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La prestigieuse université américaine Harvard fait face à un conflit majeur avec l’administration Trump, qui a récemment gelé plus de 2 milliards d’euros de financements fédéraux. Cette mesure intervient après que l’université a refusé de se plier à une série de demandes jugées excessives par la Maison-Blanche, visant notamment à lutter contre l’antisémitisme sur le campus.
Des étudiants traversent une porte en quittant Harvard Yard, le 15 avril 2025 sur le campus de l’université Harvard à Cambridge, Massachusetts.
Un bras de fer entre Harvard et la Maison-Blanche
Face aux pressions de l’administration Trump, Harvard a choisi de défendre farouchement son indépendance académique. Après avoir reçu une liste de demandes exigeant des modifications profondes dans sa gouvernance, ses pratiques de recrutement et ses procédures d’admission, l’université a refusé de céder. En réponse, le gouvernement américain a gelé 2,2 milliards d’euros de financements fédéraux, tout en menaçant de retirer le statut fiscal à but non lucratif de l’institution.
Alan Garber, président de Harvard, a affirmé dans une lettre à ses étudiants et professeurs que l’université ne négocierait jamais sur son indépendance ni sur ses droits constitutionnels.
Les enjeux des financements fédéraux pour Harvard
Selon Nikolas Bowie, professeur en droit à Harvard, une grande partie des financements fédéraux – environ 7 milliards d’euros sur un total de 9 milliards – est destinée aux hôpitaux universitaires et à la recherche médicale. Il souligne que sa propre mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer, a bénéficié d’études menées à Harvard visant à ralentir la progression de cette maladie.
« Je serais furieux d’apprendre qu’une étude est interrompue en cours de route parce que le président a privé l’hôpital de ses financements fédéraux. Pourtant, c’est exactement ce que propose actuellement le président », déplore Nikolas Bowie, fustigeant cette prise en otage de la recherche.
Un débat autour de la diversité idéologique et de la liberté académique
La Maison-Blanche accuse Harvard de manquer de diversité de points de vue, notamment en sous-représentant les opinions conservatrices au sein de son corps professoral. Pourtant, l’université affirme avoir investi dans des programmes favorisant cette diversité idéologique depuis plus d’un an.
Pour Nikolas Bowie, il est essentiel que les facultés et les administrateurs conservent la liberté de décider des contenus enseignés. Il met en garde contre toute pression politique qui transformerait la quête de vérité académique en simple recherche d’opinions populaires.
Les recours juridiques contre l’administration
Deux recours judiciaires ont été déposés pour contester les mesures prises par l’administration Trump. Le premier concerne les politiques d’immigration ciblant des étudiants non-citoyens exprimant des opinions pro-palestiniennes, décrites comme une atteinte au Premier Amendement. Le second conteste le gel des financements fédéraux.
Nikolas Bowie se montre confiant dans l’issue judiciaire, rappelant que la Constitution interdit aux responsables publics d’abuser de leur pouvoir pour punir leurs opposants politiques, une accusation directe adressée à la Maison-Blanche concernant les expulsions d’étudiants protestataires.
Extrait d’entretien avec Nikolas Bowie
Michel Martin : L’université met en avant ses projets de recherche. L’un d’eux concerne-t-il les maladies comme Alzheimer ou la SLA ?
Nikolas Bowie : Exactement. La recherche scientifique et médicale à Harvard dépend largement des financements fédéraux. Presque toutes les activités de Harvard sont liées d’une manière ou d’une autre au gouvernement fédéral. Par exemple, la clinique internationale des droits humains, où j’ai étudié, a été spécifiquement ciblée dans la lettre de demandes. Je suspecte que cela soit dû au désaccord de l’administration avec les positions juridiques défendues.
Michel Martin : La Maison-Blanche critique le manque de diversité idéologique, notamment conservatrice. Harvard a déclaré avoir fait des efforts récents à ce sujet. Est-ce une forme de reconnaissance de la validité de ces critiques ?
Nikolas Bowie : Il est crucial que le choix des enseignements revienne aux universitaires. Modifier ce qui est enseigné en fonction de la ligne politique de la Maison-Blanche serait contraire à la vocation de l’université, qui est la recherche de la vérité, pas de l’opinion populaire. La diversité des points de vue est importante, mais elle ne doit jamais être imposée sous la menace financière.
Michel Martin : Quel est le sentiment face aux poursuites judiciaires engagées ?
Nikolas Bowie : Nous sommes confiants. Aucune loi n’autorise le président à retenir des fonds fédéraux pour contraindre une institution à se plier à sa volonté personnelle. La Constitution empêche aussi l’abus de pouvoir pour réprimer les opposants politiques, ce qui est précisément ce que fait l’administration en expulsant des étudiants protestataires.