadre de l’effort du pays pour réduire les émissions et faire face à la crise climatique. Qualifiant cela de « taxe carbone », Poilievre a accusé le programme environnemental de causer une crise d’accessibilité au Canada, malgré des recherches montrant que la tarification du carbone a eu un effet négligeable sur l’inflation. Il a également promis de « supprimer la taxe pour tout le monde, pour toujours ».
« Nous avons besoin d’une élection sur la taxe carbone pour renvoyer tout le monde chez eux et ramener un gouvernement conservateur sensé », a déclaré Poilievre dans une récente vidéo publiée sur les réseaux sociaux, en faisant référence aux libéraux.
Les conservateurs espèrent que leur stratégie anti-taxe carbone portera ses fruits lors des prochaines élections fédérales, alors que les Canadiens continuent de lutter contre la hausse des coûts alimentaires et de logement.
Une politique contestée
Des experts affirment que la campagne des conservateurs a rendu la tarification du carbone difficile à vendre sur le plan politique. Même les leaders candidats pour remplacer Trudeau à la tête du Parti libéral s’éloignent de cette politique. Hadrian Mertins-Kirkwood, chercheur senior au Canadian Centre for Policy Alternatives, a déclaré : « Les conservateurs ont particulièrement tiré profit de leur opposition à la tarification du carbone. ‘Abrogez la taxe’ est désormais le pilier central de la stratégie de campagne des conservateurs fédéraux. »
Il ajoute que la rhétorique politique autour de la tarification du carbone a « considérablement exagéré » la question, tant en ce qui concerne ses effets sur l’accessibilité que son importance dans la lutte contre le climat. « Le problème est que cela est devenu un football politique, un symbole de l’excès gouvernemental d’une part et l’incarnation de la politique climatique d’autre part. Je pense que ce n’est ni l’un ni l’autre. »
Qu’est-ce que le prix du carbone ?
En 2018, le Canada a adopté la Loi sur la tarification des polluants par les gaz à effet de serre, établissant des normes nationales minimales pour la tarification du carbone dans les provinces et territoires. Le gouvernement fédéral a mis en place deux systèmes : un pour les grands pollueurs industriels et un pour les consommateurs canadiens.
Le prix du carbone pour les consommateurs, qui a attiré le plus d’attention et de critiques, impose des prélèvements sur les achats quotidiens de produits fossiles, tels que le diesel, l’essence et le gaz naturel. Ces prélèvements ont augmenté au fil du temps, avec la dernière hausse en avril qui a entraîné un coût supplémentaire de 0,12 $ (0,176 $ canadien) par litre d’essence, selon la Fédération canadienne des contribuables.
L’idée derrière cela est qu’en augmentant le coût des combustibles fossiles, les consommateurs canadiens seront contraints de modifier leur comportement et de se détourner des produits qui augmentent les émissions de gaz à effet de serre. Cette initiative fait partie de la stratégie globale du gouvernement libéral pour lutter contre le changement climatique.
Une communication déficiente
Le gouvernement fédéral a mis en place un système de remboursements pour aider les ménages canadiens à compenser le prix du carbone. Des professeurs de l’Université de Calgary ont constaté que les ménages canadiens recevaient des paiements trimestriels souvent supérieurs aux dépenses supplémentaires engendrées par le prix du carbone.
Cependant, Keith Stewart, un stratège senior en énergie chez Greenpeace Canada, a souligné que le gouvernement n’a pas réussi à communiquer clairement le fonctionnement du système, ce qui a permis aux conservateurs de « polluer l’eau ». Il a noté que l’argent que les Canadiens recevaient à travers le remboursement du carbone n’était pas clairement étiqueté, alimentant la confusion.
Les partis libéraux et conservateurs en désaccord
Caroline Brouillette, directrice exécutive du Climate Action Network Canada, a déclaré que certains politiciens canadiens ont utilisé la tarification du carbone comme bouc émissaire dans le cadre d’un « effort pour limiter toutes les actions climatiques ». Elle a également noté que les conservateurs n’ont proposé aucun plan climatique constructif jusqu’à présent.
« La conclusion que je tire à ce stade est que M. Poilievre, face à l’une des crises les plus graves auxquelles ses électeurs sont confrontés, ne nous dit que ce qu’il fera moins », a-t-elle ajouté.
Un nouveau leadership en marche
Le Parti libéral doit choisir un nouveau leader pour remplacer Trudeau début mars, et les deux principaux candidats ont fait de l’abrogation de la tarification carbone une de leurs promesses. Mark Carney, ancien gouverneur de la Banque du Canada, a déclaré qu’il remplacerait la tarification carbone par des incitations pour « récompenser les gens pour leurs choix plus écologiques ».
Son concurrent, Chrystia Freeland, a également annoncé son intention d’annuler le prix du carbone. « Où les gens ont un prix du carbone visible, ils disent : ‘Vous savez, nous n’aimons pas ça’, » a-t-elle déclaré. « Nous devons écouter, tout en ayant un plan solide pour lutter contre le changement climatique. »